Nicaragua

Nicaragua : Une réflexion nécessaire

Moins médiatisées qu’aux USA, les élections nicaraguayennes du 6 novembre ont confirmé les pronostics: le ticket présidentiel du FSLN – Daniel Ortega et son épouse Rosario Murillo (à la vice-présidence) – recueille 72,75% des suffrages contre 15% à Maximiliano Rodrigues, du Parti libéral constitutionnaliste, et 31,8% d’abstention. Toutefois, l’opposition conteste ces chiffres du Conseil suprême électoral et estime l’abstention à plus de 70%!

L’actuel gouvernement  est considéré, par la gauche latino-­américaine et par des secteurs proches des processus « bolivariens » (y compris en Europe), comme «la seconde étape de la révolution» (Gauchebdo, 16.9.2016 ; Le Courrier, 4.11.2016). Or, en 20 ans, la politique du FSLN a changé. En effet:

  • Le FSLN est étroitement contrôlé par Daniel Ortega (seul candidat présidentiel en 20 ans).
  • A la veille des élections de 2006, pour neutraliser les Eglises catholiques et évangéliques, le FSLN avait voté (avec la droite) la suppression de l’avortement thérapeutique (introduit en 1893 par le président libéral José Santos Zelaya).
  • Un mégaprojet, « le Grand canal du Nicaragua », attribué à un consortium de Hong-Kong (ayant récemment chuté de 85% à la Bourse), suscite de vives critiques, notamment de la part de l’Académie des sciences du Nicaragua et des populations concernées.
  • Certes, en 10 ans, l’aide vénézué­lienne (500 millions par an) a permis de financer des programmes sociaux. Mais le financement futur (vu l’actuelle crise vénézuélienne) n’est pas garanti.
  • Le FSLN mène «une politique d’alliance avec tout le monde, l’alliance la plus significative est peut-être celle passée avec le secteur privé, les principales associations patronales du pays, y compris le capital étranger» (Le Courrier, 4.11.2016) ;

Pas plus que dans les années 1980, nul n’exige du Nicaragua qu’il incarne la quintessence du socialisme (qui ne peut être construit dans un seul pays). Mais la réflexion, y compris critique, est toujours nécessaire.

Hans-Peter Renk