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LPOL : Questions sur la boîte de Pandore des articles illégaux de la lex Maudet

En septembre 2014, une majorité du Grand Conseil votait une Loi sur la police (LPol) mal ficelée, liberticide et antisyndicale, contre laquelle nous lancions un référendum, à l’appui du NON de gauche indispensable, pour renvoyer à l’expéditeur cette Lex Maudet bâclée et problématique.

Cette LPol réincorporait notamment des dispositions introduites en février 2013 dans la Loi sur la police existante, et qui avaient alors été attaquées, à juste titre, devant le Tribunal fédéral (TF) par des élu·e·s PS et Verts. Moins d’un mois après le vote de cette LPol au parlement, le TF tranchait d’ailleurs sans ambiguïté en faveur de ces re­cou­rant·e·s et annulait des dispositions relatives à l’«observation préventive» (art. 21a, al.2), aux «recherches secrètes» (art. 21b), ainsi qu’aux «enquêtes sous couverture» (art. 22) estimant que ces dispositions ne remplissaient pas les «exigences d’un Etat de droit» en matière de contrôle judiciaire, de droit de recours et d’information post hoc des personnes concernées.

Cet arrêt du TF jetait une lumière bienvenue sur l’esprit peu démocratique de la LPol et de la majorité qui l’a votée; il apportait de l’eau au moulin des op­po­sant·e·s et représentait une raison de plus de pour voter NON le 8 mars prochain.

 

 

Errare humanum est, perseverare diabolicum

 

Le scandale est en effet patent : des dispositions légales, annulées par le TF et donc immédiatement supprimées de la loi genevoise actuellement en vigueur, ont été réintroduites par la petite porte dans la nouvelle loi et devront, le cas échéant, faire l’objet d’un nouveau recours pour être annulées une deuxième fois! Renaissant de leurs cendres sous la forme des articles 56, 57 et 58 de la nouvelle LPol, ces dispositions, à elles seules, justifieraient de voter NON à la loi pour sanctionner cette forfaiture.

Mais le scandale va plus loin : dans la brochure de votation, envoyée à chaque électeur et électrice, le Conseil d’Etat occulte volontairement et de manière peu démocratique toute la problématique. Les autorités appellent donc sans sourciller le corps électoral genevois à voter OUI à des dispositions pourtant reconnues contraires à l’Etat de droit, sans piper mot de l’arrêt du TF à ce sujet et des conséquences qu’elles entendent en tirer. Une démarche pour le moins malhonnête.

 

 

Des questions embarrassantes

 

Au-delà de la mauvaise foi, le fait de ne pas aborder cette question découle sans doute aussi d’un autre problème. En effet, tout débat sur ces articles appelle au moins trois questions plutôt gênantes pour les autorités :

 

— Comment et dans combien de cas ces articles illégaux ont-ils été utilisés dans la période allant de février 2013 à octobre 2014?

En effet, soit ces articles ne servaient à rien et leur réintroduction au forceps dans la LPol serait incompréhensible, soit ils répondaient, et c’est le plus probable, à la volonté de donner une base « légale » – ou plutôt en l’espèce pseudo-légale ! – à des pratiques policières en cours…

 

— Quelles garanties avons-nous que le « matériel » recueilli illégalement dans le cadre de la mise en œuvre ces articles n’ait pas été utilisé et soit détruit ?

En effet, pour que le jugement du TF déploie ses effets, encore faut-il que les autorités genevoises en tirent toutes les conséquences, ce qui ne paraît pas être le cas, et qu’elles rendent des comptes à ce sujet en toute transparence.

 

— Quelles garanties avons-nous, si ce « matériel » a été utilisé d’une manière ou d’une autre, qu’une réparation adéquate soit attribuée aux personnes victimes de ces abus et que les suites judiciaires éventuelles en découlant soient annulées ?

 

Ces interrogations seront posées par le soussigné sous forme de question écrite urgente au Conseil d’Etat lors de la prochaine session du parlement cantonal le 19 février. 

 

Pierre Vanek