Vous avez aimé la RIE3, vous adorerez la PF17

Après l’échec de la Troisième réforme de l’imposition des entreprises (RIE3) devant le corps électoral, le 12 février dernier, un groupe de pilotage a préparé une version «acceptable» de ce projet. Début juin, il a remis ses recommandations au Conseil Fédéral.

Il s’agit d’un objectif phare pour la droite et les milieux patronaux: pas question donc de revenir en arrière. Mais devant le succès du référendum de gauche, leur projet devait être reformulé. Son noyau central demeure: baisse massive de l’imposition de toutes les entreprises (en particulier des plus grosses, qui paient l’essentiel de l’impôt) et suppression des statuts privilégiés pour les sociétés n’exerçant que des activités marginales en Suisse (holdings, sociétés de domicile, etc.).

De la RIE3 à la PF17

Pourtant, certaines déductions devaient être contenues. Ainsi, le groupe de pilotage propose de supprimer celle des intérêts notionnels (ce que rapporteraient les capitaux propres s’ils étaient placés sur les marchés financiers); il propose aussi de mieux définir les déductions liées aux brevets et patentes, ainsi que celles ayant trait aux frais de recherches et développements. Globalement, ces déductions ne pourront pas porter sur plus de 70% des bénéfices (au lieu de 80%).

Au chapitre des «compensations», le groupe de pilotage propose de relever la taxation des dividendes à 70% pour la Confédération et les cantons, et d’augmenter le plancher fédéral des allocations familiales de 200 à 300 francs par mois. Il recommande aussi une transparence des dispositifs cantonaux, qu’il faudra élaborer et rendre publics en même temps que les dispositions fédérales. Il appelle enfin à tenir compte des intérêts des villes et des communes.

La PF 17 s’annonce donc comme une réplique de la RIE3, avec quelques aménagements. Le Conseil Fédéral a rapidement réagi en exigeant une baisse de la «compensation verticale» en faveur des cantons – réduction de la majoration de la part de l’impôt fédéral direct (IFD) restituée aux cantons, de 4,2 à 3,5 points (soit de 21,2% à 20,5%) (15 à 20 millions de moins pour un canton comme Genève). A quoi les cantons ont répondu en exigeant le maintien intégral de cette ristourne.

Quel calendrier?

Le Conseil fédéral devrait préparer son avant-projet de loi au cours de cet été, qui devrait être suivi d’une consultation «standard», de septembre à décembre 2017. Son message devrait être rédigé dans la foulée, autorisant un débat parlementaire ce printemps (mars-avril 2018). Si tout va bien, ce qui reste à démontrer, la PF17 pourrait être adoptée encore au 2018, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2019. Les cantons auraient ainsi jusqu’au 1er janvier 2020 pour faire entrer en vigueur leurs propres dispositions.

Il est difficile à ce stade d’apprécier à quel point l’Union suisse des arts et métiers (USAM), qui représente les PME, peut tenter de miner ce nouveau «compromis» en tirant à boulets rouge sur l’imposition accrue des dividendes et sur l’élévation du plancher des allocations familiales. De même, il n’est pas aisé de mesurer ce que seront les résistances opposées par un canton comme Zurich, qui souhaiterait obtenir une NID cantonale en contrepartie du maintien de taux plus élevés.

Ce qui est sûr, c’est que nous devrons tout faire pour lancer, avec d’autres forces, un nouveau référendum fédéral contre la PF17 et, dans tous les cantons où nous en avons la possibilité, nous opposer aussi par référendum à l’introduction de ses déclinaisons cantonales, puisque la baisse des taux est décidée à ce niveau.

Jean Batou