Vevey

Vevey : Référendum pour un urbanisme réellement «participatif»

Après avoir subi un nettoyage radical de ses lieux de cultures alternatives et de ses anciens quartiers ouvriers ces quinze dernières années, Vevey est confronté à un nouveau projet immobilier d’envergure. La dernière grande parcelle constructible est située au cœur de la ville. En son cœur, le petit théâtre des Trois-Quarts, structure associative abritant plusieurs troupes et 120 élèves. CFF-Immobilier entend investir 170 millions dans la construction d’un nouveau quartier.

L’une des maquettes du projet

Comme pour tout projet  immobilier d’importance prévu au cœur des villes, le marketing urbain des CFF utilise les termes devenus magiques de « densification », « participation », « lutte contre la pénurie du logement » et « durabilité ». Confrontons les termes à la réalité du projet.

La densification vise à contrer l’étalement urbain qui détruit les terres agricoles, entame le paysage, a un coût écologique important et est économiquement suicidaire à moyen terme. Nul ne conteste donc la pertinence du concept en soi. Le problème réside dans le fait que Vevey est déjà la troisième commune la plus dense de Suisse (plus de 8 000 habitant·e·s au km2). Or cette densification est très mal maîtrisée et la ville ne suit plus du point de vue de ses infrastructures (écoles, déchets, crèches, etc.). Par jeu de miroir, les communes périphériques, dont le revenu moyen par habitant·e est deux fois supérieur à celui de Vevey, continuent allégrement à s’étaler avec de nouvelles villas qui se multiplient. On fait donc porter le poids de la densification à une commune qui a fait plus que sa part, alors que les communes bourgeoises n’ont aucune entrave en matière d’étalement.

L’aspect « participatif » du projet se résumant à convoquer les habitant·e·s une fois que tout sera construit pour discuter des aménagements extérieurs, on n’insistera pas sur la vacuité de l’argument des CFF. L’urbanisme participatif consiste en un processus de codécision incluant les citoyen·ne·s en amont du projet, et non en aval, une fois que tout a été décidé hormis le type de fleurs qui sera planté à tel ou tel endroit.

Un projet pour les classes moyennes supérieures et l’automobile

La « lutte contre la pénurie de logements » constitue peut-être l’argument auquel les Veveysan·ne·s sont les plus sensibles. C’est une dure réalité qui touche une très large part de la population. Le projet des CFF prévoit que 20% des logements seront loués à un prix « hors-marché » de 250 francs/m2 par année. On est loin de logements destinés aux plus précaires… Le 80% sera donc réservé à la vente ou à des prix de location qui excèderont de beaucoup les moyens de celles et ceux qui souffrent de la pénurie. En d’autres termes, ce sont les classes moyennes supérieures et les riches qui profiteront le plus de la construction de ce quartier. Il faut bien que rente foncière se fasse…

CFF-immobilier parvient à vendre son projet comme étant « durable ». Après avoir constaté que le projet favorisera essentiellement les riches, on arguera du fait que le projet prévoit 500 places de parking. Soit un taux de motorisation du nouveau quartier (500 places/1000 habitant·e·s) qui sera supérieur à celui qui prévaut dans la ville (397/1000). De même, la « mixité fonctionnelle », consistera essentiellement à créer de l’habitat et des commerces, sans considérations sérieuses pour les espaces publics ou d’autres usages permettant l’existence d’activités et de lieux économiquement non-rentables, mais socialement de la plus haute importance comme un petit théâtre.

A l’heure où l’on peut vendre des iPhone en utilisant les images de Gandhi ou du Che, chacun appréciera ici la manière dont une régie publique (! ) peut détourner le sens des mots afin de dégager du profit sur le dos de tous.

Nos camarades de Décroissance-Alternatives et les Verts de Vevey ont lancé un référendum. Au moment où ces lignes sont écrites, il reste encore deux jours pour récolter des signatures. Il est à espérer que ce référendum aboutisse, afin de donner la possibilité à tou·te·s les Veveysan·ne·s de débattre et s’exprimer sur l’avenir de cette parcelle centrale. Pour un urbanisme authentiquement « participatif », « durable », socialement juste et permettant l’existence d’une culture alternative nécessaire à une ville qui étouffe. MBt