Allemagne

Allemagne : Syndicalistes pour le climat

Le bassin rhénan de mines à ciel ouvert de lignite, avec ses trois sites d’Inden, Hambach et Garzweiler, est le plus grand producteur de CO2 d’Europe. A proximité se tient un camp pour le climat, qui s’inscrit dans la campagne Ende Gelände (Jusqu’ici, mais pas plus loin) contre le recours aux énergies fossiles et particulièrement au charbon. Certains syndicalistes ont jugé bon de menacer ce camp, faisant front commun avec leur employeur. Nous publions ci-dessous le contre-appel lancé par d’autres syndicalistes, en défense du climat.


«Ras-le-bol de la violence des manifestants écologistes». Appel initial des «délégués syndicaux».

«Nous sommes actuellement confrontés à un changement climatique qui va en se renforçant et qui ne nous épargne plus. Ces mutations touchent tout le monde, même si les riches peuvent bien sûr mieux s’en protéger.

Pour les habitant·e·s des régions menacées par les inondations, il est souvent difficile de conclure une assurance financièrement abordable contre leurs conséquences. Ainsi les populations récemment touchées dans le Bas-Rhin n’ont pu obtenir de réparations financières adéquates pour la destruction de leur habitation.

Or, il existe aujourd’hui – exactement comme hier en matière d’énergie nucléaire – une partie non négligeable du mouvement syndical qui estime que tout cela ne la concerne pas, voire qui remet tout simplement en cause le changement climatique. Ces syndiqués rejoignent ainsi dans un isolement relatif les grandes firmes du pétrole et du charbon ainsi que certains cercles néolibéraux. L’ONU, les milieux scientifiques les plus importants, l’UE et la République fédérale reconnaissent que le changement climatique est une réalité.

L’environnement contre l’emploi – non merci!

La plupart du temps, l’argument principal contre l’abandon du charbon est celui du maintien des emplois. Naturellement, on ne saurait le balayer d’un revers de main, puisqu’il en va de l’existence de dizaines de milliers de familles. C’est bien pourquoi il faut dès maintenant discuter de l’avenir de la population dans les régions d’extraction du lignite, exactement comme cela s’est fait dans les mines de houille, et avancer des solutions de rechange judicieuses. C’est une tâche prioritaire des syndicats, des conseils d’entreprise, des politiques et d’abord des entreprises qui exploitent le lignite, donc en Rhénanie, de la RWE [trust de l’énergie issu des anciennes Forces motrices de Rhénanie-Westphalie, réd.] Nous pensons que pas un membre du personnel, que ce soit dans l’extraction ou dans les centrales, ne doit rester sans emploi. C’est une responsabilité de la société tout entière que de fournir des perspectives à la population dans le bassin de lignite. Il va de soi que cela concerne aussi la remise en état des territoires exploités, l’installation d’énergies renouvelables et l’implantation d’entreprises tournées vers l’avenir.

L’assemblée des délégué·e·s du syndicat ver.di [syndicat unifié des services, réd.] s’est prononcée en mars pour une sortie la plus rapide possible de l’exploitation du lignite. Bien sûr, ver.di revendique conjointement un avenir pour les personnes vivant dans le bassin d’exploitation. Et il faut attendre aussi de voir ce que signifie ce «plus rapidement possible». Reste que ver.di a clairement reconnu la réalité du changement climatique, et du même coup qu’il fallait mettre fin au recours au lignite comme source d’énergie.

Des menaces contre les militant·e·s pour le climat

Le camp pour le climat qui se tiendra fin août en Rhénanie a été l’objet de menaces d’une série de «délégués syndicaux» du syndicat IG BCE [Syndicat des mines, de la chimie et de l’énergie, réd.] et de ver.di. Leur appel, intitulé Ras-le-bol!, visait à empêcher massivement cette manifestation. C’est à ce jour un paroxysme d’agressivité de la part de membres de syndicat qui pensent que leurs intérêts sont prétendument les mêmes que ceux de leur employeur. Le syndicat ver.di a interdit l’utilisation de son emblème dans le cadre de cette initiative.

Nous jugeons particulièrement honteux que ces «délégués syndicaux» n’aient visiblement aucun intérêt à une discussion démocratique, mais cherchent à empêcher, menaces de violences à l’appui, la tenue du camp pour le climat.

Syndicalistes actifs et actives, nous nous distançons expressément de cette démarche. Nous exigeons des initiants qu’ils renoncent à cette action dirigée contre les militant·e·s du camp pour le climat, qu’ils prennent part au débat dans la société et qu’ils reconnaissent la réalité du changement climatique.

Nous participerons au camp pour le climat en Rhénanie et le défendrons ensemble contre les agressions, d’où qu’elles viennent. Nous appelons les autres syndicalistes à participer au camp pour le climat et à la manifestation du 20 août dans le bassin rhénan du lignite, pour lutter ensemble pour un avenir vivable.»

Traduction de la rédaction

PS Aux dernières nouvelles, il semble bien que les syndicalistes «procharbon» aient baissé le ton et se contentent pour l’instant de tenir un petit rassemblement pacifique à proximité du camp pour le climat. Leur appel qui exprimait un «ras-le-bol de la violence des manifestants écologiques» (sic!) s’en prend maintenant d’abord au fait que les salarié·e·s paient les pots cassés d’une politique énergétique à leurs yeux erronée.