Ni décalque, ni copie: Che Guevara et le socialisme

Ni décalque, ni copie: Che Guevara et le socialisme


Il y a 35 ans, jour pour jour, le 9 octobre 1967, Che Guevara tombait sous les balles des assassins de l’armée bolivienne, entraînés par Washington…. Blessé et capturé la veille, il a été abattu en détention. En hommage à ce révolutionnaire internationaliste, qui a profondément marqué le destin des luttes d’émancipation sociale de l’Amérique Latine et du monde entier, nous avons traduit cette contribution, présentée par Michael Löwy à la conférence annuelle de la Fondation Ernesto Che Guevara (Italie, juin 2001).


par Michael Löwy *



Dans un article publié en 1928, José Carlos Mariategui – le véritable fondateur du marxisme latino-américain – écrivait les lignes suivantes: «Bien sûr, nous ne voulons pas que le socialisme soit, en Amérique Latine, un décalque ou une copie. Il doit être une création héroïque. Nous devons donner vie, avec notre propre réalité, dans notre propre langage, au socialisme indo-américain. Voilà une mission digne d’une génération nouvelle»1. (…)


Nous ne savons pas si le Che connaissait ce texte de Mariategui (…). [Mais] on peut considérer qu’une bonne partie de sa réflexion et de sa pratique politiques, surtout dans les années 60, avait pour objectif de sortir de l’impasse à laquelle menait l’imitation servile du modèle soviétique et de l’Europe de l’Est. Ses idées sur la construction du socialisme sont une tentative de «création héroïque» de quelque chose de neuf, la recherche – interrompue et non-achevée – d’un modèle distinct de socialisme, radicalement opposé, sur de nombreux points, à la caricature bureaucratique «réellement existante».



De 1959 à 1967, la pensée du Che a beaucoup évolué. Il s’est éloigné toujours plus de ses illusions initiales sur le socialisme soviétique ou de style soviétique, c’est-à-dire de la version stalinienne du marxisme. Dans une lettre de 1965, adressée à un ami cubain, il critiquait durement le «suivisme idéologique» qui se manifestait à Cuba par l’édition de manuels soviétiques pour l’enseignement du marxisme. Ces manuels, des «briques soviétiques» selon ses propres termes, «présentent l’inconvénient de ne pas te laisser penser: le Parti l’a déjà fait pour toi et tu dois le digérer»2



On perçoit de manière toujours plus explicite, surtout dans ses écrits à partir de 1963, le rejet du «décalque et de la copie» et la recherche d’un modèle alternatif, la tentative de formuler une autre voie vers le socialisme, plus radicale, plus égalitaire, plus fraternelle, plus humaine, plus conséquente avec l’éthique communiste.



Sa mort, en octobre 1967, va interrompre un processus de maturation politique et de développement intellectuel autonomes. Son œuvre n’est pas un système fermé, une pensée achevée qui a réponse à tout. Sur de nombreuses questions – comme la planification, la lutte contre la bureaucratie, etc-, sa réflexion reste incomplète3.



Le moteur essentiel de cette quête d’un nouveau chemin – au-delà des questions économiques spécifiques – c’est la conviction selon laquelle le socialisme n’a pas de sens et, par conséquent, ne peut triompher s’il ne représente pas un projet de civilisation, une éthique sociale, un modèle de société totalement antagonique aux valeurs d’individualisme mesquin, d’égoïsme féroce, de compétition, de guerre de tous contre tous, de la civilisation capitaliste: ce monde dans lequel «l’homme est un loup pour l’homme».



La construction du socialisme est inséparable de certaines valeurs éthiques, contrairement aux conceptions économicistes –de Staline, de Krouchtchev et de leurs successeurs – qui ne considèrent que le «développement des forces productives». Dans une entrevue célèbre avec le journaliste Jean Daniel (juillet 1963), le Che développait déjà une critique implicite du «socialisme réel»: «Le socialisme économique sans la morale communiste ne m’intéresse pas. Nous luttons contre la misère, mais en même temps contre l’aliénation (…). Si le communisme se désintéresse des éléments de conscience, il peut être une méthode de répartition, mais il n’est plus une morale révolutionnaire» (L’Express, 25 juillet 1963).



Si le socialisme prétend lutter contre le capitalisme et le vaincre sur son propre terrain, celui du productivisme et de la consommation, en utilisant ses propres armes, la forme marchande, la compétition, l’individualisme égoïste, il est voué à l’échec. On ne peut pas dire que Guevara ait prédit le démantèlement de l’URSS, mais d’une certaine manière, il eut l’intuition qu’un système «socialiste» qui ne tolère pas la divergence, qui n’incarne pas de nouvelles valeurs, qui tente d’imiter son adversaire, qui n’a pas d’autres ambitions que de «rattraper et dépasser» la production des métropoles impérialistes, n’a pas d’avenir.



