Bayer-Monsanto

Bayer-Monsanto : Une fusion pour prendre soin de vous

La Commission européenne s’apprête à autoriser la fusion entre Bayer et Monsanto. L’objectif: privatiser nos vies et en tirer de juteux profits.


Nizomi

Le mariage imminent entre Bayer, géant pharmaceutique allemand, et la firme multinationale de l’agro-industrie Monsanto s’inscrit dans un processus de concentration du secteur agro-industriel entre les mains d’une poignée de multinationales. Après l’unification de ChemChina et Syngenta, ainsi que celle de Dow et Dupont, la création du conglomérat Bayer-Monsanto devrait permettre à ce dernier de s’adjuger un quart du marché mondial des pesticides et près d’un tiers de celui des semences, selon la Commission européenne.

Depuis des années, les entreprises de l’agro-industrie, Monsanto en tête, rachètent les semenciers, s’assurant un accès exclusif au marché et un contrôle des prix des semences. Cela crée un rapport de dépendance des petits paysans et paysannes vis-à-vis de ces firmes et les pousse à s’endetter toujours plus. Le lobbyisme intense de ces entreprises leur assure la mise en place d’une législation garantissant la pérennité de ce système.

Les fusions récentes marquent toutefois un tournant dans le secteur. L’union de Bayer et Monsanto incarne la rencontre de deux secteurs, la pharmacie et l’agro-­industrie, et non simplement la convergence de deux entreprises aux activités similaires.

La preuve: Bayer a revendu une part importante de ses filières dans l’agrobusiness, entre autres à BASF et Syngenta. Si le géant allemand abandonne cette branche, c’est bien que l’enjeu de l’opération est le renforcement d’une position dominante grâce à la complémentarité entre les domaines pharmaceutique et agro-industriel.

Empoisonner puis soigner

Dans le couple Monsanto-Bayer, l’un privatise la vie à son premier degré par la propriété lucrative sur les semences et la domination de leur marché, et l’autre privatise la vie à son dernier degré en étant propriétaire lucratif des traitements médicaux. Chacun réalise, par sa taille et sa mainmise sur des domaines essentiels, une gigantesque prise d’otages, bafouant les impératifs sociaux et environnementaux réels.

Le modèle agro-industriel de Monsanto produit des ravages sur la santé essentiellement à deux niveaux: par la pollution des eaux et des sols détruits aux pesticides et gavés d’intrants, et dans l’alimentation.

Une aubaine pour Bayer, qui pourra dégager de juteux profits sur les traitements de graves maladies liées aux perturbateurs endocriniens et autres substances cancérigènes. Quelle chance aussi que les aliments OGM soient moins riches et causent des maladies: Bayer vendra compléments alimentaires et médicaments.

En somme, Bayer s’assure de traiter en aval les ravages que provoque Monsanto en amont, ce qui garantit à l’un comme à l’autre des profits substantiels. Cette fusion illustre un système qui se renforce en alimentant les causes pour mieux se nourrir des conséquences.

A l’heure où l’UE et les autorités suisses autorisent toujours (!) l’utilisation du glyphosate, les seules préoccupations des pouvoirs publics vis-à-vis de cette fusion portent sur la mise en péril du sacro-saint principe de libre concurrence. Face à l’irresponsabilité et au cynisme, il est nécessaire de manifester notre colère dans la rue.

En tant que mouvement anticapitaliste et écosocialiste, solidaritéS:

  • dénonce cette fusion et la complicité des pouvoirs, européens d’une part, qui laissent Bayer racheter Monsanto, suisses d’autre part, qui leur offrent des conditions fiscales avantageuses ;
  • s’oppose à la propriété des semences par les brevets: la nourriture doit rester aux mains de ceux qui la cultivent ;
  • défend la souveraineté alimentaire, l’agriculture de proximité et l’agroécologie ;
  • appelle à manifester le 19 mai à Morges, devant le siège suisse de Monsanto.

Guillaume Blatti Guillaume Matthey