45 jours de prison pour avoir débouché les toilettes!

45 jours de prison pour avoir débouché les toilettes!

Les occupant-e-s du squat des Sauges
à Lausanne ont été condamnés pour violation
de domicile et dommages à la propriété pour avoir
débouché les toilettes. Trois habitant-e-s écopent
de 45 jours d’emprisonnement ferme et deux personnes de passage
devront payer 500 francs d’amende. Tous les inculpé-e-s
ont fait opposition. Cette condamnation d’une
sévérité inouïe en Suisse est en vogue avec
la tendance générale d’une société de
plus en plus répressive. Les SIL (Services industriels de
Lausanne) sont eux aussi mis en cause.

Le 2 mars 2006, un petit groupe de personnes a occupé une maison
au chemin des Sauges 9 à Lausanne. La maison était vide
depuis deux ans et vouée à la démolition. Les
squatteurs et squatteuses voulaient aménager le bâtiment
pour y habiter de manière communautaire et alternative et ce
jusqu’au début des travaux de démolition et de
construction. Une fois la maison occupée, ils et elles ont
tenté d’entamer des négociations avec les
propriétaires afin de régulariser leur situation au moyen
d’un contrat de confiance. Mais les propriétaires ne
l’ont pas entendu de cette oreille. Une plainte pénale
pour violation de domicile et dommages à la
propriété a rapidement été
déposée. Début mai, une descente de vingt à
trente policiers (police municipale et judiciaire) a identifié
cinq personnes sur place, trois habitant-e-s et deux personnes de
passage. S’ensuit une requête de mesures d’urgence
adressée par les propriétaires au Tribunal
d’Arrondissement demandant l’évacuation dans les 48
heures. Le juge a refusé ces mesures suite à une audience
le 1erjuin, statuant que la maison ne présentait pas de danger
immédiat pour les occupant-e-s et que l’occupation en
cours n’altérait aucunement les projets de vente de la
parcelle. Ainsi, le 30 juin la vente a effectivement eu lieu:
l’agence immobilière du Léman SA, qui a un projet
de démolition et de construction, devient propriétaire.
Fin août, le juge d’instruction Laurent Maye rend une
ordonnance de condamnation d’une sévérité
inouïe: 45 jours ferme pour les habitant-e-s et 500 francs
d’amende pour les autres, mettant les frais de justice à
la charge des condamné-e-s à hauteur de 348.50 francs
chacun-e. Notons au passage que le casier judiciaire de toutes les
inculpé-e-s était vierge et que le juge dit en avoir tenu
compte! Ces peines bafouent toute jurisprudence en la matière et
sont totalement disproportionnées, compte tenu du fait que
personne n’a été lésé. Rappelons que
la maison était vide et vouée à la
démolition. Les occupant-e-s sont condamnés pour
violation de domicile, alors qu’il ne s’agissait pas
d’un véritable domicile. De plus, il est absurde et
ridicule de prononcer une condamnation pour dommages à la
propriété dans une maison qui va être
démolie, surtout pour avoir débouché les
canalisations des toilettes, cimentées préalablement par
les propriétaires! Toutes les condamné-e-s ont fait
opposition et l’affaire sera débattue au Tribunal de
Police.

Les Services industriels également sur le banc des accusés

Mais l’affaire ne s’arrête pas là. Les
propriétaires ont également porté plaintes
pénale et civile contre… les SIL pour violation de
domicile et dommages et intérêts! En effet, lors de la
vente de la maison, la Léman SA, invoquant la présence de
squatteurs et squatteuses, n’aurait pas versé
l’intégralité du prix de vente, fixé
préalablement dans une promesse de vente. Maintenant, les
vendeurs réclament la perte sur le prix de vente de la parcelle
aux SIL. Toutefois, comme mentionné plus haut, le Tribunal
d’Arrondissement avait rendu une décision stipulant que la
présence d’occupant-e-s n’interférait
aucunement dans la vente. Il est donc étonnant que les anciens
propriétaires réclament les dommages et
intérêts aux SIL plutôt qu’à la
Léman SA. De plus, préférant que les lieux restent
insalubres et inhospitaliers, les propriétaires accusent les SIL
d’avoir fourni aux squatteurs et squatteuses
l’électricité et l’eau sans leur accord et
ont donc déposé une plainte pénale. Or, il
s’agit bien de denrées vitales que tout-e habitant-e de la
ville est en droit d’obtenir. Les SIL, service public ayant le
monopole de la distribution d’énergie, ne peuvent pas
refuser de fournir leurs prestations, faute de quoi la porte serait
grande ouverte aux abus. Que dirait-on si l’énergie
n’était plus fournie à un locataire ayant du retard
dans ses paiements ou, pire encore, à une sans-papiers?
(…)

Une véritable machine de répression et d’exclusion sociale

Au vu de cette situation, un débat public large sur la
problématique des squats et de la répression
s’impose. Force est de constater que depuis quelques
années, les condamnations pénales pour les affaires de
squat deviennent de plus en plus sévères. Un tel jugement
criminalise violemment les occupant-e-s et les fait passer pour des
méchants sauvages qui ne respectent rien. Quel est le sens
d’une telle répression juridique lorsque des personnes
occupent, aménagent et entretiennent des
propriétés inutilisées et laissées à
l’abandon? Bien qu’illégale, l’occupation
d’une maison vide est moralement légitime. (…) En
tant que propriétaire d’un bien fondamental comme une
maison, ne devrait-on pas avoir la responsabilité de le mettre
à disposition si on n’en fait pas usage soi-même? Au
contraire, la justice, par ces décisions de plus en plus
absurdes, encourage les propriétaires à la
spéculation en empêchant toute possibilité
d’utilisation de leurs maisons vides. On dérive en plein
capitalisme néolibéral! Quel rôle peut jouer la
municipalité de gauche dans une telle situation? Peut-elle se
cacher derrière la «séparation des pouvoirs»
ou a-t-elle les moyens d’être plus active dans son soutien
aux squats lausannois?
Depuis une vingtaine d’années, nous assistons à un
renforcement grandissant de la répression comme réponse
prioritaire aux problèmes sociaux. Les discours
sécuritaires à la mode depuis un certain nombre
d’années renforcent les sentiments de méfiance
vis-à-vis de toute personne en situation précaire ou
irrégulière. (…) Dérive du modèle
répressif, qui renforce durablement la précarité
en jetant en prison, en chargeant les casiers judiciaires, en
prononçant des interdictions de travail ou encore en refusant
les régularisations. Ainsi, il s’agit d’une
véritable machine d’exclusion sociale. Impensable il y a
vingt ans, un juge n’hésite plus aujourd’hui
à vouloir emprisonner des squatteurs et des squatteuses alors
que les prisons sont déjà surpeuplées.

Collectif des SAUGES


soirée de soutien le 28 octobre 06

à l’espace autogéré de Lausanne, rue César Roux 30. Au programme:

  • 20h repas
  • 21h concerts acoustiques  (à confirmer)
  • dès 22h concerts d’Entrée de secours (ska-punk) et de Wild Guy (punk-rock garage) et performances surprises
  • dès 02h00: disco avec DJ CSP