Collectif «Besoin de ToiT»: fédérer la résistance

Collectif «Besoin de ToiT»: fédérer la résistance


A Genève, ces derniers mois, la mobilisation sur le terrain du logement est relancée. Locataires, habitant-e-s et squatters tentent de donner une réponse progressiste et unitaire à la crise du logement. De leur côté, les milieux immobiliers, après avoir subi une débâcle historique dans les années 90, ressortent des placards leurs arguments surannés pour, une nouvelle fois, tenter d’accaparer le centre ville et y faire des affaires juteuses. Au Grand Conseil, la droite, à nouveau majoritaire, alliée à l’UDC, n’y va pas par quatre chemins, en proposant et imposant des projets de loi qui déréglementent l’ensemble du processus de construction, s’attaquent à la protection des locataires, tentant de renchérir le prix de la construction.



A la mi-juin, un bon millier de personnes défilaient dans les rues de Genève pour dire leur mécontentement et leur colère contre la nouvelle politique que tentent de mettre en œuvre les milieux des régisseurs, des propriétaires et leurs fers de lance au Grand Conseil, dont le député libéral Mark Muller est la figure emblématique et cariucaturale. La Chambre genevoise immobilière, dont ce dernier est le secétaire général, conspuée par les manifestant-e-s, est apparue clairement comme la grande responsable du renouveau de la spéculation foncière et immobilière.



Pour en arriver là, il aura fallu de nombreuses réunions en vue de définir une plate-forme commune aux représentant-e-s des milieux des locataires, aux associations de quartiers, aux syndicats, aux partis politiques de gauche et écologiste et aux squatters. En effet, sous l’impulsion des occupants de Rhino, des militant-e-s de ces organisations se sont rencontrés pour réfléchir aux nouvelles conditions économiques qu’impose aujourd’hui le capitalisme dans le secteur du logement. Ainsi, ces militant-e-s ont su trouver les points de convergence qui les unissent et qui ont permis de donner cette première réponse collective. Structurer politiquement et idéologiquement ce mouvement renaissant a constitué le premier pas de cette démarche unitaire. Dégager des moyens sur le long terme pour pérenniser le mouvement ainsi créé, reste le plus important. En effet, durant les années 70 et 80, ce fut grâce à une réponse adaptée aux conditions d’alors que la mobilisation a pu rester permanente.

Vingt ans de combat


Les dernières décennies du XXe siècle furent marquées par un combat nécessaire à l’ensemble de ces groupes pour donner la réponse populaire adaptée aux conditions de marché de ces années-là. Une statistique éclairante peut être rappelée pour décrire les résultats positifs de la résistance d’alors. Si, durant les années 70, la Ville de Genève perdait massivement des habitant-e-s. Durant les années 80, contrairement à toutes les villes de Suisse, voire d’Europe, Genève est la seule qui ait regagné des habitant-e-s pour revenir, à la fin des années 90, au nombre d’habitant-e-s qu’elle était capable d’accueillir au début des années 60, soit environ 200000. Cette ré-appropriation du centre-ville par les habitant-e-s s’est faite aussi et surtout en préservant au centre des loyers bon marché. Il suffit de rappeler la lutte des habitant-e-s du quartier des Grottes sur cette question pour s’en convaincre.

J’ai besoin de ToiT


Le 15 juin, à la tête du cortège qui traversait les rues de Genève, un immense toit de toile porté par quelques 60 personnes résumait à lui seul la volonté de l’ensemble des manifestant-e-s: faire le point sur la question du logement et regrouper toutes les énergies possibles sous un même toit pour affronter ces nouveaux défis. C’est pourquoi solidaritéS en appelle aujourd’hui à ses militant-e-s afin qu’il s’en trouve pour dégager du temps pour organiser la résistance dans les quartiers, dans leurs immeubles, dans la rue. Ces forces nouvelles se mettront en relation avec le collectif «Besoin de ToiT» qui vient d’être créé en vue de fédérer toutes ces activités.



Comme on peut l’imaginer, il reste un travail considérable à accomplir. Pourtant, cette nouvelle mobilisation compte déjà à son actif, l’aboutissement du référendum lancé contre une loi votée par le Grand Conseil, avec environ 11500 signatures récoltées en deux semaines et demie par le comité «Droits des locataires» auquel solidaritéS à prêté main-forte. De même, une nouvelle initiative cantonale visant à protéger l’ensemble des droits des locataires et à renforcer les droits de recours des associations d’habitant-e-s est en cours de récolte. C’est plus de dix mille signatures qu’il faudra rassembler en quatre mois.

La magie de la ville


Durant les quarante dernières années , il était question pour les milieux de la finance d’accaparer le centre-ville pour y implanter des bureaux. On a vu dans quelle impasse cette stratégie s’est fourvoyée. Aujourd’hui, pour ces mêmes milieux, il est question d’imposer des logements de luxe dans ce même centre. Face à ce diktat, nous réaffirmons que les centres des villes appartiennent à toutes et tous, qu’ils sont une richesse et un bien commun qui peut contribuer à transformer les énergies individuelles en élan collectif pour projeter les sociétés dans l’avenir et rendre possible un autre monde. Pour cela nous devons nous battre afin de leur imposer un caractère essentiellement populaire.



Rémy PAGANI