Mise au point

Mise au point…



Dans le n° 11 de solidaritéS, nous avons publié un article intitulé «Guerre pour la terre, terre pour le profit», signé François Iselin, membre de notre Comité de rédaction. Cet article traitait de la politique coloniale des autorités israéliennes.



Comme la plupart des articles de notre bimensuel, celui-ci était signé. Il n’engage donc que la responsabilité de son auteur. Cependant, il contient une formule inacceptable, qui a échappé à l’attention de notre secrétariat de rédaction.



Stigmatisant les orientations bellicistes de la bourgeoisie israélienne, il la décrit comme une «minorité de nantis parrainée par une diaspora lontaine qui vénère le Dieu argent autant qu’elle, protégée par une armée qu’elle manipule et exploitant son propre peuple qu’elle méprise».



S’il me paraît absolument justifié d’analyser la société israélienne comme une société de classe, même si cela est notoirement insuffisant pour en comprendre la dynamique politique, la référence à la «diaspora» fait ici problème.



Qu’est-ce que la «diaspora» (du grec: dispersion)? Conventionnellement, l’ensemble des communautés juives vivant hors des frontières d’Israël, qui sont supposées partager une lointaine origine commune. Admettons un instant cette définition, qui pose en réalité des problèmes historiques complexes. La moindre des choses est de reconnaître alors les fractures de classe qui divisent cette «diaspora».



Ainsi, si une petite fraction de la diaspora juive appartient sans conteste aux classes dominantes des Etats-Unis, de l’Europe Occidentale et d’ailleurs, il n’en reste pas moins vrai que l’écrasante majorité de ses membres font partie des classes dominées.



Sauf à considérer les Juifs comme un peuple de brasseurs d’affaires, un vieux mythe antisémite qui a notamment servi à justifier la politique génocidaire nazie, il n’y a aucune raison d’affirmer que la «diaspora» juive «vénère le Dieu argent» plus que n’importe quelle autre communauté, définie sur une base religieuse, ethnique ou nationale.



Il va sans dire que je ne fais pas l’insulte à François Iselin, dont je connais bien les opinions et les combats, de le considérer comme antisémite. Néanmoins, cette formule est politiquement inacceptable et n’avait pas sa place dans notre journal.


Jean Batou