Conservatoire

Conservatoire : Toujours dans la ligne de mire

 

Monika Maire-Hefti, conseillère d’Etat socialiste en charge du dossier, l’annonce dans la presse : le Conseil d’Etat veut « réduire la voilure ». La conseillère a imaginé un stratagème pour le Conservatoire : elle propose d’augmenter les tarifs d’écolage en fonction du revenu des parents, la taxe d’inscription restant inchangée pour les plus bas revenus. Belle posture sociale à peu de frais.

Ainsi, au budget 2015 les revenus du Conservatoire passent de 2,8 à 3,5 millions. Mais il est plus facile d’inscrire une ligne dans un budget que de voir l’argent réellement entrer car, en réalité, rares sont les parents ayant des bas revenus qui se permettent l’inscription d’un enfant au Conservatoire (il faut compter 1100 francs par année pour un enfant de 7 ans à raison d’une leçon de 30 minutes par semaine). L’essentiel des élèves connaîtra donc une augmentation des tarifs, on ne sait pas encore à quelle hauteur, et on peut bien imaginer qu’une partie des parents renoncera aux cours, mais là le Conseil d’Etat sera encore gagnant financièrement.

Actuellement, l’écolage est pris en charge à 75 % par l’institution et à 25 % par les étu­diant·e·s. Les pro­fes­seur·e·s sont, en règle générale, employés à temps partiel, et leur taux d’occupation dépend du nombre d’élèves; la baisse du nombre d’élèves entraîne automatiquement une baisse de l’occupation, donc des revenus des profes­seur·e·s. Et l’Etat, tout à ses calculs à court terme, pourrait bien spéculer sur une baisse d’attractivité du Conservatoire, en se drapant dans une posture « sociale ».

«Quand il n’y a plus de gras à enlever, il n’y a pas d’autres choix que de remettre en cause les prestations existantes» a déclaré Monika Maire-Helti lors de la conférence de presse annonçant ces mesures. Plus de « gras » vraiment ? Le Conseil d’Etat vient de publier le rapport 2012 de la fiscalité neuchâteloise; sans surprise, les catégories de revenus au-delà de 150 000 francs (la statistique ne s’intéresse pas à différencier les revenus plus élevés) augmentent le plus et, du côté de la fortune, le nombre de millionnaires est toujours à la hausse passant de 2472 à 2515 (là aussi la statistique s’arrête au million, on ne saura rien de l’évolution des multimillionnaires).

Non, Madame Maire-Hefti, le « gras » ne cesse d’augmenter, il nous étouffe même et c’est bien lui qui pourrait finalement nous faire crever. Toutes les mesures fiscales de ces dernières années ont surtout visé à ménager le « gras », que ce soit au niveau des personnes morales ou des personnes physiques. Pas étonnant que les inégalités explosent et que l’Etat se retrouve à sec.

Le Conservatoire, ce n’est pas seulement des emplois, c’est la garantie de l’existence d’une vie culturelle et musicale de qualité, c’est l’enrichissement précieux de nos vies qui valent mieux que d’assurer le maintien du gras des possédants. La politique sociale passe par la redistribution des richesses via les impôts, pas par des augmentations de taxes démagogiquement liées aux revenus. 

 

Henri Vuilliomenet