Armée XXI: halte à la dérive sécuritaire

Armée XXI: halte à la dérive sécuritaire

Attaquée par un référendum de l’extrême droite, la révision de la loi sur l’armée instaurant la réforme Armée XXI sera soumise au peuple le 18 mai. Les principaux axes de la loi sont une réforme du service et de l’organisation militaires et le renforcement des engagements subsidiaires, telles que les missions de paix à l’étranger et les missions de maintien de l’ordre intérieur. A Genève, solidaritéS a décidé de recommander le NON.


La durée du service militaire sera réduite de 300 à 280 jours, mais sera concentrée entre l’âge de 19 et 30 ans, 34 pour les retardataires (actuellement 42 ans). Le rythme normal sera d’un cours de répétition chaque année, ce qui fait que les services d’instruction se termineront normalement à 26 ans, suivis de 4 ans dans la réserve. Il n’y aura plus que 140000 soldats et 80000 réservistes, au lieu de 350000 hommes. Mais avec l’augmentation de la durée des écoles de recrue (18 ou 21 semaines au lieu de 15), ce qui semble un allègement des obligations militaires risque fort de s’avérer une contrainte supplémentaire, vu que les reports de service seront plus difficiles.


Parallèlement, 15% des conscrits pourront effectuer leur service d’une seule traite, en 300 jours (service long). Leur engagement pourra s’effectuer à l’étranger ou pour des engagements de sécurité intérieure. Autre pas vers une professionnalisation, l’armée pourra engager des militaires contractuels pour une durée déterminée.

Des tâches subsidiaires… qui deviennent prioritaires

Les tâches dites subsidiaires de l’armée seront renforcées, de l’aide en cas de catastrophe aux tâches de sécurité intérieure en passant par la surveillance des frontières. Les militaires en service long seront désormais disponibles en tout temps pour être engagés. Le recours à l’armée deviendra de plus en plus fréquent, avec des risques accrus de bavures, car la formation ne sera pas suffisante dans le temps imparti. Outre les engagements armés… pour la «promotion de la paix». acceptés en juin 2001, des engagements armés en cas de catastrophe naturelle ou humanitaire ou encore pour protéger et rapatrier des Suisses à l’étranger seront désormais possibles.


La dérive sécuritaire sera aussi renforcée avec le renforcement du rôle du renseignement militaire, qui pourra communiquer des données sur des personnes aux autorités civiles, tant pour des questions pénales que pour la sécurité intérieure. L’Etat fouineur revient par cette porte!


Dans les faits, la défense du pays, contre une menace qu’on a du mal à définir, deviendra largement secondaire. La neutralité reste élastique, puisque la Suisse doit développer son aptitude à coopérer avec d’autres Etats, dans le cadre de l’achat d’armes, de l’instruction (le Partenariat pour la paix de l’OTAN, auquel la Suisse a adhéré en 1996) et de la participation à des opérations de promotion de la paix (Swisscoy au Kosovo depuis 1999, avec un armement léger depuis l’automne 2002). Peu importe que la plupart des Etats avec qui la Suisse collabore soient membres de l’OTAN! La Suisse ne doit pas fournir d’assistance militaire ni d’armes à des belligérants. Par contre, en cas d’attaque de la Suisse, celle-ci sera alors libre de s’allier à d’autres Etats.


La position de solidaritéS est donc conforme à la ligne antimilitariste du mouvement. Cette loi renforce le rôle de l’armée et son rôle envahissant et répressif que nous avons toujours dénoncé. Cela ne veut pas dire que nous acceptons la loi actuelle, où la plupart des dérives que nous dénonçons dans cet article existent déjà. Il s’agit avant tout d’une question de cohérence politique. Notre lutte pour un monde plus juste, plus égalitaire et moins violent passe par un NON dans l’urne le 18 mai!


Sébastien L’HAIRE