Les théories du genre et les manuels scolaires français

Les théories du genre et les manuels scolaires français



Depuis la rentrée scolaire, les
manuels de Sciences de la vie et de la Terre (SVT) des petits
Français contiennent un chapitre intitulé
« Féminin-Masculin ».

L’introduction de ce nouveau chapitre, ainsi que de son
sous-chapitre « Devenir un homme ou une
femme » dans lequel l’élève doit
apprendre à : « différencier,
à partir de la confrontation de données biologiques et de
représentations sociales ce qui relève : –
de l’identité sexuelle, des rôles en tant
qu’individu sexué et de leurs stéréotypes
dans la société, qui relève de l’espace
social – de l’orientation sexuelle qui relève de
l’intimité des personnes » a soulevé
une vague de protestations provenant de la droite française,
soutenue par les milieux catholiques conservateurs.

    Les critiques à l’encontre de cette
nouveauté dans l’enseignement des SVT ont atteint leur
paroxysme ces dernières semaines. Après les 80
députés de l’UMP fin août, ce sont maintenant
113 sénateurs qui ont signé le 12 septembre une lettre
adressée au ministre français de
l’éducation, Luc Chatel, afin de protester contre ce
qu’ils considèrent comme
« l’enseignement de la théorie du genre en
classe de 1ère année ». Ils demandent
notamment le retrait des manuels qui abordent la question de
l’identité sexuelle sous l’égide des
théories du genre, avec l’argument fallacieux selon lequel
ces théories ne seraient pas scientifiques. Une théorie
qui démontre que le rôle attribué aux femmes
n’est pas la conséquence directe du sexe biologique de ces
dernières, mais également de leur socialisation, ne
pouvait pas plaire à ces messieurs. En effet, en affirmant que
la différence entre les sexes est uniquement biologique, ils
peuvent aisément légitimer la répartition
sexuée des tâches, si possible en défaveur des
femmes. Les milieux catholiques conservateurs s’opposent
également aux théories de genre qui mettent en avant
d’autres modèles pour les femmes que le traditionnel
Kinder-Kirche-Küche (Enfants-Eglise-Cuisine) prôné
par l’Eglise.

    Dans leurs lettres, les députés et
sénateurs s’attaquent également au discours sur
l’homosexualité qui est mis en avant dans les nouveaux
manuels de SVT. Selon les signataires, l’indifférenciation
sexuelle qui serait prônée par les théories du
genre serait une forme d’incitation à
l’homosexualité. L’homosexualité est
perçue comme une sorte de maladie, capable de se propager dans
les classes simplement en étant mentionnée. Ce discours
homophobe n’a rien de surprenant quand on regarde de plus
près la liste des signataires. En effet, parmi les 80
députés plusieurs sont des homophobes notoires, comme
Jacques Myard qui a établi un lien entre homosexualité et
zoophilie lors d’un débat sur le pacs en 1998, et
Christian Vanneste qui a déclaré en 2005 que
« l’homosexualité était
inférieure moralement à
l’hétérosexualité ». Il est
impératif de combattre de tels propos qui nuisent à la
société et particulièrement aux jeunes. Le taux de
suicide des jeunes homosexuels, par exemple, est plus
élevé que celui des jeunes hétérosexuels,
en partie à cause de l’homophobie ambiante.

    L’école se doit d’être un
espace où les jeunes peuvent apprendre à vivre en
communauté sans stéréotypes, ni discriminations.
Le discours de l’UMP sur le nouvel enseignement de SVT est
fondamentalement réactionnaire, sexiste et homophobe. Il doit
à tout prix être combattu, car il remet en cause les
acquis du féminisme concernant l’égalité
entre hommes et femmes, ainsi que les acquis des mouvements LGBTI.


Nora Kohler