Gate Gourmet

Gate Gourmet : Un patron-voyou qui pratique impunément un scandaleux dumping salarial

Depuis le 14 septembre, le personnel de Gate Gourmet est en grève. Cette entreprise, qui fournit les repas aux compagnies aériennes et emploie 122 travailleurs à Genève, engrange des profits appréciables (10 % en août 2013) mais souhaite les étendre d’avantage. Pour ce faire, rien de plus simple : dénoncer la Convention collective de travail (CCT) signée avec le syndicat des services publics (SSP), licencier 86 des 122 salariés sous CCT et les réengager avec des conditions de travail dégradées : fortes baisses de salaire, démantèlement de tous les mécanismes salariaux, relèvement de l’âge de la retraite, diminution de la part patronale pour la LPP.

 

Un dumping salarial pratiqué par un patron voyou et jugé normal par le Conseil d’Etat genevois qui ne trouve rien à redire face à ce scandale alors qu’il préside, à travers Mme Rochat, Genève-­aéroport. Position totalement irresponsable de la part d’un gouvernement qui a le devoir de protéger les salarié·e·s contre ce type de rapacité économique. 

Payé·e·s en moyenne  4200 francs par mois, les employé·e·s tra­vail­lent 7 jours sur 7, de nuit comme de jour, dans le bruit des machines, passant sans cesse du chaud au froid. Et c’est sur le dos de cette catégorie de travailleurs que Gate Gourmet veut augmenter ses profits. Aujourd’hui les grévistes ont décidé de signer les nouveaux contrats de travail mais de poursuivre la grève dans la durée.

Entretien avec Dominique Deil­lon, gréviste et représentant syndical dans l’entreprise.

 

 

Comment se présente la situation aujourd’hui?

 

Dominique : L’aéroport de Genève est officiellement une régie publique mais depuis quelques années la tendance est à la libéralisation tous azimuts. Le discours de la direction est clair : les entreprises ayant une activité dans l’enceinte de l’aéroport ne sont pas publiques et il faut s’adapter. Il existe de sa part une volonté très forte d’exclure le SSP, puisque c’est un syndicat du secteur public. L’offensive actuelle de Gate Gourmet s’inscrit en partie dans ce cadre de libéralisation et d’exclusion de notre syndicat. Ils accepteraient bien d’autres syndicats plus compréhensifs à leur politique. D’ailleurs ils ont essayé d’en introduire un, ils ont également tenté de mettre sur pied une commission du personnel composée… de cadres. Nous avons pu mettre en échec ces tentatives jusqu’à présent.

L’offensive de Gate Gourmet  aujourd’hui c’est d’augmenter leurs profits en s’attaquant frontalement aux conditions salariales sous toutes ses formes. L’annonce de la charrette de licenciement/réengagement par le patron l’illustre très bien : «C’est pas gentil, c’est pas méchant, c’est comme ça!» Après ça, comment s’étonner que le personnel soit très fâché ? Nous sommes donc entrés en grève il y a 10 jours et elle se poursuit. L’assemblée des grévistes a décidé de signer la lettre de réengagement aux nouvelles conditions et donc de rester employé·e·s. Ainsi nous ne sommes pas li­cen­cié·e·s et pouvons poursuivre la lutte. Nous avons décidé de poursuivre la grève qui s’inscrit maintenant dans la longue durée. Nous revendiquons le rétablissement de la CCT dénoncée unilatéralement par l’employeur.

 

 

Dans quelles conditions se déroule la lutte?

 

Bien, même si c’est fatigant ! Le personnel est très fâché, les grévistes comme les non grévistes d’ailleurs. Nous sommes entre 22 et 25 travailleurs à y participer activement. Il faut tenir compte de la situation de l’emploi dans cette entreprise. Sur les 122 employés, 86 sont soumis à la CCT, une partie est auxiliaire hors CCT et une autre est sous un statut de temporaire. Imaginez l’ambiance au travail quand nous faisons tous le même boulot mais avec des salaires différents ! Les non grévistes sont très nombreux à être solidaires mais à cause des pressions de la hiérarchie ou de leurs conditions de vie, ils·elles s’abstiennent d’y participer activement.

Les tentatives d’avoir recours à des temporaires pour briser la grève se sont soldées par un échec grâce à l’intervention efficace d’UNIA.

Nous sommes soutenu·e·s assez largement par les organisations syndicales genevoises, les partis de gauche, les Verts, le SSP au niveau national. Le personnel d’autres entreprises présentes à l’aéroport nous apporte également son soutien. Ces tra­vail­leurs·euses sont déjà sou­mis·e·s pour cer­tain·e·s à des conditions proches des nôtres ou voient venir une attaque dans le même sens. Il faut savoir qu’il existe une structure dite du « brunch des directeurs » qui se réunit régulièrement sous la houlette du directeur de l’aéroport et qui regroupe toutes les directions des entreprises présentes sur les lieux. C’est un bureau de coordination de leurs politiques, apparemment encouragé par le directeur de l’aéroport, représentant de l’Etat, pour libéraliser à outrance cette entreprise publique.

Nous avons également étendu la durée du piquet de grève qui se tient maintenant de 4 h à 20 h. Les cadres, obligés d’être pré­sent·e·s pour empêcher les grévistes d’entrer dans l’entreprise, semblent bien fatigués ! Nous résisterons plus longtemps qu’eux, c’est sûr. Nous appelons les soutiens à venir nous trouver sur le piquet de grève, c’est important pour le moral.

Enfin nous lançons une pétition contre le dumping salarial auprès des boîtes présentes à l’aéroport qui subissent toutes les mêmes attaques. Il faut élargir le front d’opposition au scandale que représentent ces politiques. 

 

 

Et la suite?

 

Elle est simple. Nous sommes dé­ter­mi­né·e·s et poursuivrons la lutte pour que soit rétablie la CCT. La position irresponsable du gouvernement qui soutient, sans nuances, un patron voyou doit cesser. Que font les Conseillers d’Etat de gauche, apparemment complices, puisque silencieux ?

La seule issue rapide à cette lutte serait que le Conseil d’Etat impose la reconduction de la CCT actuelle et l’entrée immédiate en négociation des partenaires signataires.

 

Albert Nahory