Italie: redonner du souffle à la lutte de classe

Italie

Redonner du souffle à la lutte de classe


Une frontière rouge s’est dessinée lors de la grève générale du 18 octobre. Une frontière qui pourrait devenir un abîme dans lequel risquent de sombrer celles et ceux qui, au sein de «l’opposition» comme au gouvernement, ont feint que la grève générale «n’était pas».



Le «non-événement» était préparé de longue date par les télévisions du Cavaliere. Le «silence radio» a été scrupuleusement observé sur le déroulement de la préparation de la grève. Mais au jour J, l’ampleur du mouvement de masse à forcé le regard, forcé le respect et détourné même les caméras de télévision de l’empire Berlusconi.



L’opposition officielle (centre-gauche et centrales syndicales concurrentes UIL, CISL) a dénoncé la division provoquée au sein du mouvement syndical. Pour certains, les plus impliqués dans la politique de collaboration de classe – signataires du «Pacte pour l’Italie» avec Berlusconi et les patrons – la CGIL porte la responsabilité de la division du mouvement syndical. Pour d’autres, moins maqués avec le patronat et ses institutions publiques et privées, la grève était un mauvais moment à passer: «maintenant il faut reconstruire l’incontournable unité syndicale». La récré est terminée, il faut retourner en classe…

Base syndicale et mouvement no-global


Pour tous les autres, les ouvriers métallurgistes, les salariés de la fonction publique, les retraités, les étudiants, les chômeurs, les immigrés et les «désobéissants» activistes no-global qui ont envahi les places italiennes le vendredi 18 octobre, la grève générale a été une formidable expérience. Ils ont prouvé qu’il était nécessaire – et possible – de construire une opposition sociale à partir des lieux de travail. La réussite de la grève a dépassé toutes les attentes : 58 % de participation est l’estimation globale la plus fiable (baisse de la consommation nationale de courant à 10h00 du matin). Avec des pointes à 80 % dans les transports, la fonction publique, l’industrie automobile. Aux grévistes de la CGIL (environ le tiers des syndiqués) se sont joints ceux des centrales «pro-gouvernementales», pour s’opposer à l’attaque au droit du travail (art. 18 du statut protégeant contre les licenciements abusifs), mais également pour dénoncer la politique budgétaire antisociale du gouvernement, les licenciements massifs et la crise chez Fiat, les privatisations, le racisme et la guerre. A 5 heures du matin aux piquets ouvriers devant l’Alfa, la Pirelli, l’Ansaldo, la Fiat et autres «fleurons» de l’industrie «italienne» ont débarqué les jeunes «désobéissants» no-global. Des tronçons de dizaines de milliers de militants contre la guerre ont fait des crochets vers des «objectifs militaires US», lors des cortèges syndicaux qui ont mis en marche des grevistes par centaines de milliers au travers de 120 villes italiennes.



Le 18 octobre, un foisonnement de figures sociales, de revendications et de problématiques ont déferlé dans un seul et même mouvement de masse. L’unité est là, elle est le fruit de la recomposition sociale à la base. Les «divisions» des directions syndicales, les gesticulations des «leaders» de l’opposition, les anathèmes pathétiques du gouvernement, avec la complicité des médias de régime, ne parviendront pas à effacer cet acquis, patrimoine de la lutte de classe. n



Federico M. Romo