Non aux gaz de Schiste!

A l’appel du collectif «Non au gaz de schiste en Haute-Savoie», qui regroupe plus de quarante associations locales, une journée de mobilisation le 11 février a connu un important succès: plus de 700 personnes au meeting le matin et plus de deux mille manifestant-e-s dans les rues de Saint-Julien l’après-midi pour lutter contre les forages d’hydrocarbures prévus dans la région.

La ruée sur les gaz de schiste ou gaz de roche-mère (forme de gaz naturel extraite par fracturation des terrains schisteux) s’inscrit dans la folie écosuicidaire des industries à la recherche de nouveaux profits dans le domaine des énergies fossiles. La rentabilité financière de ces gaz est apparue en lien direct avec la hausse des produits pétroliers et de nouvelles technologies d’extraction qui aggravent les risques de pollutions massives.

 

Un extractivisme mortifère

Les USA et le Canada sont les pionniers dans cet « extractivisme » forcené : début 2011, près de 500 000 forages sont actifs, en majorité au Texas et en Pennsylvanie, assurant 20 % des besoins énergétiques des USA, lesquels prévoient d’augmenter cette part à 40 % ! Mais récemment, en Arkansas, la commission du pétrole et du gaz a imposé un moratoire en raison des 1200 tremblements de terre conséquences de cette exploitation recensés, depuis le début 2011.

Les impacts environnementaux et sanitaires se révèlent en effet très dangereux. Non seulement le bilan carbone est encore plus négatif que pour le charbon ou le pétrole: avec une production de 30 % à 200 % plus élevée de gaz à effet de serre qu’à partir d’un puits conventionnel, en particulier à cause des fuites de méthane, ceci malgré les dénégations de l’industrie gazière.

Mais surtout, les forages avec la fracturation hydraulique et les produits toxiques utilisés (additifs biocides, lubrifiants détergents), entraînent des dégâts des sous-sols, contaminant les ressources en eau. Ces graves détériorations du sous-sol posent un problème aux industries « extractives » de l’eau minérale naturelle. Et l’ensemble des risques de contamination des eaux, du sous-sol, de l’air, les risques sismiques, et les besoins trop important d’eau y compris locale pour l’exploitation sont des nuisances potentielles massives évidentes.

Enfin, sans un cadre plus « incitatif », la production et le développement de gaz non conventionnels ne pourront pas compenser le déclin des ressources fossiles (pétrole et gaz naturels) ce que reconnaissent à mots couverts l’Association Eurogas, l’Union Européenne pour l’Industrie du gaz naturel, et le président du groupe GDF Suez. Ce qui n’empêche pas ces nouvelles explorations et exploitations de se développer actuellement en Europe, surtout dans le Nord (Pologne, Suède, Danemark, Allemagne), mais aussi au sud des Pyrénées, dans le Pays basque.

 

Feu vert aux forages en France

Partisan de cette technologie, le ministre français de l’environnement Borloo a donné le feu vert du gouvernement aux forages en France dans sept départements. Même après l’adoption de la loi interdisant l’exploitation des gaz de schistes par hydrofracturation en été 2011, l’exploration reste possible dans l’Hexagone, avec toutes les pressions imaginables vers l’exploitation pure et simple. Il y aurait ainsi en France encore 61 permis en vigueur en 2012!

C’est bien ce que dénonce Jacques Cambon, ingénieur hydrologue, militant d’ATTAC, animateur du collectif contre le gaz de schiste: « Ce sont des foreurs! Avec le permis M615 GEX, sur 900 km2, à savoir un triangle avec un épicentre entre le Salève, le Vuache et le Lac Léman. Pour Gex Sud, le territoire concerné s’étend jusqu’à Annecy. Les autorisations sont en cours, déjà accordée pour le premier périmètre. Ça va donc se faire!»

Le collectif du Haut Bugey dénonce également le permis « des Moussières » accordé en 2008 à la société britannique Celtique Energie Petroleum d’explorer et d’exploiter les hydrocarbures liquides et gazeux sur une zone de 3269 km2, comprenant l’est du département de l’Ain, ainsi que le sud du département du Jura.

 

Un nouveau front transfrontalier

Les mobilisations citoyennes sont apparues en 2011 aux USA et le film «Gasland» a favorisé en Europe la création et le renforcement des collectifs opposés au gaz de schiste. En été 2011, une manifestation de 11 000 personnes a eu lieu en Auvergne. Depuis cet élan, l’opposition au gaz de schiste prend de l’ampleur, dans une dynamique de proximité, avec la création de nombreux collectifs liés aux communes.

A Genève, les premiers pas de cette mobilisation sont également apparus en 2011, et la Coordination climat et justice sociale s’est faite le relai transfrontalier des appels contre cette nouvelle source d’énergie fossile polluante, émettrice de gaz à effet de serre.

Les enjeux de la politique énergétique liée au projet d’agglomération franco-valdo genevoise 2030, à savoir la nécessité impérative de réduire massivement nos émissions de CO2 dans l’ensemble régional et le combat toujours plus nécessaire contre l’énergie nucléaire, doivent nous mobiliser également contre les gaz de schistes. Un nouveau front transfrontalier s’est manifesté ainsi à Saint-Julien, avec une participation symbolique du côté genevois, réunissant en particulier des militant·e·s de ContrAtom, de solidaritéS et des Verts. Ces liens transfrontaliers sont d’autant plus nécessaires que les problèmes environnementaux et sociaux dépassent largement les limites des postes de douane!

 

Gilles Godinat