Caisse unique et sociale: la croisée des chemins

Caisse unique et sociale: la croisée des chemins

À moins d’un mois du vote populaire, les
enjeux autour de
l’initiative dégagent deux orientations
diamétralement opposées: soit, avec la caisse
unique et sociale, plus de transparence et de démocratie
avec un financement plus social, soit un coup
d’accélérateur aux mesures
néolibérales axées sur les
mécanismes de marché sous la houlette des
assureurs privés.

Alors que le libéralisme économique
enmatière de santé, selon les technocrates
néolibéraux de l’OCDE
euxmêmes, n’a fait qu’accroître
les inégalités face aux soins et n’a
aucune prise sur la hausse des coûts, les
résultats socialement désastreux du champion de
ce modèle, à savoir les USA, semblent encore
faire recette.

Cette foi dans la concurrence comme seule boussole en politique de
santé est l’unique argument
asséné par les opposants contre
l’initiative. Cette faiblesse s’étale
dans une propagande grossièrementmensongère
quimélange le «trou de la
sécu» française, les
déficits de l’AI,
l’étatisation de la médecine et un
nouvel impôt pour les classes moyennes. Pourtant, les faits
sont têtus: depuis l’introduction de la LAMal, la
concurrence entre les caisses ne fonctionne pas. Et pour cause: elle ne
porte que sur la chasse aux bons risques puisque les prestations
couvertes obligatoirement ainsi que les tarifs sont lesmêmes
pour tous les assureurs! D’où
l’idée d’aller vers une mise en
concurrence généralisée des
professionnels et des institutions pour réduire les
coûts, avec le système de la liberté de
choix par les assureurs de leurs prestataires
préférés. Soit le règne de
l’arbitraire le plus total, avec le risque évident
de privilégier les critères
d’économie sur la qualité des
prestations et de renforcer ainsi la médecine à
plusieurs vitesses.

Cette campagne «à mort» selon Couchepin,
s’inscrit dans la droite ligne des attaques contre les acquis
de notre sécurité sociale. L’objectif
principal est de réduire la charge des coûts
sociaux, soit par une réduction directe de l’offre
de soins (menaces sur les prestations avec l’initiative UDC,
pressions diverses sur les services publics pour réduire les
effectifs et les prestations publiques), soit par un transfert de
charge des plus riches vers les couches sociales moins
aisées (financement par la TVA, menace de suppression de
l’impôt fédéral direct). Dans
le même temps, la richesse se concentre toujours davantage
chez les plus riches et la pauvreté gangrène des
couches sociales toujours plus larges!

La Suisse reste le seul pays d’Europe avec des primes par tête qui fait porter directement sur les
ménages,classe moyenne comprise, une charge toujours plus lourde (plus de 65%!)
alors que l’ensemble des pays de l’OCDE
connaît un financement par les pouvoirs publics de 75% en
moyenne contre 17% dans notre pays! De plus, la part des pouvoirs
publics dans le financement de la santé en Suisse
n’a cessé de diminuer ces dernières
décennies.

Il faut reconnaître que les opposant-e-s ont
réussi à détourner
l’attention des enjeux réels de
l’initiative vers le faux problème d’une
prétendue charge accrue sur la classe moyenne: ce tour de
force a pu être réalisé à
coup de publicité de Comparis aux ordres de
santésuisse à l’aide
d’unemanipulation des chiffres, ce qui est habituel dans ce
genre de campagne. Où peut-on lire dans
l’initiative que la classe moyenne «passera
à la caisse»? La répartition de la
charge financière est évidemment un enjeu social
fondamental de l’initiative, mais seul le principe
d’un financement en fonction des capacités
économiques figure dans le texte. De nombreuses solutions
existent pour répartir le financement de telle
manière par exemple que le tiers le plus aisé
vienne en aide aux deux tiers plus défavorisés.
Ce n’est pas un problème de
mathématiques, mais un problème de choix et de
volonté politique!

Il faut donc mettre l’accent sur les seuls principes
fondamentaux de l’initiative et ne pas se laisser
égarer dans de fausses querelles de chiffres qui
n’ont pour seul but que de semer la confusion dans la
population afin de l’égarer dans ses choix.
Remettons donc les trois piliers de l’initiative au
cœur du débat avant qu’il ne soit trop
tard:

Oui à une seule caisse maladie contre le gaspillage des 87
caisses actuelles!

Oui à son fonctionnement démocratique contre
l’opacité actuelle qui profite aux seuls assureurs!

Oui à son financement social selon les capacités
économiques de chacune et de chacun contre
l’inacceptable injustice actuelle!

Gilles Godinat