Pour un 1er mai de lutte précurseur de résistances futures

Cette année, le monde du travail sera dans la rue pour affirmer son aspiration à des mesures de justice sociale, d’égalité et d’arrêt de la destruction de la planète. La journée internationale des travailleuses et des travailleurs s’inscrit dans un contexte de tensions sociales particulièrement marquées. Partout, les gouvernements favorisent la recrudescence du racisme et la division des classes populaires. Plus répressifs que jamais, mais aussi très instables, rien n’exclut que l’un ou l’autre ne soit renversé. Bref, l’heure est à la mobilisation vigilante. Les mesures d’austérité, les politiques sécuritaires, la dégradation des conditions de vie des plus faibles doivent cesser.

En Suisse, le Conseil fédéral se sent les mains libres pour poursuivre ses réformes anti-sociales, malgré un excédent budgétaire de 9,1 milliards en 2017. Pire encore, il prévoit une baisse massive de l’imposition du bénéfice des entreprises à travers PF 17 – nouvelle mouture copiée-collée de la RIE 3, pourtant rejetée en votation populaire l’année passée. Les retraites sont au cœur de l’offensive du Conseil fédéral qui confirme sa volonté d’augmenter l’âge de la retraite pour toutes et tous, malgré le rejet en votation populaire du plan Prévoyance vieillesse 2020.

Les caisses de pension, s’appuyant sur la législation fédérale, n’arrêtent pas de baisser les rentes via la baisse du taux de conversion, que ce soit dans le public ou le privé. Sous prétexte d’une compétitivité accrue sont préconisés l’allongement de la durée du temps de travail à travers un affaiblissement des déjà faibles protections prévues par la loi et la flexibilisation des horaires dans les négociations conventionnelles.

Enfin, les patrons cherchent à affaiblir la protection contre les licenciements, à l’instar de ce qui se passe aux CFF, et la durée des vacances payées est remise en cause. Bref, dans le public comme dans le privé, les conditions de vie et de travail des salarié·e·s sont attaquées de toutes parts.

Dans ce dispositif délétère, les femmes payent un lourd tribut. Le capitalisme actuel, est-il besoin de le rappeler, est fondé sur une «féminisation» accrue du marché du travail, impliquant l’augmentation du nombre de bas salaires ; cette précarisation accrue du marché du travail touche certes tous les salarié·e·s, mais elle a un caractère bien plus marqué pour les femmes. En Suisse, comme ailleurs dans le monde, elles forment la majorité des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté ; les mères célibataires sont particulièrement touchées par le manque et le coût des infrastructures sociales de la petite enfance et l’absence d’une politique qui pourrait leur venir en aide. Le parcours professionnel des femmes est plus discontinu et elles sont fortement discriminées sur le marché de l’emploi (temps partiel imposé, décrochage professionnel et discrimination salariale directe et indirecte) ce qui conduit à une reproduction de l’inégalité durant la vieillesse (atomisation, isolement, pauvreté).

Last but not least, l’écart salarial entre les femmes et les hommes se situe toujours aux alentours de 20 %. Et l’Assemblée fédérale refuse une fois de plus de mettre en œuvre des mesures pour atteindre concrètement l’égalité salariale entre hommes et femmes. Le Conseil des Etats a ainsi rejeté un projet de modification de la loi sur l’égalité, pourtant peu contraignant et à la portée très limitée.

La revendication pour l’égalité salariale est plus que jamais nécessaire mais elle ne peut suffire à elle seule. Les femmes les plus précaires sont soumises aux charges de la double journée, travaillant sans rémunération afin d’assumer, dans une large majorité, les tâches ménagères au sein de leur foyer. Les femmes, en particulier les femmes racialisées et/ou migrantes, sont en outre surreprésentées dans les branches à bas salaire telles que les soins à la personne, tâches pour lesquelles elles auraient, selon le discours patriarcal, des dispositions innées. Invisibilisées dans la sphère privée du travail à domicile, les employées engagées à titre privé dans le travail de care sont précarisées et soumises à des conditions de travail extrêmement dures et parfois violentes, sans issue de secours.

Le congrès des femmes de l’USS appelle à une manifestation le 22 septembre et à l’organisation d’une grève des femmes en 2019, se situant au sens large dans les mouvements de grève des femmes qui se sont formés dans plusieurs pays il y a deux ans déjà à l’occasion du 8 mars en réponse aux violences sociales, racistes, légales, politiques, morales et verbales.

Opprimées parmi les opprimés, les femmes ne se résignent plus à subir en silence. Dans un contexte général de recul, elles apparaissent à l’offensive pour changer radicalement l’ordre des choses. Leurs mobilisations renforcent l’ensemble des salarié·e·s dans la lutte contre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, de classe, de genre et de race. Comme l’a démontré la grève de millions de femmes dans l’Etat espagnol, le féminisme radical – qui ne peut qu’être anticapitaliste – est aujourd’hui capable de dessiner un nouvel horizon à nos luttes.

Rédaction