Constituante

Constituante : Une «troisième lecture» bien mal partie

 Il fallait s’y attendre, les négociations entre la droite et la gauche «gouvernementale» concrétisent plus de reculs que d’avancées.

 

De plus, ces « convergences » ont pour effet d’empêcher tout débat en plénière, l’entrée en matière sur de nouvelles propositions étant systématiquement refusée. Il ne reste donc plus que des débats possibles sur des divergences entre la première et la deuxième lecture, qui souvent ne correspondent qu’à un déplacement de virgule. Sur 240 articles et 421 alinéas, il reste 10 questions qui permettraient un débat, tout en sachant que l’issue d’un tel débat est déjà connue « grâce » aux convergences.

 

Il reste à faire la liste de ces convergences qui correspondent à des reculs :

L’éligibilité des étrangers au niveau communal est sacrifiée soi-disant au profit de l’acceptabilité du projet en votation populaire, la « gauche » obtenant le retrait de l’imposition communale sur le lieu de domicile.

L’acceptation par la « gauche » de déplacer la question des finances avant celles des tâches de l’Etat, donc de la vision néo-libérale qui définit d’abord l’argent disponible pour savoir quelles tâches peuvent être assumées par l’Etat. La véritable gauche a toujours défendu qu’il faut d’abord définir les besoins sociaux qui doivent être satisfaits, et de définir ensuite la fiscalité qui garantisse ces objectifs.

La suppression de l’article sur le salaire minimum dans sa version jurassienne (Chaque travailleur a droit au salaire qui lui assure un niveau de vie décent.)

Le maintien du fait que « l’Etat agit au service de la collectivité, en complément de l’initiative privée…»

La suppression de la forme la plus claire de la justiciabilité des droits fondamentaux. (Quiconque est lésé dans ses droits fondamentaux peut saisir l’autorité ou la juridiction compétente.)

Le maintien du quorum à 7 % pour les élections au Grand Conseil et du nombre de signatures pour les initiatives et référendums, mais définis en % des électeurs·trices, donc avec une augmentation programmée !

Les effets de seuil pour l’aide sociale ne sont plus supprimés.

Les principes régissant le système fiscal ne comportent pas la progressivité du taux, mais privilégient ce qui peut diminuer l’impôt en particulier pour les riches.

La politique de l’énergie vise d’abord à garantir l’approvisionnement, et abandonne une partie de l’article 160E.

La notion de souveraineté alimentaire est supprimée.

 

Face à cette liste, les concessions ne font pas le poids :

Maintien d’une formule un peu meilleure du droit à la formation

Maintien du rôle du Grand Conseil dans l’opposition au nucléaire.

Maintien d’un article positif sur la culture.

Même s’ils restent inacceptables, les freins à l’endettement sont moins pire que dans la version précédente. L’objectif d’une suppression de 5000 postes dans la fonction publique est retiré comme thèse, ainsi que celui de diminuer de 5 milliards la dette.

 

En conclusion, une 3e lecture qui s’est décidée en coulisses, des plénières réduites à se prononcer sur des virgules, avec hélas une déception supplémentaire : nos amis des Associations de Genève semblent avoir été un peu happés par cet espoir d’une Constitution finalement acceptable, alors qu’il nous semble de plus en plus difficile d’y croire. 

 

Michel Ducommun