Dix ans que solidaritéS veut faire payer les riches

Dix ans que solidaritéS veut faire payer les riches


solidaritéS dès 1992 a été l’instrument d’une volonté d’engager une contre-offensive face à la droite néo-conservatrice, en particulier sur le plan fiscal, et de renforcer un pôle de résistance au sein de la gauche et des syndicats.



Au début de l’automne 1992, notre mouvement, qui venait de se constituer à Genève proposait à la gauche et aux écologistes de lancer de manière unitaire une initiative populaire de «solidarité fiscale» instituant une contribution spéciale des grosses fortunes et des grandes sociétés pour alimenter un fonds affecté à l’aide aux personnes âgées, aux chômeurs/euses, à la construction de logements bons marchés notamment. solidaritéS rappelait que durant les six ans précédant la crise budgétaire que traversait le canton (1983-89) la fortune déclarée à Genève avait crû de 1,5 milliard l’an et le capital de 2,1 milliards.

Capital et bénéfices tabous?


L’initiative devait, selon les estimations de l’époque, rapporter 80 millions sur les fortunes, la contribution supplémentaire partait à 500000 Fr. de fortune, elle prélevait en outre environ 30 millions sur le capital des sociétés supérieur à 10 millions et une dizaine de millions avec une taxe de 5% sur le bénéfice net des sociétés imposées à moins de 6% (ce qui ne touchait pour l’essentiel pas les PME).



Tout l’automne on discuta la proposition ci-dessus qui butait sur les réserves de tous ceux à gauche, chez les Verts ou du côté de directions syndicales, qui ne voulaient pas toucher à l’imposition des grosses entreprises, de crainte d’être accusés de mettre l’emploi en péril.



Sur la lancée d’une grande manifestation populaire et syndicale que nous avions largement impulsée le 8 décembre 1992, solidaritéS tranchait dans le vif et décidait de lancer le 15 février 1993 deux initiatives: l’une était soutenue largement par la gauche et les syndicats. Dite «solidarité fiscale» (labellisée ensuite IN 102) elle comportait le volet de taxation des grandes fortunes.

solidaritéS garde le cap


Cele-ci sera lancée unitairement, mais soldaritéS ne renoncera pas au volet concernant les entreprises et lancera simultanément et pratiquement seul (sans le soutien du PdT par exemple) l’initiative «Pour des emplois d’utilité publique et écologique» (IN 101), les prélèvements sur les entreprises étant directement affectés à la création d’emplois par les pouvoirs publics. C’est notre mouvement qui portera l’essentiel de la récolte de signatures: 100 de nos camarades mobilisé-e-s sur des stands lors du week-end des 5 à 7 mars 1993 feront rentrer en trois jours – à l’appui des deux initiatives – près de la moitié des 10000 signatures nécessaires… L’aboutissement des initiatives sera également avant tout le fait de nos militant-e-s. A signaler qu’au final, en votation, les deux propositions atteindront le même score de 33,6 % (avec cependant près de 400 voix d’avance pour celle qui taxait le capital et les bénéfices!)

Nos responsables derrière les barreaux?


En face, la droite orchestrera une campagne de dénigrement massive: «S’il existait des lois qui protègent le bien-être public, les responsables de solidaritéS seraient déjà inculpés» lisait-on par exemple en décembre 1992 dans la Tribune de Genève! L’hebdo tous-ménages gratuit GHI dénoncera les «délires de la gauche» et s’indignera de ce que le front mené par le «nouveau-né d’extrême-gauche solidaritéS» ait même réussi à embarquer le parti socialiste dans cette «galère» … L’autre tous-ménages patronalo-immobilier L’Extension titrera et brodera sur le thème des «Petits propriétaires étranglés».



Malgré cette hystérie populiste antifiscale ces initiatives aboutiront en juin 1993 …et en octobre de la même année, solidaritéS remportera huit sièges au parlement dans le cadre du front électoral d’Alliance de Gauche, qui fait un tabac avec 21 sièges et jouera un rôle essentiel pour casser les reins au gouvernement monocolore de droite (1993-97) et à ses projets de privatisation et de démontage des services publics genevois (référendums contre la privatisation du Service des autos et contre la fermeture de la clinique de Montana).

Savoir être clairs!


Parmi les député-e-s de notre mouvement qui rentreront au parlement genevois suite à cette élection, on trouve Bernard Clerc qui pendant huit ans sera un fer de lance de notre combat sur le front de la fiscalité et des finances publiques… grâce à lui -entre autres- solidaritéS et l’Alliance de Gauche tiendront près d’une décennie un cap politique clair en la matière: refus de toute concession à la démagogie anti-impôts, défense intransigeante du financement des prestations publiques, refus de l’austérité et de la politique des caisses vides, volonté de faire payer les riches… C’est cette orientation constante et déterminée qui a remporté une bataille avec l’acceptation le 2 juin par une majorité des électeurs/trices genevois de l’initiative «pour une contribution de solidarité des grosses fortunes et des gros bénéfices».


Pierre VANEK