PSS et USS se vendent pour 70 deniers...

La campagne contre PV2020 entre dans sa dernière ligne droite. Cinq semaines, c’est le temps qu’il nous reste pour convaincre les électeurs·trices de rejeter ce paquet injuste, déséquilibré et pourvoyeur de régression sociale. La campagne s’annonce intense, d’autant que coups bas et mensonges ne manqueront pas, y compris en provenance des rangs de ceux·celles qui ne comptent pas parmi nos adversaires traditionnels.

La semaine dernière, le Parti socialiste suisse (PSS) et l’Union syndicale suisse (USS) lançaient, en conférence de presse, la campagne en faveur de cette réforme aux côtés des partis de droite et des associations patronales romandes. L’USS et le PSS ont donc fait alliance avec les fervents partisan·e·s du relèvement de l’âge de la retraite à 67 ans pour toutes et tous. Une alliance contre-nature qui traduit une orientation politique d’accompagnement de la casse sociale et qui repose sur des calculs tacticiens en complète contradiction avec les intérêts des travailleurs·euses de ce pays.

Pourtant, l’analyse concrète de ce projet de prévoyance vieillesse nous montre qu’il colle, à une exception près, à la feuille de route des milieux patronaux et notamment d’economiesuisse. Le relèvement de l’âge de la retraite des femmes, la baisse du taux de conversion, l’augmentation de la TVA sont autant d’éléments qui font partie des demandes directes des représentants bourgeois et qui visent un accroissement de l’exploitation des travailleurs·euses. La seule mesure qui échappe réellement à cette feuille de route est l’augmentation de l’AVS de 70 francs par mois. Un gain qui est bien loin de compenser les pertes pour les salarié·e·s et notamment pour les femmes qui assumeront l’essentiel de la facture soit 1,3 milliard.

Malgré la faiblesse de cette mesure, ces 70 francs ont justifié l’adhésion immédiate des centrales syndicales et du PSS à PV2020. Ainsi, à la sortie du vote du projet, le socialiste J.-C. Schwaab qualifiait PV 2020 d’«avancée historique»! Parlait-il de la baisse du taux de conversion ou du vol d’une année en bonne santé de la vie de toutes les femmes de Suisse? On croit rêver! Aussi délirantes que peuvent sembler ces paroles, le soutien du PSS à cette réforme prennent racine dans des choix politiques concrets et conscients.

Tout d’abord, la volonté affichée du PSS de défendre coûte que coûte les projets portés par ses représentant·e·s dans les exécutifs explique sans aucun doute en partie ce positionnement. Mais, il est également dicté par son besoin de prouver son utilité au parlement fédéral en cherchant à revendiquer des victoires. Des victoires de plus en plus rares au vu du rapport de force aux Chambres. Les 70 francs d’augmentation de l’AVS sont donc apparus comme une aubaine permettant de proclamer une victoire d’étape et ont ainsi justifié une adhésion totale du PSS à PV2020 qui est pourtant un projet patronal à 99%. La même logique a présidé pour les centrales syndicales.

Si ce compromis semble particulièrement désespéré, que dire de l’investissement réel dans la campagne du PSS et de l’USS. Devenus les fers-de-lance de ce projet, ces structures et leurs porte-paroles ne reculent devant rien pour faire passer en force cette attaque contre les salarié·e·s et les femmes. Usant de mensonges, développant des alliances contre nature, matraquant des menaces, les partisans de la réforme font feu de tout bois pour justifier un projet que l’on sait mauvais et injuste. De simples soutiens à un compromis boiteux, ils sont devenus les forces principales de la campagne.

Pour preuve, la décision scandaleuse de l’USS de débloquer 700 000 francs sur les cotisations, celles des travailleurs·euses, pour faire campagne pour l’élévation de l’âge de la retraite. Comment un syndicat peut-il décemment utiliser les cotisations de ses membres pour se battre publiquement pour la dégradation des retraites et l’élévation de l’âge de la retraite?

Mais la cerise sur le gâteau  est sans doute que le PSS et l’USS ont également cosigné un tract avec la Fédération des entreprises romande, le Centre Patronal et la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, autrement dit les associations patronales romandes. Ce tract a d’ailleurs été envoyé à l’ensemble des membres UNIA par courrier individuel, encore financés par la cotisation des membres.

D’un compromis à 70 deniers, nous sommes passés à une compromission à 700 000 francs. Loin d‘un simple soutien au moins mauvais compromis, cet investissement important s’apparente à une campagne prioritaire pour le PSS et l’USS et pose la question du rôle de ces organisations dans l’accompagnement des politiques de casse sociale. La constitution d’un pôle de résistance autour d’une gauche politique et syndicale combative n’est donc plus une option, mais une nécessité. Dans l’intervalle, le 24 septembre prochain, montrons-leur que les travailleurs-euses ne sont pas dupes et que nous ne laisserons pas négocier nos vies pour des victoires d’opérette.

Pablo Cruchon