Politique sécuritaire, pourquoi, comment?
Politique sécuritaire, pourquoi, comment?
Nous reproduisons le tract dappel de la Conférence / débat avec Laurent Mucchielli, organisé par nos camarades du Collectif pour une Alliance Socialiste (CAS) et par lOrganisation Socialiste Libertaire (OSL) à Lausanne, jeudi 15 mai, à 20h15, au Tir groupé, Pl. du Château 3 (ex-Ecole de Chimie)
Nous sommes aujourdhui confrontés à une déferlante de discours sécuritaires sous de multiples formes. Chez nous comme ailleurs, cette déferlante saccompagne de la mise en place dune politique de plus en plus répressive et anti-démocratique, dans de multiples domaines, de la vie quotidienne aux espaces militants.
Les jeunes, notamment issus des milieux défavorisés, sont de plus en plus désignés comme des fauteurs de troubles ou comme des délinquants potentiels. (supposés devoir passer des «incivilités» légères, genre tags, à des forfaits plus graves: violence à lécole, agressions, etc.). Les immigrés et les demandeurs dasile sont également une cible toute trouvée pour les fantasmes sécuritaires et jouent le rôle de bouc-émissaires dune crise sociale et économique dont les profiteurs (pour ne pas dire les organisateurs) demeurent finalement peu visibles. Et quand on est jeune et immigré-e, on cumule
Car en effet, lobsession sécuritaire et sa focalisation sur des groupes particuliers (jeunes, immigré-es, militant-es) empêchent de désigner les vraies violences, moins spectaculaires mais incomparablement plus dévastatrices, dun système capitaliste inégalitaire et oppressif (licenciements massifs, exploitation sans limite, destruction de la nature, etc.). Ce système nous est présenté comme inéluctable et ne pouvant pas être dépassé, même si ses «excès» sont parfois timidement dénoncés (critique de lultra-libéralisme).
Loccultation du caractère arbitraire du capitalisme et des ressorts de sa violence justifie une gestion de plus en plus policière des «problèmes» engendrés par les inégalités sociales que la phase ultra-libérale actuelle na fait quamplifier. Une telle gestion dissimule les véritables origines du sentiment dinsécurité en individualisant les questions: «Chacun-e est responsable de son sort», nous dit-on. Elle dissout les responsabilités structurelles des dominant-es, culpabilise les perdant-es et condamne à lavance toute transgression de la conformité comme violence potentielle ou réelle.
Le discours sécuritaire sattaque aussi résistances anticapitalistes organisées, puisquelles outrepassent les enclos où lon voudrait cantonner lexpression démocratique (vote, paix sociale, manifestations aux conditions imposées par lEtat). La violence crue du système se heurte en effet à une montée réelle des résistances de toutes sortes, notamment de la part des mouvements dits altermondialistes. Le Pouvoir, conforté par le climat répressif de laprès 11 septembre 2001, répond à ces luttes par une criminalisation et une répression accrues: de manière brutale comme à Gênes en 2001, préventive et menaçante (hystérie sécuritaire entourant le G8 dEvian, tri aux frontières, etc.), ou encore en visant des militant-es particuliers-ères pratiquant laction directe (des plus connus, comme José Bové, aux plus anonymes, en passant par les multiples procès contre des syndicalistes, des squatters, etc. usant de moyens de lutte légitimes tels blocages, piquets, occupations, etc.).
Lensemble de ces dispositifs répressifs concourent, dans leur diversité, à réduire les espaces démocratiques dune société. Il nest pas anodin de shabituer à la gestion policière des questions de société. On commence par ne pas réagir à la présence massive de flics déguisés en Rambo dans les rues, censés nous protéger contre linsécurité et les dealers. On finit par trouver normal un dispositif sécuritaire de milliers dhommes pour empêcher les manifestations altermondialistes de se déployer normalement.
La réponse sécuritaire et policière attise la peur, cette peur qui joue un rôle idéologique croissant dans une société capitaliste de plus en plus brutale et destructrice, de plus en plus incapable de faire accepter à ses sujets ses prétendus bienfaits.