«La santé à un prix abordable», OUI mais...

«La santé à un prix abordable», OUI mais…

Il nous faut revenir sur l’initiative du PSS/USS «la santé à un prix abordable» que nous avons déjà présentée précédement1, car elle est un des enjeux importants de la votation du 18 mai. Elle vise à introduire dans la Constitution fédérale un mode de financement principalement en fonction du revenu et de la fortune, et de la TVA. Dès le lancement de la campagne nationale, les opposants ont immédiatement ciblé leurs attaques sur le financement par la TVA.


Il faut savoir que dans la phase de préparation de cette initiative, un courant au sein du PSS souhaitait un financement intégral par la TVA. Un compromis a pu être trouvé avec l’aile gauche du PSS pour diminuer la part financée par cette taxe. Le comité d’initiative a fait savoir lors de sa première conférence de presse qu’il lancerait un référendum si le taux de TVA dépassait 1,5%.


Pour notre part, nous persistons à trouver que la TVA, dans son principe, est un impôt anti-social qui taxe de façon identique le consommateur, quelque soit son revenu, même si la modulation du taux en fonction du type de biens de consommation corrige quelque peu cette taxe. Mais dans le contexte actuel, même la TVA est socialement plus juste que le financement par tête.


La Suisse est le dernier pays d’Europe à connaître des primes d’assurance-maladie par tête, à savoir identiques quel que soit le revenu. Cette injustice sociale flagrante révèle une logique selon laquelle les soins sont des biens de consommation ordinaires comme une voiture ou un frigo. Les forces conservatrices de ce pays veulent maintenir ce système anti-social, au profit de cette seule logique marchande, panacée du néo-libéralisme. L’initiative, au contraire, introduit dans la constitution fédérale un financement plus équitable, afin que les gens aisés et fortunés soient solidaires du reste de la population face à la maladie.

Une baisse des primes favorable à la grande majorité de la population

Le nouveau mode de financement proposé permet pour 80% des ménages une réduction des primes: en effet, avec une répartition de 60% en fonction des revenus, un taux moyen de 4,3% (5,6% à Genève) permet d’assurer plus de 8 milliards dans l’assurance de base. Une augmentation de la TVA de 1,5 point apporte plus de 3,5 milliards, soit le 25%, et le taux de 0,3% sur les fortunes amène les 15% restant pour atteindre les 14 milliards nécessaires aujourd’hui. Les revenus fiscaux en dessous de 20000frs sont exonérés et ne payent que la TVA, ce qui représente pour ce type de revenu moins de 17 Frs par mois! Il faut savoir que la droite veut introduire une participation de base de 2% pour tout le monde. De plus, la révision de la LAMal, balayée en 2002, et remise sur le tapis du Conseil des Etats, est actuellement soumise au régime des forces néo-conservatrices, les quelles proposent, entre autre, une hausse des franchises!

Une prime par revenu fiscal: les familles en seront les plus grandes bénéficiaires

Avec le nouveau système, les enfants jusqu’à leur majorité ne payent pas de primes. Seul le revenu fiscal familial est déterminant pour couvrir le risque de maladie pour toute la famille avec une prime unique par revenu fiscal. Cela mettra fin à une injustice insupportable pour de nombreuses familles qui voient aujourd’hui jusqu’à 15%, voir jusqu’au quart de leur revenu affecté aux primes d’assurance pour l’ensemble du groupe familial. Seuls les très rares enfants disposant d’une très grande fortune personnelle seront mis à contribution. De toute façon, les fortunes en dessous de 1 million sont également exonérées pour ne pas pénaliser les gens qui possèdent leur logement ou une petite entreprise.

Une garantie contre la médecine à deux vitesses

L’initiative permet également de lutter contre le système injuste des franchises élevées qui favorise une médecine à deux vitesse: seuls les ménages aisés peuvent se payer tous les soins nécessaires, et parfois plus, alors que les ménages moins aisés hésiteront davantage à consulter, pour diminuer leur frais d’assurance, au risque de complications ou de péjoration de leur santé, comme on le voit aujourd’hui aux USA.

La santé n’est pas une marchandise

L’initiative rompt avec l’idée que les soins et la santé sont de la seule responsabilité individuelle. Nous savons que la plus grande partie des problèmes de santé ne dépendent pas de notre seul comportement mais sont la conséquence de vulnérabilité personnelle ou familiale que nous n’avons pas choisie ou sont liées à un environnement défavorable. Or la doctrine néolibérale et ses adeptes veulent nous rendre seuls responsables de notre «capital santé», cherchant à introduire les seuls critères d’économie, de rentabilité et de logique d’entreprise dans le secteur santé. L’initiative, au contraire, introduit une logique solidaire.

La Confédération pourra contrôler les prix

Cette compétence nouvelle accordée par l’initiative donne à la Confédération la possibilité d’intervenir pour limiter le coût des prestations, en déterminant un plafond, y compris pour les médicaments. Ces dernières années, les coûts des médicaments ont en effet progressé beaucoup plus vite que d’autres secteurs de soins. Ceci favorisera une meilleure maîtrise des coûts.


Pour intervenir sur le volume des prestations, l’initiative prévoit que La Confédération réglemente la médecine de pointe et coordonne les planifications sanitaires cantonales, en veillant à un contrôle efficace de la qualité des prestations. Des mesures complémentaires peuvent être prises lorsque le volume de celles-ci est excessif, avec des pouvoirs étendus aux cantons. Cela signifie clairement que le pilotage du système sanitaire par les pouvoirs publics est ancré dans la Constitution, alors que la majorité actuelle aux Chambres fédérales veut confier la direction aux seuls assureurs maladie, via leur organisation faîtière «santésuisse».

La droite «met le paquet» contre l’initiative

Le conseiller fédéral Pascal Couchepin mène la bataille avec des arguments fallacieux et erronés, en prétendant que l’initiative va entraîner une explosion des coûts et surtout une hausse de TVA insupportable pour toute la population! Il ose même affirmer que cela va représenter une double imposition pour tout le monde, alors que les parts de financement sont clairement distinguées dans l’initiative. Enfin, il faudra entreprendre des démarches politiques et juridiques contre la faîtière «santésuisse»qui s’est lancée dans la campagne contre cette initiative avec 2,5 millions «piqués» sur nos cotisations. Plusieurs assurances ont déjà adressé à leurs assurés un message contre cette initiative. Nous devons dénoncer cette campagne scandaleuse des assureurs maladie qui non seulement utilisent l’argent des assurés mais affirment des contre-vérités visant à désinformer ceux-ci.


Giles GODINAT

  1. Voir solidaritéS nos 92, 95 et 100 de l’ancienne formule, ainsi que 19 et 22 de la nouvelle formule.