Secteur public genevois

Secteur public genevois : Unité syndicale et mobilisation du personnel pour ses droits

Nous avons posé trois questions à Olivier Baud, enseignant et nouveau président du Cartel intersyndical du secteur public genevois, à la veille de la grève des fonctionnaires cantonaux
du 13 septembre, décidée par l’AG du personnel en début de semaine pour s’opposer à la dégradation prévue de leurs conditions de retraites. Nous publions également ci-dessous
les décisions de cette AG.

La mobilisation engagée a-t-elle été à la hauteur de tes attentes ?

Olivier Baud: Je relève d’abord que cela faisait deux ans et demi qu’une Assemblée du personnel de la fonction publique n’avait plus été convoquée. Cet exercice est pourtant primordial pour des raisons démocratiques et mobilisatrices évidentes. Réunir ainsi quelque 200 personnes, à la rentrée, sur un dossier aussi complexe que la fusion des caisses de pension (CIA et CEH) représente un signe encourageant. L’appel conjoint du Cartel intersyndical et du SSP a été entendu et, ainsi, la nécessaire unité syndicale, fragilisée à cause de cette épineuse question des retraites, se reconstitue de manière visible et rassurante.

Sur quelles bases s’est faite cette unité ?

Le Cartel et le SSP ont défini des revendications communes et assument leur opposition au projet de loi de la commission des finances du Grand Conseil. Les syndicats sont déterminés à ne pas laisser l’actuelle majorité parlementaire bafouer le partenariat social. Les manquements de l’Etat-employeur, qui ne tient pas ses engagements, se déclare impuissant et cède au chantage de la droite, sont inquiétants. La résistance des fonctionnaires face au fatalisme ambiant est salvatrice. L’âge moyen d’entrée dans les caisses est de 30 ans. Et il faudrait 40 ans de cotisation pour toucher une rente pleine ? En l’an 2000 encore, 35 années « suffisaient »… Les baisses d’impôts successives font perdre des centaines de millions à l’Etat par an; or ceux qui ont voté ces lois fiscales s’attaquent de manière redoublée à la fonction publique, jouent les vierges effarouchées, montant les citoyen·ne·s contre elle en inventant de soi-disant privilèges. En réalité, les conditions actuelles de retraites de la fonction publique genevoise sont comparables à la moyenne en Suisse, certaines entreprises privées offrent même des conditions bien plus avantageuses.

Quelles perspectives vois-tu en la matière à plus long terme ?

La loi fédérale votée fin 2010 imposant aux caisses publiques de recapitaliser à hauteur de 80 % est inique et absurde. Les caisses de l’Etat sont pérennes (ou le seraient sans la menace de liquidation liée à cette loi). La recapitalisation contrainte profitera surtout aux milieux financiers et spéculatifs et augmentera les risques que seuls les assuré-e-s auront à assumer en cas de résultats négatifs. La seule CIA avait déjà perdu un milliard en 2008 suite au crash de l’été 2007. Des mesures d’assainissements à répétition sont ainsi programmées, sur le dos des affilié·e·s, et l’objectif fixé, censé être atteint en 2052, devient surréaliste. Si les caisses doivent effectivement prévoir sur un terme plus ou moins long, qui peut aujourd’hui savoir – par exemple – quelle sera l’espérance de vie dans 40 ans, quel sera le sort des 1er et 2ème piliers ? Il convient donc d’empoigner ces dossiers au niveau fédéral au plus vite. Les syndicats genevois qui avaient soutenu l’idée d’un référendum contre la loi fédérale en question pouraient soutenir une initiative visant à corriger ce système de prévoyance
inéquitable. 

 


Conclusions de la résolution votée en AG le 10 septembre

L’Assemblée du personnel

Réaffirme son attachement à la primauté des prestations ;

Se prononce contre le projet de loi voté par la majorité de la commission des finances ;

Refuse le passage à 40 années de cotisation (+ 2 ans CIA ; + 2 ans ½ CEH) et l’augmentation de l’âge de la retraite (âge pivot) à 64 ans (+ 2 CIA ou + 4 ans CEH) ou à 61 ans pour les salarié·e·s au bénéfice du critère de pénibilité ;

Dénonce la forte augmentation des cotisations qui réduira les salaires, en particulier pour les basses classes, et la fixation d’objectifs financiers à très court terme (paliers
supplémentaires de capitalisation) qui exposeront la future caisse à des mesures d’assainissement à répétition ;

Exige:

– le maintien absolu de la répartition de la cotisation 2/3 employeur (Etat) – 1/3 personnel ;

– le maintien de la prise en charge par l’Etat des 2/3 du coût en cas de revalorisation collective ;

– le financement intégral par l’Etat de la recapitalisation de la caisse suite à l’abaissement du taux technique à 3,5 % ;

– une véritable représentation démocratique des salarié·e·s et des pensionné·e·s dans la composition du comité de la future caisse, sans place pour les cadres ;

– le maintien d’un mécanisme d’indexation des pensions.

En conséquence, l’Assemblée du personnel :

Appelle l’ensemble du personnel et des pensionné·e·s affilié·e·s à la CIA et la CEH à se mobiliser unitairement pour défendre leurs conditions de retraite et à suivre la ½ journée de grève le jeudi après-midi 13 septembre ;

Appelle les salarié·e·s à rejoindre la manifestation organisée par le Cartel et le SSP le 13 septembre prochain, dans la rue et sous les fenêtres du Grand Conseil ;

Invite le Cartel intersyndical et le SSP à débattre ensemble sur la suite du mouvement et à s’efforcer dans toute la mesure du possible de définir une position commune, en fonction du contenu du projet voté par le Grand Conseil, du positionnement des différentes forces, et d’une analyse lucide des risques encourus.