Deux ans avant la RIE3

Deux ans avant la RIE3 : Vaguelettes annonciatrices du tsunami

Le Gouvernement vaudois avance aujourd’hui au pas de charge pour mettre en œuvre sa RIE 3, en reniant ses propres promesses et malgré les pertes financières supplémentaires engendrées. Mais si on jette un coup d’œil en arrière, tout indique que la plus grande réforme fiscale menée depuis près de septante ans avait été préparée à pas feutrés.

En octobre 2012, le Conseil d’Etat s’accorde en effet déjà avec le patronat: diminution d’un point de l’impôt sur le bénéfice des entreprises contre augmentation des allocations familiales (Exposé des motifs et projets de loi du Conseil d’Etat, 10.10.2012, p. 63). Cette tactique en matière fiscale de donner un peu à la population pour faire passer les gros cadeaux fiscaux accordés aux mieux lotis n’est pas nouvelle (v. solidaritéS nº136). Le Conseil d’Etat présente ensuite sans sourciller la baisse de l’impôt sur le bénéfice des entreprises comme une compensation accordée aux milieux patronaux pour l’augmentation des allocations familiales.

Avec le recul, tout cela fait plutôt penser à un ballon d’essai, à une répétition en miniature de la RIE 3 vaudoise. En octobre 2012, lors de la conclusion du deal entre le Gouvernement vaudois et le patronat du canton, le grand public n’a pas encore entendu parler de la RIE 3 ; par contre, Pascal Broulis, si. Il est alors président de la Conférence des gouvernements cantonaux et représente, comme il le dit lui-même relativement à l’élaboration de la RIE 3 fédérale, «un interlocuteur privilégié du Conseil fédéral dans le cadre du dialogue entre la Suisse et l’Europe» (24 Heures, 15.05.2013). Le Grand argentier a donc pu sentir suffisamment tôt la direction que prendrait la RIE 3, et particulièrement sa composante cantonale. Vu l’ampleur de la réforme à venir, peut-être que le Conseil d’Etat a éprouvé la nécessité de tâter et de préparer le terrain.

En accordant une augmentation des allocations familiales et avec l’appui de Pierre-Yves Maillard, la gauche aux affaires est acquise au projet. Seul obstacle sérieux: les communes qui se plaignent de n’avoir pas été intégrées à l’élaboration du projet et qui voudraient que les pertes fiscales qu’elles auront à subir soient compensées (ce qu’elles obtiendront au moins en partie). Le Grand Conseil, à l’exception du POP et de solidaritéS, valide le cadeau fiscal en avril 2013.

La même pièce, mais en plus grand et en plus fort, sera jouée entre avril 2014 et mars 2016 avec la RIE 3 vaudoise. L’assurance de ses éminents instigateurs s’explique peut-être en partie par le succès rencontré par le ballon d’essai lancé fin 2012.

Vivien Ballenegger