Gériatrie nucléaire

Gériatrie nucléaire : Au secours!

Deux nouvelles, concernent nos deux plus vieilles centrales, celle de Beznau et de Mühleberg, jettent un éclairage terrifiant sur la politique réelle des nucléocrates suisses.

 

La centrale nucléaire argovienne de Beznau, exploitée par Axpo, en activité depuis 1969 à Döttingen (AG), détient le record du monde de vétusté atomique, depuis l’arrêt de la centrale britannique d’Oldbury en 2012.

Beznau a fait son temps. Ses problèmes de sécurité le montrent : l’installation présente un manque de fiabilité de l’approvisionnement électrique, des fissures dans le manteau du réacteur et dans l’enceinte de confinement. L’alimentation électrique de secours, qui devrait contribuer à faire tourner les pompes pour empêcher la fusion du cœur du réacteur après un tremblement de terre par exemple, n’est pas à la hauteur…

Or, photos à l’appui, l’Argauer Zeitung du 16 octobre, évoque l’étape en cours du ré-équipement de la centrale, avec un système de production électrique de secours autonome, tournant au diesel, censé contribuer à pérenniser son fonctionnement pour une durée indéterminée. Le coût de cette plaisanterie… Non pas 5, non pas 50, mais 500 millions de francs ! Un demi-milliard d’investissement, pour une bloc de production électrique, non renouvelable, au fonctionnement polluant, inutilisé – on l’espère – la plupart du temps.

Un délire absolu : ce type de replâtrage ne conduira jamais à assurer à la plus vieille centrale du monde une sécurité équivalente à celle d’une installation neuve, qui serait dangereuse, trop dangereuse, inacceptable, mais aussi, sans doute… moins dangereuse que la bombe de Beznau.

Ainsi, si l’exploitant mise sur ce genre de replâtrage, dont le ré-­équipement en alimentation électrique de secours n’est qu’une étape (sur trois), ce n’est pas pour des motifs techniques. C’est pour des raisons… anti-démocratiques : parce qu’il sait qu’une nouvelle centrale échouerait probablement devant le peuple en votation. Alors qu’aucune écueil de ce type n’entrave cette gériatrie nucléaire, en douce, à l’abri des discours « rassurants » du Conseil fédéral sur une sortie du nucléaire, décidée certes… mais pour la Saint-Glinglin.

Les nouvelles de la deuxième centrale la plus vieille du pays, soit de Mühleberg sont aussi inquiétantes. En effet, les FMB devraient investir 400 millions pour des travaux sur trois ans permettant d’exploiter la centrale jusqu’en 2026. A défaut, une fermeture en 2017 est prévue par l’Inspection fédérale de sécurité nucléaire (IFSN).

Or les FMB ne veulent ni payer, ni arrêter  leur chaudière à plutonium dans les délais, déjà trop longs, décidés par l’autorité de sûreté. Ils ont entrepris, apprenait-on fin septembre, pour des motifs économiques de « négocier » avec celle-ci une rallonge d’exploitation de plusieurs années jusqu’en 2019 au moins, sans mise en conformité avec les exigences de l’IFSN ! L’entrée en matière de nombre de politiques sur ce marchandage montre que le baratin fédéral sur des critères « objectifs », techniques et non politiques… concernant la sécurité des centrales est bidon. Une seule décision s’impose : l’arrêt immédiat de Beznau et de Mühleberg ! 

 

Pierre Vanek