Deux ans après

Deux ans après : Syrie ou la lutte permanente

Le peuple syrien en lutte continue, deux ans après le début du processus révolutionnaire, son combat contre le régime dictatorial et criminel des Assad. Ce processus révolutionnaire, avec ses propres caractéristiques, s’inscrit dans les dynamiques des mouvements de la région qui ont leur source dans l’absence de démocratie et de justice sociale. Il ne s’agit pas d’une guerre civile sectaire ou d’un conflit entre deux parties égales comme le répètent les médias internationaux, ou encore d’un complot international contre le régime Assad soi-disant « résistant » pour d’autres. Le mouvement populaire en Syrie n’a cessé de répéter son refus du confessionnalisme et sa volonté de renverser le régime Assad pour construire une société démocratique, sociale et sans discriminations. 

Dans la lutte permanente contre le régime, le peuple syrien doit également faire face à d’autres menaces.  Les soi-disant soutiens internationaux et régionaux qui se présentent comme les « amis de la Syrie » veulent, pour les premiers, imposer une solution par le haut qui maintiendrait la structure du régime, n’en changeant que la tête – solution d’ailleurs soutenue par les fidèles soutiens du régime syrien, l’Iran et la Russie – tandis que les seconds, Arabie Saoudite et Qatar en tête, veulent transformer cette révolution populaire en guerre sectaire, craignant une propagation de la révolution dans la région. 

Ces régimes, qui représentent le centre de la contre-révolution, financent des groupes islamistes extrémistes comme l’organisation du Jabhat al Nusra dont l’idéologie sectaire et réactionnaire est en contradiction avec l’esprit de la révolution. Dans la même logique, ils tentent aussi de diminuer le rôle des comités populaires, parfois par la violence.  

La position des États-Unis traduit à merveille cette situation en refusant de fournir des armes aux groupes liés à l’armée syrienne libre, tout en donnant son accord à l’envoi d’armes par les pays du golfe aux groupes islamistes extrémistes non liés à l’armée syrienne libre (ASL). La résistance armée populaire représente un moyen déterminant du peuple syrien dans sa lutte et il est absolument nécessaire d’aider les composantes de l’ASL, encore aujourd’hui majoritaire mais en manque cruel de moyens financiers et d’armes. Ces derniers s’inscrivent dans l’esprit de la révolution et dans la volonté d’établir une démocratie civile, sociale sans discrimination.

Toutes ces menaces ont le même objectif : empêcher le changement radical par le bas, par le peuple révolutionnaire syrien lui-même. Ces interventions externes et menaces internes s’attaquent à l’auto-organisation des masses révolutionnaires qui ont établi et développent les expériences des comités populaires à travers le pays au niveau des villages, quartiers, villes et régions. Ces comités populaires sont la véritable colonne vertébrale du mouvement et de la résistance, allant de l’organisation des manifestations, de l’aide humanitaire, de l’accueil des réfugiés, à la formation scolaire. Dans les régions libérées de la domination du régime, ce sont les comités populaires qui sont en charge de tous les services à la population.   

Ces comités populaires, en coordination avec la résistance armée populaire, continuent à être la base de la résistance contre le régime, et tout ce qui menace ces deux aspects menace l’existence du mouvement populaire et donc le processus révolutionnaire. 

Face à cette situation, le peuple syrien en lutte poursuit sa résistance permanente pour un changement radical et refuse toutes les interventions extérieures voulant imposer des solutions qui maintiendraient la structure du régime. Durant les manifestations du vendredi 8 février 2013, de nom­breux·euses mani­fes­tant·e·s brandissaient ainsi des pancartes disant «nous négocierions seulement sur le départ du régime». 

Le mouvement populaire refuse toute soumission à une nouvelle forme d’autoritarisme imposée par les groupes, religieux ou laïcs, dans certaines régions libérées. Les attaques de ces derniers contre des organisateurs de comités populaires ont été condamnées par les populations locales. 

Cette révolution orpheline d’un véritable soutien des pays régionaux et internationaux ne démoralise néanmoins pas les Syriens et Syriennes qui continuent leur lutte de manière permanente pour la liberté et la dignité face à une répression terrible. La victoire de la révolution syrienne permettra le développement de situations révolutionnaires dans les pays voisins tandis qu’elle approfondira le processus révolutionnaire dans les autres pays.  La résistance et le courage du peuple syrien est une inspiration pour tout révolutionnaire et nécessite donc une solidarité des peuples en lutte au niveau mondial. Nos luttes sont liées et chaque victoire d’un peuple pour son émancipation a des répercussions au niveau international. 

 

Vive la révolution syrienne ! Vive les peuples en lutte ! 

 

Joseph Daher