Pour le Che, le socialisme représentait le projet historique d’une nouvelle société, basée sur des valeurs d’égalité, de solidarité, de collectivisme, d’altruisme révolutionnaire, de libre discussion et de participation populaires. Ses critiques – grandissantes – à l’égard du «socialisme réel», tout comme sa pratique de dirigeant et sa réflexion sur l’expérience cubaine, sont inspirées par cette utopie communiste – dans le sens donné par Ernst Bloch4 à ce concept.



Trois aspects traduisent concrètement cette aspiration de Guevara et sa recherche d’une nouvelle voie: la discussion sur les méthodes de gestion économique, la question de la libre expression des divergences et la perspective de la démocratie socialiste. La premier occupait évidemment une place centrale dans la réflexions du Che, les deux autres – qui sont étroitement liés – sont beaucoup moins développés, avec des lacunes et des contradictions. Mais ils ne cessent pas d’être présents dans ses préoccupations et dans sa pratique politique.

1- Les méthodes de gestion économique


Il s’agit de la célèbre discussion de 1963-64 sur divers aspects de la planification, où il se trouvait en opposition aux partisans du modèle soviétique – le ministre du commerce extérieur, Alberto Mora, le directeur de l’Institut national de la réforme agraire, Carlos Rafael Rodriguez. (…) Les principaux aspects du modèle est-européen auquel s’opposait le Che étaient5:

  • la loi de la valeur comme loi objective des économies de transition au socialisme, thèse de Staline, soutenue alors par Charles Bettelheim;
  • la marchandise comme base du système de production;
  • la compétition (entre les entreprises ou entre les travailleurs) comme facteur d’augmentation de la productivité;
  • les méthodes de stimulation et de distribution plus individuelles que collectives;
  • les privilèges économiques des gestionnaires et des administrateurs;
  • les critères marchands dans les relations économiques entre pays socialistes.


(…) Dans son essai de mars 1965, Le socialisme et l’homme à Cuba, en analysant les modèles de construction du socialisme appliqués en Europe de l’Est, le Che rejetait la conception qui prétendait «vaincre le capitalisme avec ses propres fétiches». «En poursuivant la chimère de réaliser le socialisme à l’aide des armes pourries léguées par le capitalisme (la marchandise comme unité économique, la rentabilité, l’intérêt matériel individuel comme stimulant, etc.), on risque d’aboutir à une impasse (…). Pour construire le communisme, il faut changer l’homme en même temps que la base économique.»6



L’un des principaux dangers du modèle importé des pays de l’Est européen, c’est l’augmentation de l’inégalité sociale et la formation d’une couche privilégiée de technocrates et de bureaucrates: dans ce système de rétribution, «ce sont les directeurs qui, chaque fois, gagnent davantage. Il faut voir le dernier projet de la République démocratique allemande; l’importance qu’y assume la gestion du directeur, ou mieux la rétribution de la gestion du directeur»7. Le fond du débat relevait d’un affrontement entre une vision économiciste – la sphère économique comme système autonome, régi par ses propres lois, comme la loi de la valeur ou les lois du marché – et une conception politique du socialisme, c’est-à-dire la prise de décisions économiques – les priorités productives, les prix, etc. – d’après des critères sociaux, éthiques et politiques.



Les propositions économiques du Che – la planification contre le marché, le système budgétaire de financement, les stimulants collectifs ou «moraux» – avaient pour objectif la recherche d’un modèle de construction du socialisme basé sur ces critères et donc différent du modèle soviétique. Il faut ajouter que Guevara n’a pas réussi à développer une idée claire de la nature du système bureaucratique stalinien8.(…)

2 – La liberté de discussion


Dans la discussion économique de 1963-64, un aspect politique important qui mérite d’être souligné, est le fait même de la discussion. C’est-à-dire la position selon laquelle l’expression publique des désaccords est normale dans le processus de construction du socialisme. En d’autres termes, la légitimation d’un certain pluralisme démocratique dans la révolution.



Cette problématique n’existe implicitement que dans le débat économique. (…) Mais il adopta, à diverses occasions durant les années 60, une attitude favorable à la liberté de discussion dans le camp révolutionnaire et au respect de la pluralité des opinions.



Un exemple intéressant peut être trouvé dans son comportement à l’égard des trotskystes cubains, dont il ne partageait absolument pas les analyses (il les critiqua durement à plusieurs reprises). En 1961, lors d’un entretien avec l’intellectuel de gauche nord-américain Maurice Zeitlin, Guevara dénonça la destruction par la police cubaine des maquettes de La Révolution permanente, de Trotsky, comme une «erreur qui n’aurait pas dû arriver». (…)



L’exemple le plus net est sa réponse – dans un rapport de 1964, présenté à ses camarades du ministère de l’Industrie – à l’accusation de «trotskysme» portée à son encontre par certains Soviétiques: «A ce propos, je crois que, ou bien nous avons la capacité de détruire avec des arguments les opinons contraires, ou bien nous devons les laisser s’exprimer (…) . Il n’est pas possible de détruire les opinions par la force, parce que cela bloque tout développement libre de l’intelligence. Même en partant de la pensée de Trotsky, on peut retenir toute une série de choses; même si, à ce qu’il me semble, ses conceptions fondamentales étaient erronées et son action ultérieure erronée»9.



