Football

Football : La Russie, un paradis pour la FIFA

Le mondial est une honte du fait du pays qui l’organise. Mais il l’est aussi du fait des pratiques de la FIFA, obsédée par les recettes financières de l’événement.

La Coupe du monde de football est un événement médiatique qui doit permettre de dénoncer les pratiques du gouvernement russe, qui en profite pour sa répression (voir solidaritéS nº 329). Mais il ne faut pas oublier que la Russie représente tout ce que la FIFA préfère: un pays autoritaire avec qui il est facile de traiter et où il n’y a pas à se soucier des conflits sociaux (à l’inverse de ce qui s’est passé au Brésil en 2014). Mieux encore, le gouvernement russe apparait médiatiquement tellement corrompu et répressif qu’on ne parle plus des pratiques habituelles de la FIFA, pourtant toujours aussi sordides.

La Fédération internationale de football association baigne dans la corruption, notamment concernant l’attribution de l’organisation de cette Coupe du monde. Elle représente surtout l’institution néolibérale rêvée. Depuis son siège en Suisse, elle génère des profits considérables (des revenus record de 6,1 milliards de dollars sont annoncés pour 2018) tout en se servant dans les financements publics à travers les fédérations nationales. Elle impose des zones réservées au commerce de ses entreprises partenaires, faisant fructifier ses contrats d’exclusivité avec des multinationales.

Elle stipule comme règle qu’aucune force politique ne doit intervenir dans l’espace du football, alors que le choix d’un pays pour organiser un mondial revêt une importance politique évidente. Poutine entend bien en profiter pour redorer l’image de son pays à travers la télévision et l’accueil des quelques 600 000 touristes étrangers. Pour la FIFA, seule doit régner l’économie cachée sous les airs du spectacle, lui-même rentabilisé.

C’est bien la puissance de ce spectacle populaire mondial qui rend inaudibles les rares appels aux boycotts et les critiques sans conséquences. Ainsi seules l’Angleterre et l’Islande ont décidé de boycotter diplomatiquement l’événement. Que le football soit devenu un foot-business où l’argent impose sa loi des salaires mirobolants jusqu’au championnat semi-amateur ; que la FIFA soit une entreprise à la recherche de recettes financières, personne n’en doute. Pourtant combien serons-nous à regarder des matchs? Deux milliards. Le mondial constitue à ce titre un exemple fort de la capacité de séduction et de récupération du capitalisme.

Pierre Raboud


Panini veut le bien de vos enfants

La Coupe du monde ne se résume pas à des milliards de francs de droits de diffusion, à un bond de 20 % des ventes de bières dans les supermarchés, ou à une recrudescence des violences contre les femmes. Elle offre aussi l’occasion à la société Panini d’un grand détournement d’argent de poche grâce à la vente de vignettes autocollantes à l’effigie des participants.

Paul Harper, professeur de mathématiques à l’université de Cardiff, a sorti sa calculette. Verdict: pour réunir les 682 vignettes de l’album de la Coupe du monde 2018, et en tenant compte des doublons d’un paquet à l’autre, prévoyez un peu plus de 1000 francs.

Heureusement, Panini ne se contente pas d’initier nos enfants aux joies de la consommation obsessionnelle. Celles et ceux qui, grâce à leur sens aigu des affaires, sauront mener d’âpres négociations dans les cours de récré, réduiront leur budget de moitié, voire des deux tiers. Ouf. MB


FIFA: une histoire de cohabitation avec les dictatures

1934, Italie. Le régime de Mussolini fera de cette coupe du monde un «triomphe fasciste»: l’Italie remporte une compétition marquée par une violence récurrente et les saluts fascistes des Italiens et des Allemands à chaque coup d’envoi.

1978, Argentine. Le stade Monumental se trouve à proximité des sous-sols où ont lieu assassinats et tortures. L’Argentine et le Pérou concluent un accord sordide: en échange de l’assassinat de 13 opposants péruviens par le régime du général Videla, le Pérou laisse l’Argentine gagner largement lors d’une rencontre décisive.

2010, Afrique du Sud. C’est cette fois la FIFA qui impose des mesures drastiques: nettoyage social et monopole pour les marques partenaires dans les zones proches des stades.

2018, Qatar. Non-respect des droits humains, des milliers d’ouvriers morts sur les chantiers, des conséquences écologiques désastreuses avec notamment des stades climatisés: aucun de ces arguments ne touche la FIFA, obnubilée par les recettes financières et les droits télévisuels. PR


À l’appel de solidaritéS et avec le soutien d’une dizaine de collectifs, un rassemblement a eu lieu devant la fan zone de Lausanne, durant le match d’ouverture. Lors de son intervention, notre camarade ukrainienne Hanna Perekhoda a rappelé que: «En tant que militant·e·s internationalistes, nous ne trouvons pas normal qu’un pays qui bombarde des populations civiles en Ukraine et en Syrie, qui emprisonne et torture celles et ceux qui s’expriment contre sa politique, soit choisi pour organiser la Coupe du monde de football. »