OMC, TISA, APT...

OMC, TISA, APT... : Contre de nouveaux traités de «libre»-échange négociés dans le dos des peuples

Quinze ans après l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI), bloqué par une vague mondiale de protestations, des négociations secrètes en marge de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) tentent à nouveau un véritable coup d’état mondial. Une nouvelle mobilisation contre ces traités de « libre »-échange est indispensable. 

 

Négociés en secret, de nouveaux traités (TiSA, APT, …) permettraient aux multinationales d’attaquer en justice tout Etat dont les décisions pourraient nuire à leurs profits. Des amendes se chiffrant par milliards – imposées par des tribunaux extrajudiciaires composés d’avocats d’affaires – obligeraient les Etats à privatiser leurs services publics, puniraient un droit du travail trop contraignant ou encore une législation environnementale trop précise.

 

Un traité peut en cacher un autre

Le 3 décembre, l’OMC se réunit à Bali. Les prétentions exorbitantes des multinationales ont bloqué les négociations depuis une douzaine d’années, d’où le recours à ces négociations parallèles et secrètes pour imposer différents accords :

 

L’Accord sur le Commerce des Services (TiSA) actuellement négocié à Genève entre 27 pays dont les Etats-Unis, l’UE et la Suisse, imposerait la dérégulation de tous les services (notamment financiers) et la privatisation des services publics. En effet, les Etats devraient subventionner autant les écoles et les hôpitaux privés que ceux du public, au nom d’une soi-disant « neutralité concurrentielle ». Nos impôts financeraient ainsi leurs bénéfices. Avec cet accord, la « régulation » des pratiques des « travailleurs détachés », aujourd’hui sous l’égide de l’OIT (Organisation Internationale du Travail) passerait en main de l’OMC. Autant dire que le dumping généré par ces pratiques scandaleuses (on se rappelle l’affaire des « travailleurs chinois » payés 5 francs de l’heure pour monter des stands à Palexpo) a de beaux jours devant lui.

 

L’Accord de Partenariat Transatlantique (APT) entre l’Amérique du Nord et l’UE (et qui s’imposerait à la Suisse via les bilatérales) attaquerait la souveraineté des Etats et des citoyens dans tous les domaines, notamment l’agriculture et l’alimentation. Ceux-ci ne pourraient plus interdire les OGM (ni même les étiqueter) ou les additifs alimentaires toxiques, ni garantir la protection des données sur Internet, ni réglementer la finance. Même une municipalité n’aurait plus le droit de choisir le type d’aliments pour ses cantines scolaires, car les Etats devraient veiller à la « mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures » avec le traité.

 

Sous couvert de stimuler une économie en crise, il s’agit en réalité d’éliminer toute règle pouvant limiter les bénéfices des transnationales et de livrer au capital financier des biens communs fruits de tant de luttes et sacrifices. Il s’agit des immenses « marchés » mondiaux des services publics, tels que la santé (6460 milliards $) ou l’éducation (2500 milliards $).

Déjà, une multinationale réclame des milliards à l’Allemagne pour sa sortie du nucléaire?; une autre 1 milliard à la France pour le retrait d’un permis pour les gaz de schiste?; une troisième attaque un Etat qui a relevé son salaire minimum. L’OMC a même condamné les Etats-Unis pour des boîtes de thon labellisées « sans danger pour les dauphins » ! Les traités bilatéraux récemment signés entre la Suisse et la Chine, comme avec la Colombie, font fi des aspects sanitaires et environnementaux de production, comme des libertés syndicales.

 

Le «libre»-échange menace la démocratie

Une fois adoptés, ces traités seraient imperméables aux alternances politiques et aux mobilisations populaires, car ils ne pourraient être amendés qu’avec le consentement unanime des pays signataires. C’est la souveraineté populaire, le principe même d’un contrôle du politique (et des tribunaux) sur l’économie et la société qui est en jeu. On comprend alors le secret qui entoure ces négociations. Alors que des centaines de multinationales y participent, rien ne doit filtrer aux journalistes et citoyen·ne·s. Ils seront informés lorsqu’il sera trop tard.

Mais comme pour l’AMI, les peuples peuvent encore bloquer cette forfaiture des élites, s’ils sont informés. De par la planète, les mouvements sociaux appellent à une journée mondiale d’action lors de l’ouverture de la conférence interministérielle de l’OMC le 3 décembre prochain. À Genève aussi, nous manifesterons. 

 

Olivier de Marcellus

 

 

MANIFESTATION

Pour les droits des peuples, contre le «libre»-échange!

Mardi 3 décembre, 18h

Esplanade du Mont Blanc (lieu à confirmer)

Genève

 

 

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Transnationale contre souveraineté populaire au Costa Rica

 

Un exemple récent – et éloquent – de la dictature du «libre»-échange: une pétition en ligne lancée ce mois par Mining Watch dénonce la compagnie minière Canadienne Infinito Gold. Celle-ci réclame 1 milliard de dollars au Costa Rica pour le rejet d’un projet de mine, au nom d’un traité bilatéral Canada/Costa Rica. 

Qu’importe que cette affaire ait fait l’objet d’une énorme mobilisation nationale?; que 75% de la population s’y oppose?; qu’une loi interdise toute mine à ciel ouvert dans le pays depuis 2011?; que la Cour Suprême du Costa Rica ait rejeté trois fois la plainte de la compagnie. Infinito Gold se retourne à présent vers un «tribunal» commercial international à Washington, le Center for the Settlement of Investment Disputes de la Banque Mondiale.

Le nombre et la taille de ces extorsions augmentent rapidement. Il y a un an, l’Equateur s’est vu condamné à verser la somme record de 2 milliards d’euros à une compagnie pétrolière, et le nombre d’affaires soumises aux tribunaux commerciaux spéciaux a été multiplié par dix depuis 2000.