Uber Eats est bien un employeur

Trois questions à Umberto Bandiera, secrétaire syndical d’UNIA à Genève qui s’occupe du secteur transports et logistique, à propos des développements concernant la société Uber Eats, implantée à Genève depuis fin 2018 et qui alimente… le précariat numérique.

Uber à la Gay Pride 2019 de New York

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Le modèle d’Uber Eats est particulièrement nocif. Quels sont les principaux problèmes qu’il pose? Le débat sur la numérisation de l’économie occupe une place toujours plus importante dans la discussion publique. Les mots-clés tels que « Industrie 4.0, Cyber-Physical Systems, Smart Factory, Big Data, économie de plateforme, Crowdworking et Clickworking sont sur toutes les lèvres. Ils se réfèrent à une série de développements simultanés et en partie liés qui exercent une forte influence à la fois sur le futur monde du travail et la société.

Ces changements sont pour le moment entièrement décidés par des grandes sociétés multinationales, en réduisant les travailleurs·euses à de simples spectateurs passifs. Uber Eats, comme les autres plateformes, viole notre législation sociale et du travail en considérant ses collaborateurs·trices comme des client·e·s plutôt que des employé·e·s, en pratiquant ainsi une sorte de travail au noir. En plus, d’autres violations sont à signaler au niveaux fiscal, administratif et pénal, cette société par exemple est toujours enregistrée à Amsterdam et pas à Genève.

Le Conseil d’État genevois a exigé récemment qu’UberEats se mettre en conformité avec loi dans les 30 jours. Concrètement ça signifie quoi? J’aimerai souligner qu’en premier lieu cela signifie que l’État a un rôle à jouer dans ce dossier et que n’est pas aux multinationales à décider les règles du jeu. Malheureusement je ne connais pas les détails de la décision administrative, mais pour avoir été auditionné par les autorités au long de ces derniers mois j’estime qu’il y a des passages importants à suivre ces prochaines semaines: la décision entrera en force nonobstant recours, cela signifie que si Uber Eats n’a pas respecté les dispositions son activité devra être suspendue immédiatement, étant illégale. La société devra d’abord s’inscrire au registre du commerce, demander une autorisation au Canton pour recruter du personnel et ensuite engager tous ces livreurs·euses comme des employé·e·s, avec un contrat de travail, un salaire minimum et des cotisations sociales.

D’un point de vue syndical, quelles sont les suites à donner? Le mouvement syndical doit s’investir de plus en plus contre cses nouvelles formes d’exploitation et de précarisation, les risques sont énormes pour les futures générations et pour la cohésion sociale du pays. Il y a encore un travail de fond à faire avec les collaborateurs·trices de ces sociétés pour expliquer les dangers et les risques de travailler sans aucun encadrement. Mais avecl’intervention des autorités, à Genève les livreurs·euses de ces plateformes pourront finalement exiger le respect de leurs droits et demander aux syndicats de les aider à obtenir justice, dans la rue et dans les Tribunaux…comme on dit, la lutte continue!