Non aux milliards pour les Gripen!

Après le dépôt d’un nombre largement suffisant de signatures validées (60 000 sur un total de 100 000 récoltées) pour le référendum contre l’achat des avions de combat Gripen, le Conseil fédéral a fixé la date du vote au 18 mai, en même temps que la votation sur l’initiative de l’USS pour l’introduction d’un salaire minimum.

Une victoire en votation de la droite suisse, financée par le lobby militaro-industriel, n’est pas du tout acquise d’avance. Le résultat dépendra réellement de la mobilisation que réussiront les forces politiques et sociales opposées à cet achat.

 

Des arguments «sécuritaires»
qui ne tiennent pas debout

Les arguments de la droite favorable à l’achat des Gripen vont porter principalement sur les aspects sécuritaires et sur les retours d’ascenseur économiques que les affaires liées à l’achat amèneraient pour des entreprises suisses. Mais cette fois il sera plus difficile pour la droite de faire de l’achat des nouveaux avions de combat une question de vie ou de mort pour l’armée. Sur un plan factuel, il devrait être possible de contrer l’argumentation sécuritaire, notamment en relevant que pour le contrôle de l’espace aérien, la trentaine d’avions F/A-18 sont bien suffisants, en tout cas encore pour quinze à vingt ans, de l’avis même du Conseil fédéral.

Mais il sera encore plus important de poser l’aspect financier au centre du débat. En raison des coûts d’entretien, d’armement et de modernisation, les Gripen coûteront trois fois leur prix d’achat au cours des vingt ou trente ans d’utilisation.

 

Un prix payé
en coupes antisociales

Est-ce que les Suisse·sse·s sont d’accord de mettre des milliards pour des avions de combat qui n’existent encore que sur le papier et qui sont largement superflus, alors que la droite fait manquer l’argent pour la sécurité sociale, la formation, les transports publics, la conversion vers les énergies renouvelables, l’emploi des jeunes ?

Il sera important d’exiger toute la transparence sur les enjeux économiques et financiers. Combien d’argent l’avionneur suédois SAAB va-t-il investir dans la campagne qu’il a démarré lors des compétitions de ski à Wengen ? Pourquoi les monomoteurs Gripen achetés par la Suisse coûteront-ils 142 millions de francs la pièce, alors que le Brésil ne paie que 119 millions pour le même avion ?

Visiblement, il y a de l’argent facile à gagner pour quelques entreprises. Les manœuvres en cours concernant l’attribution des affaires de compensation à des entreprises suisses en sont un symptôme. Après avoir voté pour l’achat au parlement, certains lobbyistes comme la conseillère nationale Perrinjaquet (PLR/NE) s’inquiètent publiquement que le morceau pour les industries de leur région ne soit trop petit.

 

L’arnaque des «compensations»

Les tractations se passent secrètement entre entreprises concernées (armements, métaux et machines) et Armasuisse, l’agence chargée des achats d’armement de l’armée. Le secret est indispensable pour ne pas dévoiler la réalité sur ces affaires de compensation. Mais un rapport de 2008 du Contrôle fédéral des finances démontrait qu’au lieu des compensations à 100 % promises lors de l’achat des F/A-18, les fournisseurs US n’ont acheté aux entreprises suisses que pour 40 % du coût d’achat des avions. De plus, ces commandes étaient fortement concentrées sur quelques grosses entreprises. Aujourd’hui, en raison de l’énorme différence de taille entre le secteur industriel concerné aux USA et celui, bien plus petit en  Suède, il y a fort à parier que la part de ces accords de compensation qui se réaliseront sera encore plus petite. 

 

Tobia Schnebli