Projet de constitution

Projet de constitution : Vers un refus!

 

Le processus de réécriture de la constitution genevoise touche à sa fin, puisque la population se prononcera le 14 octobre prochain sur le texte élaboré durant 4 ans par la Constituante. Alors que l’assemblée vient d’achever sa deuxième lecture du projet, et s’apprête à démarrer la troisième et dernière lecture, nous publions ci-dessous de larges extraits de la prise de position signée par notre groupe d’élu·e·s solidaritéS à la Constituante.

 

[…]

 Les 20 ou 30 dernières années ont été marquées par une aggravation des conditions environnementales et climatiques, par une crise du logement et des transports, par une augmentation des inégalités et de la précarité, par une diminution de l’effort fait pour des prestations sociales (santé, enseignement, aide sociale, logement). Si sur ces questions la nouvelle constitution ne donne pas de meilleures réponses que l’ancienne, alors le jeu n’en vaut pas la chandelle.

 

Une constitution néolibérale

D’une manière générale ce projet est caractérisé par une orientation très néolibérale. Dès l’article 9, il est affirmé que les principes de l’activité publique sont au service de la collectivité, mais « en complément de l’initiative privée et de la responsabilité individuelle». Donc l’Etat ne fait que compléter les services à la collectivité fournis par l’initiative privée.

     […] La volonté d’affaiblir les syndicats est une constante du néolibéralisme, la droite genevoise y est fidèle en refusant que la constitution garantisse l’activité syndicale sur les lieux de travail. D’autre part, la volonté de diminuer les impôts est au centre d’une politique néolibérale qui vise à préserver les intérêts des plus riches et à vider les caisses pour réduire les services publics et les prestations sociales. Quasiment tous les articles qui parlent finances correspondent à cet objectif, principalement au travers des définitions et du frein à l’endettement. Par exemple, si une suppression des prestations est voulue par le Grand Conseil, l’électeur·trice n’aurait pas d’autre choix que d’accepter cette suppression ou d’accepter une augmentation d’impôts.

[…] L’ennemi principal, c’est la dette, qui devrait être ramenée de 10,5 milliards à 5,5 milliards selon un amendement voté par la droite. S’il faut consacrer, à relativement court terme, 5 milliards pour rembourser la moitié de la dette, que reste-t-il
pour les prestations sociales, la santé, l’enseignement, l’aide sociale? Une manière d’économiser, c’est de diminuer le nombre de fonctionnaires, c’est-à-dire d’infirmiers·ères, d’enseignant·e·s, d’assistant.e.s sociaux·les, de contrôleurs·euses des impôts, etc. […]

 

Maigres avancées pour les droits politiques

En ce qui concerne les droits politiques, l’éligibilité des étrangers·ères au niveau communal est certes un progrès, mais minimal par rapport au fait qu’au niveau cantonal 40 % de la population restera privée de droits politiques. D’autre part, le compromis concernant le nombre de signatures nécessaires pour des initiatives ou référendums non seulement ne corrige pas l’énorme différence d’avec la grande majorité des autres cantons suisses (en fonction de la population, plus du double de la moyenne suisse), mais introduit une spécificité genevoise: un nombre de signatures défini par un pourcentage des électeurs·trices, donc un nombre qui augmentera avec le temps. Concernant le quorum pour les élections, il avait été fixé à 5 % dans la première lecture, la droite l’a remonté à 7 %, éliminant ainsi le vote d’environ 8 700 électeurs·trices. Enfin, aucun progrès n’a été fait en vue d’introduire la parité dans les instances élues.

 

Article antinucléaire à la trappe

En ce qui concerne l’environnement, l’écologie, l’aménagement et l’énergie, on recule plus que l’on avance, dans un domaine dont l’importance a explosé. Sur le climat, on reste à des généralités dignes de l’échec de Copenhague, sur l’énergie on abandonne (37 non, 27 oui, 5 abstentions pour notre amendement) l’article antinucléaire 160E, qui définissait de manière cohérente et complète une politique qui permettait de se passer du nucléaire. Il n’en reste que certains éléments un peu contradictoires avec la priorité de la droite, qui est de garantir l’approvisionnement en énergie. Un amendement des Verts demandant aux SIG « de viser la réduction de la consommation énergétique et de promouvoir les énergies renouvelables» a même été refusé […]

   Pour le logement, une partie importante de la constitution actuelle est conservée, mais avec un ajout qui semble plaire aux milieux immobiliers : « La réglementation prévoit des procédures simples permettant la réalisation rapide de projets». Une autre manière de réclamer une déréglementation dont on peut douter qu’elle profitera aux locataires. Par contre, la proposition qui donnait la priorité aux logements d’utilité publique a été refusée.

   Pour la mobilité, il y a la volonté utopique d’obtenir la fluidité du trafic grâce à la complémentarité des transports publics et privés, au lieu d’affirmer la priorité des transports publics. Pour la famille, c’est la suppression de l’allocation parentale.

 

Vers un refus

Le constat général est ainsi très loin d’être satisfaisant. […] Par rapport aux nouveaux défis, le projet issu de la deuxième lecture ne semble pas plus « moderne » que la constitution actuelle, à moins que la modernité ne soit comprise comme l’adhésion au néolibéralisme. Nous définirons notre acceptation ou notre refus de ce projet après la troisième lecture, mais en l’état il existe plus de raisons de le refuser que de l’accepter.

 

Le groupe solidaritéS à la Constituante

version intégrale disponible sur www.ge.ch/constituante