Péage urbain

Péage urbain : Vider les rues des voitures des pauvres pour que les riches puissent rouler plus vite?

Le PS genevois propose d’étudier la mise en place d’un péage urbain. Ensemble à Gauche (EAG) a fait connaître son opposition à ce projet qui, sous prétexte de défendre des visées écologistes, promet une véritable ségrégation socio-territoriale. La réduction massive du trafic motorisé individuel est une nécessité urgente mais le péage urbain est un moyen injuste et inefficace d’y parvenir (ou pas).

La Ville de Genève étant con­cernée au premier chef, Rémy Pagani, magistrat d’EAG et membre de solidaritéS, a soumis une note au Conseil administratif pour réaffirmer l’opposition de la Ville à ce projet, comme en 2008, lors d’une proposition similaire. Ce préavis ayant été rejeté, Rémy Pagani a participé à une action militante devant l’Hôtel des Bergues pour démontrer les conséquences d’un tel projet: au-delà de la barrière du péage ne passent plus que les véhicules de luxe.

 

 

Un statu quo intenable

 

La situation en matière de trafic automobile est intenable: pollution, bruit, émissions de CO2, embouteillages, etc. Mais ce projet prend les choses à l’envers. En sélectionnant l’entrée en ville des véhicules en fonction des moyens financiers du conducteur, on ne s’attaque pas au trafic automobile en général: on vide juste les rues des voitures des pauvres… pour que les riches puissent rouler plus vite!

Un péage aggraverait donc la ségrégation sociale ville-périphérie, risquant d’accélérer le processus de gentrification en cours. Or la ville doit rester accessible à toutes et tous, indépendamment de leur statut social. Ce ne sont pas les pauvres qu’il faut décourager de venir en ville en voiture, mais bien tous les automobilistes pouvant faire autrement… qu’ils soient millionnaires ou à l’aide sociale!

 

 

Efficacité douteuse et effets secondaires

 

L’expérience à l’étranger montre que la moitié des recettes, au minimum, tirées de ces péages part en frais de fonctionnement. Aujourd’hui déjà, on «peine» à trouver des moyens pour les TPG ou pour créer des pistes cyclables… et on trouverait des millions pour mettre en place et surveiller des dizaines de caméras Big Brother enregistrant les plaques de tous les véhicules allant et venant?

De plus, en créant une incitation à contourner la ville, un péage générerait un report de trafic dans les communes périphériques comme on l’a vu à Londres, où la pollution de l’air n’a finalement que très peu diminué. Les communes suburbaines hors du champ du péage seraient deux fois perdantes: leurs habitant·e·s devraient payer pour venir en ville en auto et subiraient une hausse du trafic et de ses nuisances.

Or, pour être véritablement «efficace», le péage doit être cher, donc socialement injuste. On risque alors d’ajouter à la tension cyclistes-piétons/voitures déjà existante, une tension riches/pauvres, aggravant encore la situation.

 

 

Pour des solutions vraiment radicales

 

Il n’existe pas de solution miracle aux problèmes du trafic motorisé, mais une série de mesures à conjuguer: amélioration de la fréquence, de desserte et de la vitesse des TPG (à des tarifs abordables), multiplication des zones 20 et 30 km/h, réduction du stationnement en ville et P R en périphérie, créations de pistes cyclables, zones piétonnes, nouvel aménagement du territoire, etc. Des mesures écologiquement nécessaires et socialement justes que nous défendons et continuerons de défendre! 

 

Thibault Schneeberger