Guerre programmée: coûts humains & écologiques

Guerre programmée: coûts humains & écologiques


Le 12 novembre 2002, une importante étude du réseau « People’s Health Movement » (PHM) était rendue publique à Londres par les responsables de Medact (Dr.June Crown, Jane Salvage, Mike Rowson et Gill Reeve). La fondation de PHM a eu lieu à Dhaka, au Bangla Desh en 2000, avec la participation de membres provenant de 92 pays différents. Le présent rapport a pu être réalisé grâce à la collaboration de l’International Physicians for the Prevention of Nuclear War (12 pays) et de Physicians for Social Responsability des U.S.A.



Ce travail, très bien documenté, montre qu’une guerre en Irak va entraîner la mort d’un demi-million de personnes à court et long terme. La moitié des décès seraient la conséquence après la guerre des effets sur la santé. Si l’arme nucléaire est utilisée, elle tuerait environ 3,9 millions de personnes. Dans tous les scénarios, la grande majorité des victimes serait constituée de civils. Nous présentons ci-dessous un résumé des éléments essentiels de ce rapport.

Dommages collatéraux


L’Irak, peuplé de 25 millions d’habitants, dont 4 sur 5 sont arabes, les autres kurdes, détient 10% des réserves mondiales de pétrole. Après les 100.000 morts irakiens de la guerre Iran-Irak (1980-1988), la guerre du Golfe (1991) a fait entre 142.000 et 206.000 victimes en Irak. Les infrastructures ont été délibérément visées et détruites, en particulier le réseau électrique et les provisions d’eau, entraînant famine et épidémie. Les effets à long terme sur la population restent encore inconnus. Le taux de mortalité d’enfants en dessous de cinq ans a triplé de janvier à août 1991. L’embargo a amené 55% de la population au seuil de pauvreté et 20% dans un état de pauvreté extrême.



Une nouvelle guerre en Irak va amener de multiples types de destructions et de détériorations: massives sur les vies humaines (entre 375.000 et 3,9 millions, avec une présentation détaillée des effets sur les combattants irakiens et la population civile dans les plus grandes villes d’Irak, en particulier Bagdad, Basra, Diyala, Kirkuk et Mosul), sur l’environnement, avec les dégâts des installations pétrolières, les mines, et toutes les formes de pollutions chimiques, biologiques et radiologiques ; les infrastructures d’urgence pour les flux de réfugiés, la déstabilisation de tout le Moyen-Orient, l’agitation sociale, l’augmentation d’actes de terrorisme, la possibilité d’une récession économique mondiale, une région détruite, des effets à long terme sur la santé physique et psychique.



Une estimation financière peut être faite du coût de la guerre : entre 150 et 200 milliards de dollars US. Des différents scénarios publiés ces dernières semaines, les prédictions vont de 5’000 victimes à l’holocauste nucléaire, ce qui a été confirmé par le ministre de la défense britannique Geoff Hoon en mars 2002.



Basés sur l’étude de récents conflits, comme les guerres du Golfe, de Panama, du Liban, de Tchétchénie, de la Corne d’Afrique et de la Yougoslavie, et sur des simulations militaires, l’impact des différents scénarios peut être évalué. Les attaques aériennes avec des bombardements massifs feront de nombreuses victimes civiles, avec une crise de l’aide sanitaire publique, entraînant une mortalité plus grande que l’effet direct des bombardements, notamment si les ressources essentielles sont visées (eau potable, alimentation, énergie, et destruction de l’accès aux traitements). Une invasion terrestre par le Sud-Est risque de détruire les puits pétroliers, avec les atteintes à la santé et à l’environnement, en plus de la mortalité directe. Une attaque par le Nord pourrait déstabiliser le pays pour longtemps en exacerbant la rivalité des différents groupes, avec des actes de sabotage dans les champs pétrolifères. En résumé, le déclenchement d’une guerre en Irak aurait des conséquences désastreuses sur la population déjà largement paupérisée, en limitant les risques pour l’élite autour de Saddam Hussein. Une catastrophe humanitaire est prédite par les agences d’aide travaillant actuellement sur le terrain en Irak (The Guardian, 2002).



Le rapport se termine par une série de propositions alternatives à l’intervention militaire en Irak:

  • cibler des sanctions chocs sur l’élite irakienne qui soutient le pouvoir,
  • accorder un temps suffisant pour l’inspection de l’arsenal irakien,
  • mettre en place un système visible et crédible pour contenir et réduire les flux d’armement en Irak
  • améliorer les conditions humanitaires de façon équitable et efficace
  • développer un processus politique significatif pour désengager les différents composants du régime irakien les uns des autres
  • encourager le développement de la démocratie et de la société civile
  • créer un mini plan Marshhall pour l’Irak, pour encourager une autorité légale post-Saddam.


Un récent article d’il manifesto de Manlio DINUCCI publié dans Le Courrier du 25novembre fait état du bilan de la guerre du Golfe sur la mortalité infantile: on estime à près d’un demi-million les enfants qui ont trouvés la mort suite au conflit à cause de la malnutrition, de la pénurie d’eau potable et du manque de médicament. Un rapport officiel de la défense américaine daté du 21 février 1991 confirmait le succès de «l’opération eau» planifiée par les autorités américaines: «les conditions s’annoncent favorables à la propagation de maladie infectiueses dans les zones urbaines frappées par les bombardements».


Gilles GODINAT



On pourra trouver sur ce site l’intégralité du rapport (en anglais): http://www.medact.org/