Ce n’est donc pas un hasard si la défense la plus explicite de la liberté d’expression et la critique la plus directe de Guevara à l’autoritarisme stalinien s’est manifestée sur le terrain de l’art. Dans son célèbre essai Le socialisme et l’homme à Cuba (1965), il dénonçait le «réalisme socialiste» de type soviétique comme l’imposition d’une seule forme d’art: celle «que comprennent les fonctionnaires». Avec cette méthode, soulignait-il, «on annihile l’authentique recherche artistique» et on met une véritable «camisole de force à l’expression artistique»10.

3 – la démocratie socialiste


Bien que le Che ne soit jamais parvenu à élaborer une théorie achevée du rôle de la démocratie dans la transition socialiste – peut-être la principale lacune de son œuvre, il rejetait les conceptions autoritaires et dictatoriales qui ont causé tant de dommages au socialisme durant le XXe siècle. A ceux qui prétendent «éduquer le peuple» par en haut (…), le Che répondait dans un discours de 1960: «La première recette pour éduquer le peuple, c’est de le faire entrer en révolution. N’ayez jamais la prétention d’éduquer le peuple pour que grâce à l’instruction sans plus, et avec un gouvernement despotique sur le dos, il apprenne à conquérir ses droits. Apprenez-lui, avant tout chose, à conquérir ses droits et ce peuple, lorsqu’il sera représenté dans le gouvernement apprendra tout ce qu’on lui enseignera et bien plus encore, sans aucun effort». (…)



C’est dans ce même sens que vont des notes critiques, datant de 1966, sur un manuel d’économie politique soviétique, qui contiennent cette formule politique nette: «Le grand crime historique de Staline fut d’avoir déprécié l’éducation communiste et d’avoir institué le culte sans limite de l’autorité»11.



La principale limite réside dans l’insuffisance de sa réflexion sur la relation entre démocratie et planification. Ses arguments pour défendre la planification contre les catégories marchandes sont très importants (…) mais ils laissent de côté la question politique clé: Qui planifie? Qui décide des grandes options du plan économique? Qui détermine les priorités de production et de consommation? Sans une véritable démocratie – c’est-à-dire sans:a) pluralisme politique; b) libre discussion des priorités et c) libre choix de la population entre les différentes propositions et plateformes économiques débattues – la planification se transforme inévitablement en un système bureaucratique et autoritaire de «dictature sur les besoins» (comme le démontre abondamment l’histoire de l’ex-URSS). En d’autres termes, les problèmes économiques de la transition au socialisme sont inséparables de la nature du système politique. (…)



Ce débat est lié au problème des institutions de la révolution. Guevara rejetait la démocratie bourgeoise, mais – malgré sa sensibilité anti-bureaucratique et égalitaire – il était loin d’avoir une vision claire de la démocratie socialiste. Dans Le socialisme et l’homme à Cuba, il reconnaît que l’Etat révolutionnaire peut se tromper, provoquant ainsi une réaction négative des masses qui l’oblige à une rectification (…). Mais, note-t-il, «il est évident que ce mécanisme ne suffit pas pour assurer des décisions efficaces et qu’il manque une connexion plus structurée avec la masse»12.



(…) Guevara confesse que le problème est loin d’avoir trouvé une solution adéquate, permettant un contrôle démocratique effectif: «Nous ne sommes pas encore parvenus à instaurer les institutions de la Révolution. Nous cherchons quelque chose de nouveau (…)»13



Nous savons que, dans les dernières années de sa vie, Ernesto Guevara avait beaucoup avancé dans sa prise de distance avec le modèle soviétique (…). [Dans une critique radicale inédite] du Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS, rédigée en 1966 (…), [il remarquait]: «En contradiction avec une conception du plan, comme décision économique des masses conscientes des intérêts populaires, on offre un placebo, dans lequel seuls les éléments économiques décident du destin collectif. C’est un procédé mécaniste, anti-marxiste. Les masses doivent pouvoir diriger leur destin, décider quelles parts de la production seront affectées respectivement à l’accumulation et à la consommation. La technique économique doit opérer dans les limites de ces indications et la conscience des masses doit assurer leur mise en œuvre»14.



En octobre 1967, les balles des assassins de la CIA et de leurs alliés boliviens ont interrompu ce travail de «création héroïque» d’un nouveau socialisme révolutionnaire et d’un nouveau communisme démocratique.



