Un vote réactionnaire à Saint-Gall

La loi islamophobe proscrivant la dissimulation du visage et ciblant la burqa vient d’être acceptée dans les urnes à saint Gall. Un mauvais signal

Le co-président des Jeunes Verts annonçait une campagne « animée, provocatrice et victorieuse ». Mais la victoire n’a pas été au rendez-vous ce 23 septembre. Si la loi avait été votée de justesse au parlement en 2017, par 57 voix contre 55, c’est aux deux-tiers qu’elle a été approuvée dans les urnes, malgré l’opposition verte, PS et PLR, et celle du Conseil d’État saint-gallois.

L’UDC et le PDC l’ont emporté auprès d’un électorat (mobilisé à 36%) en faisant voter une loi qui dit: « Toute personne qui se rend non reconnaissable en dissimulant son visage dans l’espace public et met ainsi en danger la sécurité publique ou la paix sociale et religieuse sera punie d’une amende ».

Une victoire sans effets de prime abord: le nombre de fem-mes en burqa à Saint-Gall est insignifiant. Mais c’est un succès réactionnaire symbolique fort. Un succès affirmant le primat de prétendues « valeurs nationales » (en Suisse on se regarde dans les yeux sans dissimulation, disait la brochure de vote) contre le droit fondamental à pratiquer un attachement à telle religion, contre le droit des femmes (ou des hommes d’ailleurs) à se vêtir comme elles veulent.

Ceci au mépris de la Constitution fédérale (art. 36) qui dit que la restriction d’un droit fondamental doit être « justifiée par un intérêt public ou par la protection d’un droit fondamental d’autrui ». Or il n’y a pas de droit fondamental à plonger son regard dans les yeux d’autrui, voire à pouvoir « reconnaître » sa voisine (ou son voisin). Aucun intérêt public n’est bafoué dans les cantons où la liberté en la matière existe toujours.

Saint-Gall rejoint le Tessin où une loi obscurantiste analogue date de 2013. Le résultat sorti des urnes le 23 septembre dernier montre, s’il en était besoin, la nécessité de se mobiliser contre l’initiative fédérale du même tonneau et son « contre-projet » qui laisse toute liberté aux cantons de poursuivre ces pratiques liberticides et qui passera au vote l’an prochain.

Pierre Vanek