Un budget qui ne prend pas en compte les urgences économiques et sociales

Nous publions ici des extraits du rapport de minorité rédigé au nom du groupe « A Gauche Toute ! » au Grand Conseil. Celui-ci dénonce la politique budgétaire de la majorité bourgeoise dans le canton de Vaud, très en dessous des véritables enjeux écologiques et sociaux.

Un constat s’impose à nouveau dans le cadre de la discussion du budget 2012 : l’Etat de Vaud est dans une situation financière très favorable et ce, dans le contexte où une crise économique et financière se développe à l’échelle mondiale, avec des conséquences sur l’emploi et les conditions de travail dans le canton (projet de fermeture du site de Novartis à Nyon, suppression d’emplois et licenciements chez Kudelski, chez Bobst, dans le secteur bancaire). La précarisation des emplois s’accélère, le nombre de personnes sans emploi, au chômage, à la recherche d’une formation professionnelle augmente. Le pouvoir d’achat d’une grande partie de la population stagne, voire diminue. Les finances cantonales sont « en bonne forme », mais la situation dans les services publics et parapublics se dégrade, tant pour les usagers que pour ceux et celles qui y travaillent : embauche insuffisante, sous-dotation chronique. Des indemnités pour le travail de nuit ne sont pas payées, sans parler de la prime d’ancienneté dont le principe est pourtant inscrit dans la loi. Certaines prestations sont de ce fait remises en question, par exemple dans le secteur des soins. Le Conseil d’Etat et la majorité du Grand Conseil préfèrent distribuer l’argent aux entreprises et aux gros revenus (baisse d’un point d’impôt, suppression de l’impôt sur le capital, subsides directs aux entreprises pour des dizaines de millions de francs) plutôt que de doter le service public des moyens dont il a besoin.

Canton riche et rigueur

Rappelons d’abord que les charges pour 2010, selon les comptes, étaient inférieures au budget de 33,7 millions (-0,45 %), alors que les revenus étaient supérieurs de 932 millions, si l’on ne prend pas en compte les écritures de bouclement (669,3 millions). Les revenus avaient été à nouveau largement sous-estimés au budget 2010 par le Gouvernement et sa majorité au Grand Conseil. Un écart de 890,7 millions ! L’écart était de + 16,2 % sur l’ensemble des recettes fiscales, soit 715,4 millions de recettes fiscales supplémentaires. L’une des seules recettes fiscales qui avait été moindre que prévu (– 18,7 %), est celle de l’impôt sur le capital, à la très grande satisfaction des entreprises… La sous-estimation systématique des recettes au budget 2012 permet à nouveau de justifier la poursuite d’une politique d’économies, au détriment des prestations de services publics, des intérêts des usagers et des conditions de travail des employés de la fonction publique vaudoise. Elle sert également à limiter les investissements nécessaires à l’amélioration, sur le court et le long terme, des conditions de vie et de travail de la très grande majorité de celles et ceux qui habitent ce canton.

La dette a bon dos

L’année 2010 s’est donc achevée avec un surplus financier de plus d’un milliard de francs. Le projet de budget 2012 annonce un excédent d’un peu plus de 15 millions. On peut d’ores et déjà parier que cet excédent est fortement sous-évalué et que l’excédent réel sera bien plus important ! Le gouvernement, comme les années précédentes, sous-estime les recettes fiscales pour justifier plus facilement une politique budgétaire qui persiste à ne pas prendre véritablement en compte les priorités politiques répondant aux besoins de la majorité de la population du canton en matière sociale et écologique. Sur la base de l’évolution de l’endettement en 2010, les comptes de 2011 devraient dégager un résultat positif qui dépassera très vraisemblablement 500 millions. Quant à la provision liée à la nouvelle répartition des tâches de la Confédération (part de la RPT réduite à 82,4 millions pour l’année 2012), il s’agit d’un poste utilisé de manière comptable pour réduire les bénéfices prévisibles. Dans les faits, chaque année depuis six ans, l’Etat de Vaud annonce un budget présentant un bénéfice. Il résorbe en outre sa dette financière. Le gouvernement se vante de la politique de réduction la dette publique menée ces dernières années (dette nette au 31 décembre 2010, 1 910 millions, au 31 décembre 2011, 1 790 millions et, selon budget 2012 au 31 décembre, à 1 781 millions). Il s’agit bien d’un remboursement à marche forcée de la dette, véritable non-sens politique. L’endettement des collectivités publiques en Suisse est l’un des plus bas du monde. Actuellement, il équivaut à moins de 50 % du Produit intérieur brut?; sur le plan vaudois, la dette équivaut à quelque 5 % du Produit cantonal brut seulement ! En 1947, année de la création de l’AVS, le ratio dette/PIB en Suisse atteignait 70 %, ce qui n’a pas empêché de mettre sur pied cette assurance sociale. La dette publique n’est pas un fardeau pour les générations suivantes, comme il est dit à tort : les dépenses consenties aujourd’hui, comme les dépenses pour la formation, les voies de communications ou les infrastructures, bénéficieront aussi à nos descendant·e·s. […] Pour répondre à l’urgence écologique, il s’agit notamment de promouvoir des économies d’énergie, notamment par des investissement massifs dans l’isolation thermique du parc immobilier public et privé, ainsi que le remplacement progressif des énergies fossiles par des sources d’énergie « propres », notamment d’origine solaire. […]

Jean-Michel Dolivo