* Auteur de nombreux livres, dont La pensée de Che Guevara; La théorie de la révolution chez le jeune Marx; Dialectique et révolution; Marxisme et théologie de la libération, Patries ou Planète? Nationalismes et internationalismes de Marx à nos jours, La guerre des dieux, etc. Michael Löwy est chargé de recherches au CNRS à Paris. Il était l’un des invités de notre dernier Forum Socialiste national à Champfahy (près de la Neuveville).

  1. José Carlos Mariategui (1894-1930). L’un des principaux penseurs marxistes d’Amérique latine. Il est surtout connu pour ses Sept Essais d’interprétation de la réalité péruvienne (1928), Paris, Maspero, 1968. La citation de M. Löwy est tirée d’un article de septembre 1928, publié à l’origine dans la revue Arnauta (J.C. Mariategui, «Aniversario y balance», in : Ideología y Politica, Lima, Biblioteca Aumauta, 1971, p. 249
  2. Lettre du Che à un ami cubain (1965). Cette lettre fait partie des textes du Che qui demeurent inédits et n’ont pas été jusqu’ici publiés à Cuba. Carlos Tablada la cite dans son article «Le marxisme d’Ernesto (Che) Guevara», Alternatives Sud, vol. III, 1996, 2, p. 168. Du même auteur, voir aussi Che Guevara: L’économie et la politique dans la transition au socialisme, Pathfinder Press, 1992 et Cuba, quelle transition?, L’Harmattan, 2001.
  3. Une pensée ouverte… Fernando Martínez Heredia a raison de souligner que «le caractère incomplet de la pensée du Che a même des aspects positifs. (…) [Il] y signale des problèmes et des voies, montre des possibilités, exige de ses camarades qu’ils pensent, étudient, combinent pratique et théorie. Il devient impossible, lorsqu’on assume réellement sa pensée, de la dogmatiser (…)» («Che, el socialismo y el comunismo», in: Pensar el Che, Centro de estudios sobre América, Editiorial José Marti, La Havane, 1989, t. II, p. 30. Voir aussi le livre de Fernando Martínez Heredia, qui porte le même titre: Che, el socialismo y el comunismo, La Havane, Premio Casa de las Américas, 1989
  4. Ernst Bloch (1885-1977). Philosophe et sociologue allemand, exilé aux États-Unis dès 1935, il deviendra professeur à l’université Karl-Marx de Leipzig en 1949, puis à celle de Tübingen, après être passé à l’Ouest en 1961. De L’Esprit de l’utopie (1918) au Principe espérance (1954-1959), ce marxiste non orthodoxe s’est efforcé de restituer au socialisme sa dimension messianique laïcisée. A son propos, on peut lire: L’utopie concrète d’Ernst Bloch: une biographie, Paris, Editions Kimé, 2001, ainsi que le commentaire qu’en fait Raphaël Ramuz, assistant à l’Université de Lausanne, sur le site: www.remue.net/litt/bloch01.html (réd.).
  5. Sur le débat économique de 1963-64 à Cuba. Pour une présentation plus détaillée de cette discussion, voir le second chapitre du livre de M. Löwy, La pensée de Che Guevara, [réédité par les Editions Syllepse, Paris, 1997, ndlr].
  6. Ernesto Che Guevara, Œuvres 1957-1967 Tome 2., Paris, Maspero, 1971, p. 371-372.
  7. Ernesto Che Guevara. «Le plan et les hommes», in: Œuvres 1957-1967, t. 6, Textes inédits, Paris, Maspero, 1972, p. 90.
  8. Guevara et la critique de l’URSS. (…) Janette Habel a raison d’observer que Guevara a mis «trop l’accent, dans la critique économique des déformations staliniennes, sur le poids des rapports marchands et pas suffisamment sur le caractère policier et répressif du système politique soviétique» (J. Habel, préface à M. Löwy, La pensée de Che Guevara, Paris, Syllepse, 1997, p. 11).
  9. Che Guevara, «Il piano e gli uomini», Il Manifesto, no. 7, décembre 1969, p. 37 [en français dans Œuvres. t. 6, Paris, Maspero, 1972].
  10. E. Guevara, Œuvres 1957-1967, t. 2., Paris, Maspero, 1971, p. 379.
  11. E. Guevara, Œuvres 1957-1967, t. 2., Paris, Maspero, 1971, p. 87.
  12. Cité par Juan Antonio Blanco dans son livre, Tercer Milenio, una visión alternativa de la posmodernidad, La Habana, Centro Felix Varela, 1996, p. 56.
  13. E. Guevara, Œuvres 1957-1967, t. 2., Paris, Maspero, 1971, p. 369-375.
  14. Carlos Tablada, «Le marxisme d’Ernesto (Che) Guevara», p. 173.