22 septembre 2011, « Durban III » à New York

22 septembre 2011, « Durban III » à New York



L’Allemagne, l’Australie,
l’Autriche, le Canada, l’Italie, la République
Tchèque demandent avec Israël, le boycott de la
Conférence mondiale sur le racisme, dite Durban III,
après s’être efforcés d’empêcher
Durban II (Genève, 2009). Pourquoi ?

Dès 1973, les Chicago boys ont soutenu Pinochet et sa dictature.
Leurs «réformes» se sont appliquées de
façon croissante contre les idéaux sociaux des Trente
Glorieuses. En 1990, Bush père avait mené sa
première guerre contre l’Irak.

    Samuel Huntington publiait en 1996 le «Clash
des civilisations»: «Les trois questions suivantes
résument les efforts de l’Occident sur la scène
internationale: 1) le maintien de sa supériorité
militaire par les politiques de non-prolifération et de
contre-prolifération des armes nucléaires, biologiques et
chimiques et des moyens de les utiliser ; 2) la promotion des valeurs
politiques et des institutions occidentales en pressant les autres
sociétés à respecter les droits humains tels
qu’ils sont conçus à l’Ouest et à
adopter la démocratie à l’occidentale ; 3) la
protection de l’intégrité culturelle, sociale et
ethnique des sociétés occidentales par la restriction du
nombre des non-occidentaux admis comme immigrants ou
réfugiés.»

Le 11 septembre ouvre une nouvelle période

Quelques semaines après les attentats terroristes du 11
septembre 2001, Bush faisait voter une loi liberticide, le Patriot Act,
et ouvrait le camp de concentration de Guantanamo. Il engageait la
« guerre contre le terrorisme » en
Afghanistan puis, le 20 mars 2003, l’invasion de l’Irak.

    Le 11 Septembre, les kamikazes, les attentats
criminels de Londres, Madrid et Bombay ont tracé la voie
à une horrible rumeur: la révolte des
« jeunes nés de l’immigration »
n’aurait rien à voir avec l’explosion d’une
colère qu’a couvée trois décennies de
discriminations mais serait du racisme anti-blanc.
    Le rouleau compresseur de l’islamophobie a
remodelé le paysage politique et imposé l’image de
migrant·e·s accusé·e·s
d’attiser la crise sociale, de mettre en danger
« nos » valeurs, de menacer
« notre » indépendance. Il a
gonflé un racisme identitaire et victimaire. Des
idéologies nationalistes et racistes nées au temps des
empires coloniaux connaissent une nouvelle jeunesse.

Et Durban, alors ?

« La lutte contre le
racisme a été au cœur de la mission des Nations
Unies depuis sa fondation à l’ombre des horreurs de la
seconde guerre mondiale. Les auteurs de la Charte des Nations Unies se
sont juré que jamais plus le monde ne serait témoin de
persécutions fondées sur la race. Ils ont
énoncé dans ce document historique que chacun, sans
distinction de couleur, de sexe, de langue ou de religion, peut se
prévaloir des droits de l’homme et des libertés
fondamentales. Que reste-t-il de cette vision cinquante ans plus tard?
[…] les rêves n’ont été
réalisés qu’à moitié. Tandis que la
technologie continue de rapprocher les populations du monde et que les
barrières politiques s’effondrent, la discrimination
raciale, la xénophobie et d’autres formes
d’intolérance continuent de ravager nos
sociétés 
» écrit Koffi Annan
à la veille de la Conférence mondiale contre le racisme
de Durban qui prit fin le 8 septembre 2001 avec d’inacceptables
manifestations d’antisémitisme et la terreur du 11
septembre.

Une manipulation cynique

Ces circonstances ont permis de cacher les résultats de la
conférence. Il faut être naïf pour ne pas le voir.
Leur manipulation a permis de taire les avancées de la
conférence concernant les méfaits du colonialisme, de la
traite négrière et de la discrimination des migrants et
des réfugiés.

    Fin septembre 2000,  Ariel Sharon avait investi
l’esplanade des Mosquées avec sa garde prétorienne
et orchestré la répression de la seconde Intifada.
Porté au printemps 2001 à la tête du gouvernement
israélien, il fit ériger le Mur de la honte soi-disant
nécessaire à la défense d’Israël. Les
politiques islamophobes européennes recourront à la
même rhétorique pour justifier la xénophobie et la
« guerre démocratique » en Orient
contre des peuples présentés comme des agresseurs aux
cultures meurtrières.

    Heureuse surprise cet antisémitisme, ces
crimes. Les Etats-Unis surendettés s’efforceront de se
maintenir à la force de leurs armes et d’autres puissances
en recul, avides de pétrole, justifieront leurs violences.

Dialectique diabolique

Les gouvernements israéliens invoquent la shoah et la
destruction des Juifs d’Europe pour justifier une politique
colonialiste qui provoque la colère du peuple palestinien, qui
la subit.

    Comment certains ne penseraient-ils être
antisémites lorsque le gouvernement israélien justifie
leur oppression en prétendant combattre
l’antisémitisme.

    Comment ces derniers comprendraient-ils Guido
Westerwelle, le ministre des Affaires Etrangères allemand,
lorsqu’il déclare « Le conflit
israélo-palestinien est l’un des nombreux conflits qui ont
lieu autour du globe, et ne devrait pas être distingué
dans un document sur le racisme » ou Dieter Graumann, le
président du Conseil central des Juifs d’Allemagne,
lorsqu’il demande à l’Allemagne de boycotter cette
conférence parce que cette dernière doit comprendre
qu’Israël continue à se battre pour l’existence.

    Ah, vivement que l’Allemagne contemporaine et
Israël poursuivent leur travail de mémoire. Qu’ils se
rappellent que l’Allemagne sous Guillaume II, en 1904, avait
voulu l’extermination des quelque 120 000
habitant·e·s de cette Afrique de l’Ouest
qu’elle s’efforçait de coloniser.

    Bien sûr, cette opinion
désorientée est manipulée par des politiciens
antisémites qui déclarent, comme Dieudonné,
« Les Juifs ? Un peuple qui a bradé
l’Holocauste, qui a vendu la souffrance et la mort, pour monter
un pays et gagner de l’argent » (2002), des
« négriers reconvertis dans la banque, le spectacle
et l’action terroriste » qui auraient
« fondé des empires et des fortunes sur la traite
des noirs et l’esclavage » (2004). 


Karl Grünberg

ACOR SOS Racisme