Licencions Danone de nos caddies


Licencions Danone de nos caddies !


Les mobilisations des salarié-e-s de Danone et de Marks & Spencer en France posent des questions à toute la société. Les suppressions d’emplois pour cause de profits ne devraient-elles pas être interdites par la loi? Pour faire respecter de telles dispositions, ne faudrait-il pas imposer le contrôle des salarié-e-s sur la marche des entreprises?
Mais le droit de licencier découle du droit de propriété: il exprime le pouvoir réel d’une petite minorité sur la vie de la majorité d’entre nous. Pas besoin de chercher très loin: c’est cela le capitalisme. Une bonne raison de rechercher une alternative d’ensemble.
Dans l’immédiat, le boycott de Danone par les consommateurs/trices peut permettre à toute la population de s’emparer du débat et d’agir. Avec «les salariés LU d’Evry en colère», «licencions Danone de nos caddies !».

La Rédaction

Marks & Spencer ou la tyrannie des actionnaires


Le capitalisme, c’est la violence, pas seulement dans les pays pauvres, mais aussi en Europe. Marks & Spencer en est l’illustration révoltante: non seulement le PDG Vandevelde, plein aux as avec ses stock-options, licencie 4390 employés d’Europe par fax, mais il annonce froidement qu’il va «rendre deux milliards de livres aux actionnaires d’ici 2002». Les affamés de profits sont contents: Vandevelde revend tout et l’action Marks & Spencer est aussitôt dopée par ce crime social.


Cette cascade de licenciements est annonciatrice d’un retournement de conjoncture. Après l’euphorie de l’argent facile, le capitalisme des actionnaires-tyrans se prépare à une guerre impitoyable. Premières victimes: les salariés. En face, les décideurs politiques sont mis en accusation : peut-on considérer comme légitime, normal, moral, que quelques assoiffés de profits règlent le sort de milliers de personnes au nom de la dictature des bénéfices à deux chiffres? C’est intolérable.


Licencions Danone de nos caddies !


Danone licencie 1700 salarié-e-s, malgré des bénéfices avoués de 4,7 milliards de francs français, dont 20% à LU. La multinationale alimentaire n’a cessé depuis dix ans de rafler des marques dans la biscuiterie. Mais le marché est saturé: alors que les eaux minérales et les produits frais (yaourts) font beaucoup de bénéfices (10 à 12%), les biscuits en font moins (8%). Insupportable pour les actionnaires. Ainsi, depuis des mois, on se prépare à fermer les usines «non rentables», qui tournent en dessous de leurs capacités de production, calculées sur la base de 24 heures sur 24, 365 jours par an.


En famille, dans la revue du groupe, le PDG Riboud explique clairement le sens de l’opération: «Les membres du comité de direction ont un système de rémunération basé sur la rentabilité des capitaux investis et bénéficient des stock-options; ils partagent donc pleinement les attentes de nos actionnaires et sauront transformer notre projet économique et social en un projet créant de la valeur pour tous les actionnaires.»


Sur le site internet de la firme, le même Riboud joue les patrons humanistes: «J’ai la conviction que les entreprises qui réussiront dans le siècle qui s’ouvre sont celles qui, comme la nôtre, sont animées par des valeurs fortes et placent l’homme au cœur de leur démarche.» Cherchez l’erreur! www.danone.com


Les salarié-e-s montrent la voie


Les grèves chez Danone, Marks & Spencer et à la SNCF secouent la France. Les salariés de LU (dont les actionnaires ont connu une augmentation du bénéfice net de 17% en un an) font plus que protester contre un plan de licenciements. Ils mettent à nu la voracité des industriels: crise ou croissance, ils en veulent toujours plus! Face à la mobilisation des salarié-e-s, le gouvernement Jospin fait preuve d’autisme politique. Il ne changera pas de cap, mais fera «quelques ajustements». Pour preuve: il proteste contre la méthode Marks & Spencer, jugée peu courtoise. En réalité, le gouvernement n’interdit pas les licenciements par une loi et ne sanctionne pas les entreprises coupables, notamment quand elles font des profits. Il les y encourage en multipliant cadeaux et suppressions de charges.


Aujourd’hui, un mouvement d’ensemble du public et du privé est possible pour imposer l’interdiction des licenciements, la hausse des salaires, l’amélioration des retraites et la défense d’un service public européen. Bref, un mouvement social qui n’attend plus rien des «changements de cap» d’une gauche de plus en plus «imaginaire» 1’ayant abandonné même la perspective de réformer le système.



  1. Gérard Desportes et Laurent Mauduit, La gauche imaginaire et le nouveau capitalisme, Paris, Grasset, 1999.