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Suisse : Homophobie et transphobie - Dernière ligne droite au parlement

Dernière ligne droite au parlement

Le caractère homophobe/transphobe d’une agression n’est pris en compte ni dans la Constitution, ni dans le Code Pénal. Selon le rapport européen 2017 de l’ILGA, la Suisse fait partie des 16 derniers pays (sur 49 enquêtés) à n’avoir instauré aucune politique ni loi contre les propos et actes de haine envers les personnes LGBTI, malgré les interpellations de nombreux organes internationaux.

L’évolution du droit par la création d’une loi-cadre permettrait que les agressions de ce type soient poursuivies d’office et punissables jusqu’à 3 ans de prison. En 2013, 80% des actes de violence homophobe et transphobe en Europe n’ont pas été signalés à la police, souvent par crainte d’une homophobie/transphobie institutionnalisées (Amnesty International) et sont donc sous-estimés et passés sous silence. Face à ce vide juridique, et en l’absence de statistiques exhaustives, la LGBT+ Helpline catalogue les cas signalés. «Mais au-delà des chiffres, ce sont des souffrances et des drames humains.» (M.Reynard).

L’initiative «Lutter contre les discriminations basées sur l’orientation sexuelle»

La donne pourrait changer d’ici à 2019, suite au lancement de deux initiatives. La première, cantonale (GE), vise à modifier l’art. 8 de la Constitution. La seconde, parlementaire, émane du conseiller national Mathias Reynard (PS/VS). Elle vise à étendre l’art. 261bis du Code pénal contre la discrimination due à la race, l’ethnie et la religion, à la discrimination basée sur l’orientation sexuelle. D’autant que le TF refuse aux associations de protection des droits des personnes LGBTI la qualité pour agir dans le domaine des infractions à l’honneur (Art. 173ss CP). L’initiative parlementaire sera acceptée en lieu et place de l’initiative genevoise.

Les «TI», eternels oublié·e·s

L’extension de la norme pénale au motif d’orientation sexuelle représente un point fort dans la lutte contre les discriminations. Cependant les personnes transgenres et intersexes ne sont pas incluses dans l’initiative proposée. Ce phénomène de «mise à l’écart» des composantes TI dans les luttes LGBTI est malheureusement récurrent. Rappelons par exemple que malgré les efforts de la Fédération genevoise des associations LGBT, la nouvelle Constitution genevoise de 2013 n’a pas intégré l’identité de genre, ajoutant seulement l’orientation sexuelle à l’article 15 sur l’égalité. Le CSDH constate par ailleurs dans son étude de 2015 Accès à la justice en cas de discrimination que «la protection est particulièrement déficiente dans le domaine LGBTI puisqu’il n’existe pratiquement aucune réglementation ni jurisprudence pour les personnes transgenres et les intersexes, invisibles dans la législation suisse».

La Commission des affaires juridiques crée la surprise

Le 3 février 2017, cette initiative parlementaire a franchi une étape de plus en étant adoptée par la Commission des affaires juridiques du Conseil national par 15 voix contre 9 et 1 abstention. Mais surtout, la Commission a créé la surprise en décidant d’aller plus loin que l’initiative en y ajoutant les critères d’identité de genre afin de protéger ces personnes «encore davantage touchées par les discriminations et agressions» (Fédération LGBT). Un projet définitif devrait être présenté à la session de printemps 2019.

Marjo Blanchet