Sans illusion, votons OUI à la nouvelle loi sur le logement (L3PL)

Le 12 février prochain la nouvelle loi cantonale sur la préservation et la promotion du parc locatif (L3PL) sera soumise au vote. Une votation qui vient clore le long «dossier logement» amorcé en 2011 par le lancement d’une initiative populaire de l’ASLOCA. Malgré de lourds reculs depuis cette initiative, il s’agira de voter oui à cette loi qui contient deux volets d’une politique sociale en matière de logement. Le premier vise à protéger le parc locatif de changement d’affectation ou de travaux superflus. Le deuxième offre aux communes des outils pour favoriser la construction de logements qui répondent aux besoins et aux moyens de la population vaudoise.

Ce résultat est le fruit d’une longue saga parlementaire durant laquelle le groupe PoP–solidaritéS au Grand conseil a lutté à contre-courant pour que les lois en vigueur sur la préservation du parc locatif (LDTR, LAAL) ne soient pas péjorées au profit de mesures caduques dans le domaine de la construction du logement. En effet, c’est suite au dépôt de l’initiative de l’ASLOCA «Stop à la pénurie de logements» que le Conseil d’Etat a proposé en automne 2015 un compromis «logement» devant le Grand conseil, constitué du contre-projet direct à l’initiative et d’une révision des deux seules lois qui luttent notamment contre la cherté des loyers (LDTR et la LAAL).

Alors que le texte de l’initiative prévoyait la constitution d’un fonds pour la construction de logements et la possibilité pour l’Etat d’user d’un droit d’expropriation pour l’achat de terrain, le contre-projet, lui, écartait la question du financement et proposait uniquement le droit de préemption, qui permet l’acquisition en priorité des terrains en zone à bâtir par les collectivités publiques.

De l’initiative de l’ASLOCA au compromis

Face à des partis gouvernementaux frileux de soutenir l’initiative de l’ASLOCA qui ne se contentait pas que de simples mesurettes, le groupe PoP–solidaritéS était alors bien seul à défendre ce texte. En parallèle, il était surtout question de sauver des mesures de protection des locataires, sous pression des milieux immobiliers depuis de nombreuses années déjà.

En définitive, si aujourd’hui Béatrice Métraux est fière de présenter une loi qui rassemble deux volets d’une politique pour des logements à loyers abordables, il s’agissait surtout pour le Conseil d’Etat de donner des contreparties aux milieux immobiliers en matière d’autorisation dans le domaine de la transformation des logements d’habitations, afin de pouvoir de l’autre côté faire passer une modeste politique sociale du logement devant un parlement à majorité bourgeoise.

Bien que la loi sortie des tribulations parlementaires semble être tout ce dont les élus soient capables, solidaritéS Vaud défend ce texte et a rejoint le Comité L3PL. Car si aujourd’hui nous sommes appelés aux urnes sur ce sujet, c’est pour contrer l’arrogance des milieux immobiliers, Chambre vaudoise immobilière (CVI) en tête, qui veulent, avec ce référendum, enterrer un projet qui aura mis plus de 6 ans à aboutir et qui a in fine intégré certaines de nos revendications.

Malgré ses limites, cette loi pose la question du montant des loyers et touche à l’intérêt des grands propriétaires. Ceux-ci profitent grassement depuis plus de 10 ans d’un taux de vacance de moins de 1 % pour maintenir et augmenter la pression sur le porte-monnaie des locataires, qui sont près de 70 % dans le canton.

Défendre des améliorations face aux mensonges de la CVI

Plus de 42 % de la population consacre plus de 25 % de son revenu à son loyer, et cette tranche atteint plus de 30 % chez les personnes les plus précaires avec des risques de devoir faire appel à l’aide publique ou d’être obligé de s’endetter pour se loger! Une charge inadmissible sur le budget des ménages lorsqu’on sait qu’elle est surtout dictée par les logiques du marché immobilier dont la pénurie chronique est le principal moteur. En face, pour défendre son butin, on crie à la «disparition de la propriété privée», à «la fin de la construction», alors qu’il s’agit en réalité de doter les communes de moyens pour mener à une politique publique de construction de logement à loyer abordable et aussi d’offrir une voie aux locataires qui habitent des logements qui leur sont encore accessibles.

En définitive, bien que nous sommes encore loin d’une politique qui ne considère plus le logement comme une marchandise, mais comme un droit, bien que la balle sera à présent dans le camp des élu·e·s communaux, il faudra voter oui à la L3PL le 12 février prochain. Oui à une loi qui permet de préserver les logements existants de transformations et rénovations qui font augmenter le peu de loyers encore décents sur le marché ; Oui à une loi qui oblige l’information et la consultation des locataires lors de gros travaux ; Oui à une loi qui définit le logement d’utilité publique ; Oui à une loi qui permet aux communes d’acquérir des terrains en zone à bâtir.

Mireille Müller