Perspectives après la chute du gouvernement État espagnol

Après la motion de censure contre le gouvernement de Mariano Rajoy, solidaritéS publie les éclairages de notre camarade Jaime Pastor (Anticapitalistas).


Pedro Sánchez et Mariano Rajoy

Pourquoi le Partido socialista obrero español (PSOE) a-t-il déposé une motion de censure contre le gouvernement de Mariano Rajoy?

Le PSOE l’a déposée vu l’énorme impact de la sentence de la Cour suprême sur le réseau de corruption Gürtel le 24 mai. Ce jugement a confirmé un point évident depuis longtemps: l’existence d’un réseau de corruption institutionnelle entre les grands entrepreneurs et le Partido popular (PP) grâce à des manipulations des contrats publics nationaux, régionaux et locaux. Rajoy, témoin au procès, était directement impliqué.

Dès lors, le dirigeant du PSOE, Pedro Sánchez, a déposé cette motion, en sachant qu’il serait difficile de la faire aboutir vu le rapport de force au Parlement, mais qu’il pourrait compter sur l’appui de Podemos et d’autres forces politiques régionales. La crédibilité de Pedro Sánchez s’était affaiblie durant l’année écoulée, notamment en raison de son appui au PP, par exemple lors de la crise catalane. Cette initiative lui a servi pour retrouver au sein de l’opposition un rôle central.

Grâce à la décision du Parti nationaliste basque (PNV) d’appuyer cette motion, en raison de l’engagement de ne pas remettre en cause l’accord budgétaire entre le PNV et le PP, et de ne pas convoquer d’élections générales à court terme, la motion de censure l’a emporté.

Quelles seront les caractéristiques du prochain gouvernement?

Le nouveau gouvernement aura une marge de manœuvre limitée sur les principaux problèmes du régime (socio-économiques et territoriaux). L’acceptation de budgets austéritaires, auxquels le PSOE a présenté un amendement, rend difficile de penser que le «sauvetage social» promis dépasse le cadre de mesures à court terme, d’autant plus que le pays se trouve sous la surveillance de la Commission européenne.

Les accusations de pactiser avec les partis indépendantistes lancées par le PP, Ciudadanos et la majorité des médias, ainsi que les pressions au sein du PSOE lui-même, ne permettront pas au gouvernement d’aller plus loin qu’une meilleure disposition au «dialogue» et un moindre recours à la judiciarisation du conflit.

Il pourra déroger à des articles de loi restreignant la liberté d’expression et de manifestation ou d’accès universel à la santé, ainsi que prendre des mesures en faveur de l’égalité de genre et de l’autonomie des médias de communication publics.

Quelle attitude devrait avoir Podemos?

Je pese que Podemos devrait rester autonome par rapport au gouvernement d’un parti qui reste un pilier fondamental du régime, dont il respecte les consensus de base. Au lieu d’entrer dans ce gouvernement, Podemos devrait devenir la principale force capable d’affronter la vieille et la nouvelle droite et de chercher à construire, avec des mouvements comme les féministes et les retraité·e·s, un bloc alternatif dépassant les limites que ce nouveau gouvernement respectera.

Propos recueillis par Juan Tortosa
Traduction de l’espagnol: Hans-Peter Renk