Mouvements homosexuels: Lestime réagit

Mouvements homosexuels: Lestime réagit

Choquées de ne pas avoir été consultées sur une éventuelle fusion des associations homosexuelles, les femmes de Lestime, sous la plume de Catherine Gaillard, présidente de l’association et membre de notre mouvement, répliquent avec cette lettre ouverte à l’article publié début janvier dans Le Temps.


Il est tout de même frappant de constater, en lisant l’article intitulé «la crise de Dialogai devrait favoriser la fusion des associations homosexuelles» paru dans Le Temps vendredi 10 janvier que, si on y parle des lesbiennes, on oublie toutefois de leur demander leur point de vue sur un sujet qui les concerne. Les représentant-e-s de 360° et de Dialogai sont à juste titre interrogé-e-s mais personne de la seule association lesbienne de Genève, c’est à dire Lestime, n’a été contacté.

Doublement discriminées

Pourtant, l’article mentionne nos subventions et leurs supposées attributions, notre récent déménagement, et digresse même sur notre avenir au sein d’une unique association LGBT.


C’est aller un peu vite en besogne que de soupeser à notre place la nécessité de ne faire plus qu’un avec nos estimés collègues et amis.


Bien sûr, nous entretenons des liens amicaux avec les autres associations et l’on peut parler à juste titre de rapprochement. Mais si nous avons de nombreux chevaux de bataille en commun (la reconnaissance des droits des homosexuel-le-s, le partenariat fédéral, les couples bi-nationaux, l’homoparentalité, etc..) et beaucoup à gagner dans cette collaboration, il est également vrai que les femmes ont un passé lourd de plus de deux mille ans de patriarcat qui ne va pas s’effacer d’un claquement de doigt. Nous sommes bien placées pour constater que les lesbiennes sont toujours doublement discriminées, en tant que femmes et en tant que lesbiennes, et qu’il est indispensable qu’elles puissent envisager leur vie à l’écart des préjugés et des modes de pensée dominants, afin de se donner les moyens de construire une parole qui leur sera propre.

Visibilité et lieu protégé

Si notre association revendique une plus grande visibilité pour les lesbiennes et présentera d’ailleurs quatre de ses membres sur la liste de l’Alliance de Gauche (solidaritéS/Indépendants) à l’élection du Conseil Municipal de la ville de Genève*, elle a aussi le devoir de proposer un lieu protégé pour toutes celles qui ne sont pas en mesure de vivre leur différence au grand jour. Combien sauraient se faire entendre et qui leur donnerait la parole si nous n’existions pas? Nous demander de nous fondre dans une association mixte sous prétexte d’économie représenterait un retour en arrière et reviendrait à minimiser voire à nier notre parole en privant nos luttes communes de sa particularité.


C’est parce que la parole des femmes est trop souvent occultée que nous avons besoin de nous retrouver entre nous afin de réfléchir à notre citoyenneté, à d’autres façons d’être au monde pour pouvoir y agir et contribuer à le changer. C’est aussi pour cela que Lestime fait partie du réseau des associations féminines du Canton de Genève et collabore directement avec le SPPE et la Marche Mondiale des Femmes.


C’est pour ces mêmes raisons que nous considérons que la variété de nos trois associations est une force, puisqu’elle nous permet de mieux connaître et de mieux représenter la diversité du monde homosexuel, qui est bien plus complexe qu’on pourrait le croire.


Les lesbiennes de Lestime ont des choses à dire et elles comptent bien le faire savoir.


Merci à l’avenir de ne pas nous claquer sur les doigts la porte du placard que nous avons eu tant de mal à ouvrir.


Pour le comité de Lestime
Catherine GAILLARD, présidente


* Il s’agit de Ariane Arlotti, Cécile Bonnet, Gisèle Thiévent et Catherine Gaillard