Mexique

Mexique : Chronique de la répression ordinaire

Au Mexique, les militants sociaux ou politiques sont constamment menacés. Deux exemples récents illustrent cette réalité.

Le 26 octobre, Carlos Sinuhé Cuevas Mejía, étudiant de la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Universidad Autónoma de la Ciudad de México (UNAM), était retrouvé mort, assassiné de seize coups de feu. Au cours des dernières années, il s’était illustré dans la lutte pour la défense d’une éducation publique et gratuite. Il participait également activement au comité étudiant de soutien au Syndicat Mexicain des Électriciens (SME), ainsi qu’au Forum National des Déplacés au sein duquel diverses organisations du pays regroupant des personnes déplacées pour des motifs de violences, politiques ou environnementaux, échangent leurs expériences. Depuis septembre 2009, il était l’objet de diffamations et de menaces que les autorités universitaires n’ont jamais cru bon de prendre au sérieux. S’il n’est pas possible, au jour d’aujourd’hui, d’établir un lien direct entre ces menaces et ce tragique dénouement, un constat s’impose cependant : le climat de violence et de confusion généralisées, l’incapacité, ou le manque de volonté des autorités d’assurer des conditions minimales de sécurité rend possible le passage à l’acte de certains groupes qui ont la certitude de pouvoir bénéficier d’une impunité totale.

Deuxième exemple en date, la répression le premier novembre d’une manifestation pacifique à Ciudad Juárez. Ce jour-là, environ 25 « indignés de Juárez » entendaient commémorer la mémoire des victimes de la guerre de Calderón. Alors que les manifestants déambulaient dans la ville, en collant des croix de papiers portant le nom de quelques-unes des 9000 victimes dénombrées à Ciudad Juárez depuis 2008, ce sont près de 150 policiers, appuyés par 50 véhicules, qui ont mis fin brutalement à cette manifestation non-violente. Les 25 participants, parmi lesquels se trouvaient plusieurs femmes, adolescents ainsi que des personnes âgées ont tous été appréhendés après avoir été brutalisés. Pendant l’intervention policière, plusieurs journalistes ont également été agressés et empêchés de réaliser leur travail. Le soir même, faisant preuve d’un courage exemplaire, des habitants solidaires se sont rendus aux portes du commissariat dans lequel étaient détenus les « indignés » afin d’exiger leur libération. Cette protestation a donné lieu à de nouvelles violences policières et à de nouvelles arrestations. C’est finalement le lendemain, grâce à la pression nationale et internationale, que les 28 détenus ont été libérés. Pendant les 24 heures qu’ils ont passées entre les mains des autorités, tous les prisonniers ont eu à subir violences, vexations et humiliations. Plus grave encore, les menaces proférées à leur encontre de faire partie des prochains « disparus » s’ils s’obstinaient à descendre dans la rue pour protester contre la situation intolérable du pays.

Face à cette situation de violence et d’impunité voulue par l’oligarchie, il est du devoir de chacune et de chacun de tout entreprendre pour soutenir ceux qui luttent et s’organisent afin de mettre à bas ce régime inepte.

Héctor Márquez, correspondant de « solidaritéS » au Mexique