PLR et UDC battus en votations référendaire sur le logement

PLR et UDC battus en votations référendaire sur le logement : Vivre ici, habiter ici, rester ici!

Dimanche dernier, les Zurichois·e·s ont voté sur la « fixation d’un quota minimal de logements bon marché ». Par un oui à 58,4 %, ils·elles ont approuvé la modification dans ce sens de la loi cantonale sur l’aménagement du territoire et les constructions.

 

Les communes peuvent désormais obliger les propriétaires fonciers à construire un quota de logements à loyers modérés, si leur propriété gagne en valeur, notamment suite à un changement d’affectation.

«Le canton de Zurich a tout à offrir. A l’exception d’appartements à loyer modéré.» peut-on lire sur le site de la campagne «Ici on est chez nous» (hier-daheim.ch) en faveur du oui. Sous le slogan «Vivre ici, habiter ici, rester ici». la campagne a rassemblé une large coalition de personnes, partis, associations et coopératives d’habitation, un spectre politique allant d’Alternative Linke (AL) au PDC et aux Verts libéraux, en passant par le PS. Tou·te·s ont soutenu la revendication de zones avec des quotas d’appartements à loyer modéré, notamment pour garantir une certaine mixité sociale dans les communes du canton.

En effet, le droit au logement et la mixité sociale sont menacés dans de nombreuses communes zurichoises et risquent de céder la place à la ségrégation, la plus grande partie des nouveaux appartements mis sur le marché étant vendus ou loués à des prix abordables uniquement pour les plus nantis.

Depuis 2005, le prix au mètre carré pour des appartements à louer a augmenté de 20 % en moyenne et cette spirale vers le haut semble sans fin. Le marché ne répondant pas aux besoins de la majorité des ha­bi­tant·e·s, l’introduction de ce nouvel article de loi, autorisant les communes à prévoir un quota minimum d’appartements à prix modeste en cas de changement d’affectation, s’avérait nécessaire. Pour ces appartements, les loyers seront fixés sur la base des coûts et les communes édicteront des prescriptions en matière d’occupation.

 

 

Les défenseurs du marché crient à l’expropriation

 

En octobre 2013, le parlement cantonal zurichois avait adopté cette modification de la loi cantonale sur l’aménagement du territoire et les constructions. Sans surprise, l’UDC et le PLR ont lancé un référendum pour s’y opposer, le peuple a donc été appelé de se prononcer à ce sujet dimanche passé.

Face à la situation extrêmement tendue sur le marché de logement zurichois, nul ne peut nier le fait qu’il est difficile, voire impossible pour la population à revenus moyens ou modestes de trouver un logement. Le bien-fondé de l’objectif de créer plus d’appartements à prix modéré pouvant difficilement être remis en cause, les partis bourgeois et la Fédération Immobilière se sont attaqués aux moyens prévus d’atteindre cet objectif.

Selon eux, le nouvel article de loi donnerait trop de pouvoir aux collectivités publiques, celles-ci pouvant dicter aux propriétaires fonciers le type d’appartement à construire et la manière de calculer le loyer. Ils argumentaient qu’une telle intervention dans la propriété privée correspondait à une expropriation de fait. Les propriétaires fonciers et promoteurs immobiliers étant ravalés ainsi au rang de « marionnettes » des communes, il ne serait plus intéressant (et assez lucratif) pour eux de construire. Par conséquent, moins d’appartements seraient construits, ce qui aggraverait la pénurie de logements.

 

 

Assurer le droit au logement ou garantir le droit absolu des  propriétaires ?

 

Au vu de la situation du marché de logement à Zurich, et ailleurs en Suisse, cette argumentation en faveur du seul marché et contre toute intervention étatique paraît particulièrement cynique. Il saute aux yeux de cha­cun·e que le « marché libre » du logement ne répond pas aux besoins de la majorité des habitant·e·s.

De plus, le marché de l’immobilier est si lucratif que la crainte que les propriétaires fonciers ne construisent plus, s’il y a quelques règles à respecter est dépourvu de fondement, d’autant que l’obligation de construire un certain pourcentage de logements à prix modeste entre en vigueur uniquement en cas de changement d’affectation augmentant la valeur de la propriété. Par contre, une garantie absolue de la propriété privée mènerait à une accentuation de la pénurie aigue d’appartements à prix modérés dans les communes zurichoises et le danger de ségrégation s‘aggraverait.

Le 18 mai dernier, la Ville de Berne votait sur une initiative similaire à celle du Canton de Zurich. Une majorité écrasante de 71,56 % des votant·e·s avait dit oui à cette initiative pour plus de logement à loyer avantageux. A Nidwald aussi, on vient de voter à plus de 71 % de oui en faveur de la promotion de logements à loyer modéré. Face à ces succès populaires successifs, ne faudrait-il pas réfléchir à une loi au plan national pour sortir au moins une partie de la construction de logements de la logique du marché ?

 

 

Un « marché libre » du logement, vraiment ?

 

Habiter n’est pas une marchandise, mais un droit et un besoin fondamental. Pour l’achat ou la location de marchandises quelconques, une auto par exemple, le·la con­som­mateur·trice peut décider relativement librement s’il veut conclure un contrat ou non. Par contre, on ne peut pas décider de ne pas habiter. Tout un cha­cun·e a besoin d’un toit et est contraint de conclure un bail à loyer. Pour l’une des parties du bail, il s’agit de satisfaire un besoin fondamental, pour l’autre il s’agit de rentabiliser ses capitaux.

Avec un tel déséquilibre structurel à sa base, le marché de logements ne peut jouer « librement ». Un regard critique sur le contrat de bail montre qu’il n’existe pas de liberté contractuelle et que le libre marché du logement est une fiction. Ainsi, donner la possibilité aux collectivités de sortir une partie de la construction et de la location d’appartements de la logique du marché et du profit est un minimum nécessaire pour répondre aux besoins de la population.

 

Mirjam Brunner