Un salaire horaire de 20 fr. minimum entre en vigueur à Neuchâtel

La droite unie aura tout tenté pour éviter cette première suisse. En vain. Le Tribunal fédéral vient de donner tort aux quatre associations patronales qui se sont unies derrière le PLR et l’UDC pour empêcher l’introduction d’un salaire minimum cantonal, défendu devant le Grand Conseil par solidaritéS dès 2008. Un salaire-horaire de 20 francs au minimum entre en vigueur et en force immédiatement, dans le canton de Neuchâtel.

Acceptée en votation populaire  en novembre 2011, l’inscription dans la Constitution cantonale du droit à un salaire minimum – proposée à l’origine par solidaritéS – nécessitait une loi pour que le salaire minimum puisse être chiffré et appliqué concrètement. Elaborée par un groupe extra-parlementaire et déposée au Grand Conseil au printemps 2012, cette loi dut attendre l’automne 2014 pour être traitée et acceptée.

Elle devait entrer en vigueur au 1er janvier 2015. Mais un recours a bloqué le processus. Du temps de gagné pour les patrons sans scrupules qui engagent du personnel à des salaires si bas qu’ils·elles doivent recourir à l’aide sociale pour nouer les deux bouts. Mais aujourd’hui, leur défaite est définitive: selon Unia ce sont plus de 3000 personnes qui bénéficient dès maintenant d’un salaire minimum de 20 francs l’heure.

Une mesure indispensable contre le dumping salarial

Il s’agit d’une mesure sociale visant à lutter contre la pauvreté dans le monde du travail. Considérant qu’il n’est pas normal de devoir recourir à l’aide sociale lorsqu’on travaille à plein temps, le TF a jugé que ce salaire minimum de 20.- l’heure vise à lutter dans le canton de Neuchâtel contre le phénomène des workings poor et que dès lors il est parfaitement conforme au principe constitutionnel de la liberté économique, comme aussi au droit fédéral et cantonal. Concrètement, toute personne qui toucherait à l’avenir dans le canton de Neuchâtel un salaire inférieur à 20 fr. de l’heure pourra porter plainte contre son employeur et gagnera devant le Tribunal.

Ce jugement du TF ouvre aussi la voie à l’introduction d’un salaire minimum dans d’autres cantons, car des pauvres, il n’en existe pas qu’à Neuchâtel… Le coût de la vie n’étant pas le même partout en Suisse, le chiffre de 20fr./l’heure – calculé sur la base de l’aide sociale cantonale – changera sans doute selon les cantons, mais le fait est acquis et reconnu: l’introduction d’un salaire minimum est bien du ressort des cantons, puisque la lutte sociale contre la pauvreté est une des tâches qui leur revient.

La victoire des travailleuses et travailleurs en terre neuchâteloise devrait non seulement permettre d’accélérer le processus dans le Jura et au Tessin où des initiatives similaires sont en cours, mais pourra ouvrir la voie partout ailleurs, y compris dans les cantons de Genève, de Vaud ou du Valais où l’introduction d’un salaire minimum a jusqu’ici été combattu par ses adversaires au nom de la liberté économique. Avec le jugement du TF leur argument tombe. Une mesure heureuse qui permettra à des milliers de travailleurs et travailleuses de sortir (partiellement ou entièrement) de l’aide sociale. Une arme efficace contre le dumping salarial!

Marianne Ebel