LIASI, un an déjà!

De loin pas ! C’est ce dont ont témoigné ensemble associations d’usagers·ères, de professionnel·le·s, syndicats et partis de gauche devant la presse le 20 février. Après un an d’application de la nouvelle Loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle (LIASI), tous s’accordent : les seules promesses que la loi a tenues sont celles des déceptions annoncées par le Comité référendaire qui la refusait.

 

SolidaritéS, très actif dans cette campagne, avait insisté sur le fait que le nouveau dispositif s’inscrivait dans cette distorsion inhérente aux nouvelles politiques publiques, qui érige le déni des problématiques sociales en système et l’évaporation dans la nature de leurs victimes en solution. Avec la LIASI le fait est avéré. Plutôt que de chercher des réponses à l’affaiblissement du marché de l’emploi, aux délocalisations et à la sous-enchère salariale, le Conseil d’Etat et la majorité de droite et d’extrême droite du Grand Conseil ont institué un dispositif qui exclut des mesures d’insertion celles et ceux qui ne franchissent pas la barrière des conditions de revenus posées et les fait disparaître des statistiques du chômage et du RMCAS.

 

Etiquetage et ségrégation

Pour ceux qui entrent dans le dispositif, on prétend distinguer entre personnes dites « employables » et « inemployables », pour n’avoir pas à se justifier de n’offrir pour horizon que l’aide sociale à ceux qu’on aura étiquetés trop « éloignés de l’emploi ». A noter que le « tout à l’aide sociale » a induit pour celle-ci, au gré des régressions successives des assurances sociales, une hausse de 39 % au cours des 4 dernières années. Palmarès paradoxal pour les chantres du moins d’Etat !

Ladite ségrégation s’exerce au travers de stages, superficiels, infantilisants et stigmatisants. Outre le fait que les moyens n’ont pas été investis d’apporter une véritable plus-value en termes d’évaluation des compétences et d’orientation, ils se réduisent pour la majeure part à un stage de 4 semaines de déconstruction d’ordinateurs, voire à faire gratuitement de la sous-traitance pour un grand groupe d’expédition actif sur le marché.

L’occupation pour ce faire d’Emplois de Solidarité (EdS) démontre le peu de sérieux accordé à la fonction d’évaluation. Sur le fond, la focalisation de la loi sur l’insertion se heurte à l’obstacle premier de l’absence de perspectives. Prioriser l’insertion sans investir sur la formation, sur la préservation et le développement de l’emploi est au mieux un leurre, au pire une supercherie. Quant au suivi personnalisé, tant vanté par les inconditionnels de la LIASI durant la campagne référendaire, il se dilue dans les méandres d’une organisation fondée sur le dédoublement des accompagnements, la multiplication des interlocuteurs et le primat des procédures sur l’humain.

 

Moyens manquants et suivi social sabré

Pire, il se dissout dans une institution en perte de références qui, privée des moyens indispensables pour assurer les multiples tâches qui lui sont déléguées, commence à opter pour la lightitude du suivi social. A savoir ne rencontrer les usagers-ères que tous les 2 à 3 mois. Chose dont le reproche a été un motif de la suppression du RMCAS. Là encore, un paradoxe dont devraient s’expliquer ceux qui ont à la fois soutenu la LIASI et refusé le budget de l’Etat.

Enfin, las, des contre-vérités et des manipulations statistiques, pour redonner place à la rigueur statistique et à l’honnêteté intellectuelle, les associations d’usagers·ères, de professionnel·le·s, les syndicats, solidaritéS, le PS et les Verts ont constitué un Collectif du suivi LIASI. Il vise à créer un observatoire de l’application de la LIASI, pour non seulement observer ses effets, mais les chiffrer, les documenter, les analyser. Son premier objectif sera d’être au rendez-vous fixé par le DSE pour septembre, moment auquel sera rendu un premier rapport d’évaluation de la loi. Rendez-vous donc à cette date. 

 

Jocelyne Haller