Nouveaux projets de réformes des retraites

65 ans, c’est toujours non !

Malgré le refus de PV 2020 en 2017, qui faisait suite à une série d’échecs de réformes de l’AVS depuis sa dernière entrée en vigueur en 1997, le conseiller fédéral socialiste Alain Berset annonçait le 3 juillet dernier un nouveau projet de réforme des retraites, AVS 21.

Manifestation pour l’égalité salariale, Berne, septembre 2018

Moins d’un mois après l’historique grève féministe de juin 2019, l’élévation de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans était à nouveau remise sur le tapis. Dans le but proclamé d’« assainir » l’AVS, de garantir les rentes et de maintenir le niveau actuel, le gouvernement vise une économie de 10 milliards de francs via cette élévation, complétée par une augmentation de la TVA pour arriver à un objectif de 26 milliards d’ici à 2030.

Si l’âge de référence est fixé à 65 ans, le projet vise une flexibilisation générale de l’âge de la retraite entre 62 et 70 ans, avec des pénalités et des incitations financières prévues. Des mesures qui pousseront la majorité des salariés, en premier lieu les salariées, à percevoir la rente le plus tard possible. Ces dimensions antisociales seront en outre renforcées par l’augmentation de 1,5 % de la TVA également prévue par le projet.

En parallèle, un projet de réforme du 2e pilier a été mandaté par le Conseil fédéral aux partenaires sociaux, pour tenter de pallier aux défauts d’un système en faillite, qui n’arrive plus à garantir le niveau des prestations. Les mesures proposées incluent une baisse du taux de conversion de 6,8 % à 6 % qui diminuera de fait les rentes. Elles prévoient également une augmentation de la capitalisation qui passera par l’abaissement du montant de coordination. En d’autres termes, les bas salaires cotiseront plus qu’aujourd’hui – et perdront du pouvoir d’achat – pour obtenir des rentes à leur retraite qui seront toujours insuffisantes. Ce n’est pas une solution.
En marge de ces projets de réforme du système de retraites, l’Union Syndicale Suisse (USS) a décidé, lors de son congrès de novembre dernier, de lancer une initiative pour une 13e rente AVS. Cette initiative demande le versement d’une rente vieillesse supplémentaire, équivalente au montant de la rente AVS perçue chaque mois. Ceci représenterait une augmentation de 300 francs par mois en moyenne. Le financement de cette augmentation serait assurée par les bénéfices de la Banque Nationale Suisse. Bémol : seules les rentes vieillesse sont concernées, les rentes survivants n’étant pas inclues dans le projet. La récolte de signatures commencera dans le courant du mois de mars.

Double attaque

Les échéances de ces différents projets vont s’échelonner au fil de l’année 2020, avec des débats au Parlement au sujet de l’AVS et de la réforme du 2e pilier prévus dans les mois à venir. Cette double attaque contre les retraites, face à laquelle la proposition de l’USS ne semble pas pouvoir offrir de véritable compensation, aura bien sûr un impact particulièrement fort sur les femmes. Un alignement du départ à la retraite entre les hommes et les femmes ne saurait se justifier alors que, notamment, la quasi-totalité des hommes reçoivent des prestations du deuxième pilier tandis que 30 % des femmes doivent se contenter de la rente AVS. De plus, cette dernière est elle-même en moyenne 10 % plus basse (chiffres 2016) pour les femmes.

Le manque à gagner s’élève à des centaines de millions de francs chaque année : 700 millions pour les femmes ayant pris leur retraite en 2016. L’évaluation se monte à presque 20 milliards si l’on considère l’ensemble des femmes en âge de toucher une rente. Cette situation constitue l’aboutissement des inégalités touchant les femmes dans le monde professionnel et privé : majorité du temps de travail non-payé (60 % sur les 53 heures en moyenne par semaine, contre 63 % de travail rémunéré pour les hommes), salaires encore largement plus bas, position majoritaire dans les postes les moins bien rémunérés, carrières professionnelles moins linéaires, etc.

Par ailleurs, si l’augmentation prévue vise pour l’instant les femmes, il est d’ores et déjà clair que l’objectif à moyen terme est la retraite pour toutes et tous à 67 ans. Nous formulons donc à nouveau un NON haut et fort contre AVS21 et toutes les réformes du même type qui continuent inlassablement de nous être proposées.


Marie Jolliet

Seule solution, la fusion

La seule réponse viable face à la faillite programmée du 2e pilier, c’est de l’intégrer à l’AVS en attribuant les cotisations de la LPP à l’AVS et en intégrant la fortune accumulée du 2e pilier au fonds de réserve AVS. Combinée à l’instauration d’une retraite à 60 ans pour toutes et tous, cette « super AVS » permettrait de garantir une rente équivalant à 80 % du dernier salaire avec un plancher à 4000 francs et un plafond à 8500 francs.

solidaritéS a élaboré un projet en ce sens, qui garantirait des retraites supérieures et infiniment plus sûres et solidaires qu’aujourd’hui, tout en conservant les avantages acquis pour les pensionné·e·s actuel·le·s, ou pour celles et ceux qui souhaiteraient le retrait d’une partie du capital accumulé dans le 2e pilier.