Les grévistes de la Providence à nouveau déboutés par la «justice»

En juin 2017, le Tribunal civil du Littoral neuchâtelois avait rejeté la plainte des grévistes de l’Hôpital de la Providence (Neuchâtel-Ville) pour licenciements abusifs. En deuxième instance, le 15 décembre 2017, la Cour d’appel civile du Tribunal cantonal neuchâtelois a confirmé la première sentence. Nous avons recueilli la réaction d’un participant à la grève, qui s’exprime ici à titre personnel.

Pour la seconde fois, la plainte des 22 grévistes a été rejetée, cette fois par le Tribunal cantonal. Parmi les arguments avancés: «la grève aurait duré trop longtemps», les grévistes auraient «obtenu satisfaction sur leurs principales revendications». Cette sentence ne tient pas compte de la revendication à l’origine de la grève, à savoir le maintien de la CCT-Santé 21 à La Providence, au-delà des «onze mois à venir» (L’Express, 19.12.2017), date où le groupe GSMN SA, opposé à cette CCT, a pris le contrôle de l’hôpital.

C’est à mes yeux un jugement simpliste: la principale revendication était le maintien de la CCT, non appliquée à La Providence, alors que GSMN détient toujours des missions hospitalières (en violation de la loi cantonale sur la santé). D’autres éléments sont avancés, comme le refus supposé de remplacer les collègues lors de la grève. Or, nous avions expliqué à la direction des soins le fonctionnement d’une grève hospitalière: comme la police ou les pompiers, nous devions répondre aux appels de l’employeur en cas d’urgence – ce que nous avons fait.

Depuis, les ex-grévistes ont eu une séance avec l’avocat du Syndicat des services publics, en charge de leur défense. Qu’avez-vous décidé? Y aura-t-il recours contre cette sentence au Tribunal fédéral, ce jugement risquant de faire jurisprudence dans de futurs conflits du travail?

Pour des raisons professionnelles, je n’ai pas participé à cette séance. Les plaintes sont individuelles. Personnellement, je n’ai jamais fait cette grève pour de l’argent, mais pour empêcher que les droits des employé·e·s – en Suisse, mais aussi dans le monde – soient bafoués par le secteur privé pensant uniquement aux dividendes qu’il pourra verser à ses actionnaires. Si le jugement du Tribunal fédéral nous est favorable, il fera jurisprudence. A ma connaissance, l’ensemble des grévistes a fait recours.

Comment as-tu vécu personnellement cette époque (entre les deux jugements)?

Pour ma part, je n’ai pas eu trop le temps d’y réfléchir, ayant retrouvé un travail dans lequel je m’épanouis pleinement. C’est peut-être pour cette raison que, lors du 2e jugement, ça m’a consterné de voir que le Tribunal cantonal avait joué la même partition que le Tribunal de district. Mais quand tu as fait trois mois de grève et que tu as vécu les travers de la justice, plus rien ne t’étonne. Pour moi, la lutte continue.

Propos recueillis par Hans-Peter Renk