Les deux Rosa du socialisme et du féminisme helvétiques

À l’approche de la grève féministe du 14 juin, rappelons l’action de deux pionnières socialistes/communistes et féministes des premières décennies du XXe siècle: Rosa Bloch-Bollag et Rosa Schlain-Grimm.

Rosa Bloch-Bollag
(1880-1922)

D e 1909 à 1920, Rosa Bloch fut rédactrice à Die Vorkämpferin, revue de l’Union syndicale suisse pour les femmes travailleuses. D’abord proche de l’anarchisme, elle adhère au Parti socialiste suisse (PSS) et y défend l’égalité entre femmes et hommes, notamment le droit de vote des femmes: ce fut l’une des revendications de l’appel à la grève générale (novembre 1918) lancé par le Comité d’action d’Olten dont elle fut brièvement membre. À cette époque, elle préside la Commission féminine du PSS et anime en juin 1918 à Zurich une manifestation de femmes contre les carences du ravitaillement.

Défendant l’adhésion du PSS à l’Internationale communiste, Rosa Bloch participe à la fondation du Parti communiste (PCS) en 1921. Elle ne survit toutefois pas à une opération, que son mari Siegfried Bloch suspecta d’être un meurtre camouflé par une erreur médicale.

Rosa Schlain-Grimm
(1875-1955)

Née en 1875 à Odessa, Rosa Schlain quitte la Russie tsariste pour étudier en Suisse – comme plusieurs de ses contemporaines, telle Rosa Luxemburg. Rosa Schlain participe en 1919 à la fondation du Basler Vorwärts, dont elle dirige le supplément littéraire. Elle quitte en 1920 le PSS pour participer à la fondation du PCS, dont elle fut membre du comité central. L’une de ses activités militantes est la lutte pour le droit à l’avortement. Dans ses articles, elle met en évidence la spécificité de la situation des femmes, qui sont doublement opprimées: en tant que prolétaire et en tant qu’épouse-mère devant s’occuper seule, à côté de leur travail, des tâches ménagères. Elle voyait dans le mariage bourgeois une « prostitution protégée par l’État ».

Marginalisée au sein du PCS stalinisé, Rosa Schlain séjourne en URSS en 1930–1931 et y constate la réalité du stalinisme, entre la liquidation des opposant·e·s, la terreur et la famine. En 1943, après la dissolution du Komintern (internationale communiste stalinienne), elle quitte le PCS et réintègre le PSS.

Hans-Peter Renk

À lire

▸ Pierre Jeanneret, « Rosa Grimm (1875-1955) », Dix grandes figures du socialisme suisse. N° 2. Lausanne, Parti socialiste vaudois, 1992, pp. 44-48.

▸ Anna Spillmann, « Rosa Bloch, militante à facettes multiples », Gauchebdo, N° 46, 16.11.2018, p. 6. La grève générale de 1918:
histoire d’un événement fondateur du XXe siècle en Suisse
, Lausanne, SSP-VPOD, 2018.