Égalité des droits LGBT+? Oui mais pas trop tout de même!

Depuis la dépénalisation de l’homosexualité dans les droits pénaux civil et militaire en 1992, quelques avancées pour des droits égaux ont été observées. Deux brefs retours historiques sur les unions homosexuelles et l’homophobie montrent que l’égalité des personnes LGBT+ reste en fait très différenciée.

Pride 2018, Paris. Photo: Jeanne Menjoulet

Pride 2018, Paris. Photo: Jeanne Menjoulet

Le partenariat: un dispositif à part

 L’ avancée la plus spectaculaire est l’adoption par les citoyen·ne·s du Partenariat enregistré (LPart) en 2005. Mais, extérieure au Code civil, la LPart sacralise, en fait, l’institution du mariage et la condition hétérosexuelle de la filiation. Plusieurs clauses distinguent le partenariat: pas de naturalisation facilitée, non-reconnaissance des partenariats / mariages conclus à l’étranger, exclusion de fiançailles ou d’échanges de consentement, non-obtention d’un nom de famille commun, dissolution facilitée. Consacrant le principe que le mariage serait la base de la famille, les interdictions de l’adoption et de la procréation médicalement assistée (PMA) sont explicites dans LPart. Alors que le devoir d’assistance et d’éducation de l’enfant·e du / de la partenaire y est stipulé, son adoption en cas de décès du parent naturel de l’autre sexe a été écartée au nom du bien-être de l’enfant.

Couple procréatif et ordre familial régis par le Code civil sont donc préservés. Certes, les actes entre même sexe sont stériles, mais les personnes ne le sont pas. L’émergence et la visibilité de familles homoparentales a nécessité un premier ajustement: l’adoption interne dès le 1er janvier 2018. En mars 2019, le Conseil fédéral a lancé une consultation sur le mariage pour tous à deux variantes: L’une est proche de la LPart, l’autre autorise la PMA et l’adoption conjointe. La majorité des partis s’est dit en faveur de la seconde et le Conseil fédéral présentera son projet au Parlement à l’horizon de juin 2021. Pas trop vite, l’égalité!

Mode de vie?

L’agenda politique a été bousculé par la correction d’une autre discrimination légale concernant l’homophobie. L’art. 8 de la Constitution suisse en vigueur depuis 2000 prévoit la non-discrimination pour son « mode de vie », une majorité du parlement refusant de se référer à l’orientation sexuelle, jugeant cela trop spécifique. Le mode de vie était alors supposé englober l’homosexualité, mais le TF a arrêté fin 2010 que ce dispositif ne protégeait pas des insultes homophobes.

Après le dépôt d’une initiative parlementaire par Mathias Reynard en 2013, le Parlement a récemment étendu l’article pénal anti-raciste à l’homophobie. Mais le critère de l’identité de genre a été écarté comme étant trop flou. Les binarités homo / hétéro et hommes / femmes sont ainsi non remises en question. Et l’UDF a réussi à faire aboutir son référendum au nom de la « liberté d’expression » soit la liberté d’insulter. Le prochain combat passera donc par les urnes!

Thierry Delessert

Personnes trans*… De quel(s) droit(s)?

La Suisse entretient un vide sur les droits, la protection et les modalités régissant les parcours de transition de personnes trans*. Ce manque de cadre provoque des disparités selon les cantons, juges, médecins ou encore caisses-maladie.

Malgré les avis de la Cour européenne et de sensibles évolutions grâce à des recours individuels victorieux pouvant faire jurisprudence, les parcours de transition restent longs, complexes, onéreux et oppressifs.

Contre les agressions et injures à l’encontre des personnes trans*, il n’y a pas de loi de protection. Le Parlement a étendu l’art. 261bis du code pénal, pour renforcer la protection contre les actes et propos haineux, à la seule orientation sexuelle… L’identité de genre a été écartée au prétexte que le concept était trop flou!

En termes de transition, en mai 2018, le Conseil fédéral a mis en consultation une révision du code civil relative au changement de sexe facilité à l’état civil. Ce changement qui, entre autre, n’impose plus de conditions juridiques ou médicales et permet la protection des liens de filiation et de parenté, est important.

Mais il reste de graves lacunes: maintien du système binaire, possibilité d’exiger un certificat médical ou attestation psychologique dans certains cas, obligation du consentement d’un·e représentant·e légal·e pour les mineurs… L’interdiction de la stérilisation forcée devra y être incluse.

En mai à Genève, l’Assemblée de l’OMS a revu la classification internationale des maladies. La transidentité / dysphorie de genre n’est plus classée comme trouble d’ordre mental, mais comme « conditions liées à la santé sexuelle »! L’OMS confond encore sexualité et genre… La lutte continue!

Marjo Blanchet